La performance des sociétés canadiennes contrôlées inscrites au S&P/TSX


 

Voici le sommaire exécutif du document « La performance des sociétés
canadiennes contrôlées inscrites au S&P/TSX : les effets favorables d’une vision à long terme sur les considérations environnementales, sociales et
sur le rendement des actionnaires »

Ce document a été réalisé par François Dauphin, MBA, CPA, président-directeur général de IGOPP.

Bonne lecture !

 

Entreprises familiales et COVID, quelles tendances pour le monde d'après ?

 

Les entreprises familiales constituent l’assise fondamentale des économies de marché. Ces entreprises sont souvent empreintes d’une culture forte ancrée dans les valeurs du fondateur, et cette culture se développe, s’affermit au fil du temps, parfois même au-delà des premières générations qui se succèdent à la direction de la société familiale.

Ces sociétés ont tendance à prendre des décisions en fonction d’un horizon à long terme, en considération de l’ensemble de leurs parties prenantes et de l’environnement, car il est naturel pour ces sociétés de vouloir s’assurer
que les conditions futures demeureront favorables. C’est l’essence-même d’une création de valeur durable.

Au fil de leur croissance, les plus grandes de ces entreprises ont éventuellement dû faire un appel à l’épargne public. Soucieux de maintenir le contrôle sur les activités de l’entreprise, d’y conserver une culture qui reflète les valeurs à la source des succès passés de la société, ces entrepreneurs-fondateurs souhaitaient préserver le caractère unique
de leur entreprise et assurer leur capacité de continuer à insuffler leur vision à long terme malgré la présence de nouveaux actionnaires, anonymes et changeants pour la plupart.

En vertu des impératifs qui leur étaient propres au moment de l’introduction en bourse de leur entreprise, certains entrepreneurs-fondateurs n’avaient pas la possibilité de lever les fonds requis sans diluer leur participation en-deçà du niveau nécessaire au maintien du contrôle, ou ne souhaitaient pas que ce risque se matérialise éventuellement. Ils ont alors fait appel à des mécanismes leur assurant le maintien du contrôle, notamment par l’utilisation de différentes classes d’actions (DCA) conférant à chacune des droits particuliers (multiples droits de vote pour l’une des classes, par exemple, ou des droits exclusifs de nomination de membres au conseil d’administration de façon à en maintenir une majorité).

Que le contrôle soit exercé par une participation directe ou par le recours à une structure DCA, ces sociétés sontfréquemment ciblées par des catégories d’investisseurs qui jugent que leur gouvernance est déficiente, du moins
selon les balises établies pour les entreprises ayant un actionnariat diffus (sans actionnaire de contrôle). Ces critiques sont souvent encore plus acerbes à l’endroit des sociétés DCA, en raison du contrôle exercé sans une participation économique à la hauteur des droits exclusifs de nomination ou encore du pourcentage des votes exercés. Plusieurs groupes de pression militent fortement pour l’élimination de toute forme de structure DCA.

Ces critiques sont-elles justifiées ? Est-ce que la performance économique, sociale et environnementale à long terme des sociétés canadiennes contrôlées inscrites en bourse vient sanctionner cette perception de « mauvaise gouvernance » ?

Ces sujets, âprement débattus sur les différentes tribunes en gouvernance, ont également fait l’objet de beaucoup de recherches dans les cercles académiques. Car si des voix s’élèvent contre le maintien du contrôle par des actionnaires fondateurs et leur famille, d’autres se font de plus en plus entendre afin de permettre à de nouvelles générations d’entrepreneurs d’utiliser des structures DCA. Plusieurs pays ont récemment revu leurs règles afin de les autoriser sur leurs principales places boursières, et d’autres – comme la France ou l’Allemagne – considèrent sérieusement le faire dans un proche avenir.

Notre étude vise dans un premier temps à situer le débat et à faire une synthèse des conclusions et résultats provenant des recherches les plus récentes. Ensuite, nous avons comparé la performance des sociétés canadiennes contrôlées appartenant à l’indice S&P/TSX à celle de sociétés canadiennes à actionnariat diffus issues du même groupe. Les comparaisons ont porté autant au niveau des scores ESG (performance Environnementale, Sociale et en termes de scores de Gouvernance) que du rendement total pour les actionnaires sur des périodes de 5 et 10 ans.

De façon générale, à la suite de la revue approfondie des études récentes, celles-ci tendent à confirmer :

  •  Un effet favorable du maintien du contrôle sur la capacité d’innovation des firmes et une meilleure qualité d’information financière (incluant l’utilité prédictive des données) divulguée par les sociétés contrôlées ;
  • Une plus importante longévité des firmes contrôlées comparativement à leurs homologues à une action-un vote ;
  • Un engagement plus prononcé des firmes contrôlées par des familles envers les critères sociaux et environnementaux, et que cet engagement était observable bien avant que l’investissement qualifié de « responsable » ne devienne une dimension incontournable et donc bien avant la popularité de l’acronyme « ESG » ;
  • Qu’il n’y a aucun appui péremptoire à l’hypothèse que les structures DCA nuisent à la valeur de l’entreprise ;
  • Que les sociétés canadiennes contrôlées, incluant celles avec une structure DCA, montrent des rendements totaux pour les actionnaires à long terme supérieurs à ceux de leurs homologues à actionnariat diffus ;
  • Que les actions des sociétés contrôlées tendent à afficher une volatilité moins grande, et offrent donc un niveau de risque inférieur pour les investisseurs ;
  • Que devant l’évidence de résultats financiers supérieurs pour les sociétés avec DCA, le débat s’est déplacé de plus en plus vers l’imposition de clauses crépusculaires visant à restreindre le maintien du contrôle à un horizon temporel prédéterminé. À cet égard, les discussions sont davantage
    de nature théorique et difficilement appuyées de façon empirique. Néanmoins, on retient de l’argumentaire que la volonté de maintien de contrôle repose d’abord et avant tout sur la capacité de donner et d’exécuter une vision à long terme à l’organisation, et que l’imposition d’une limite de temps – surtout rapprochée – vient s’opposer à cette qualité première de facto.

Notre propre étude comparative a également permis de dégager plusieurs constats :

• Au niveau de la performance de l’action, nos résultats appuient ceux des études recensées et démontrent que les sociétés contrôlées canadiennes du S&P/TSX affichent un rendement total pour les actionnaires à long terme supérieur à leurs homologues non contrôlées ;

• Après comparaison d’échantillons de sociétés appariées selon le système de classification des industries, les sociétés contrôlées canadiennes du S&P/TSX affichent un meilleur indice de risque ESG non géré que leurs pairs non contrôlés, et ce, malgré le fait que l’indice soit biaisé en défaveur des sociétés contrôlées ;

• On observe que, depuis plus d’une dizaine d’années, et plus particulièrement lors de l’année de référence 2021, les sociétés contrôlées canadiennes du S&P/TSX affichent un score environnemental « E » supérieur à celui des sociétés non contrôlées ;

• En aucun temps depuis 10 ans peut-on affirmer que les sociétés non contrôlées sont supérieures aux sociétés contrôlées en matière de rendement social selon le score « S » ;

• Sans véritable surprise, puisque le fait d’être contrôlé (particulièrement à l’aide d’une structure DCA) a une conséquence négative sur la mesure « G » des différents scores, les sociétés contrôlées sont évaluées – selon le catéchisme des agences de mesure de la gouvernance – comme étant moins bien gouvernées que leurs pairs à actionnariat diffus. L’effet net du score « G » sur les scores combinés ESG vient biaiser les résultats totaux et dépeint une image défavorable et injuste des sociétés contrôlées.

La revue exhaustive des études empiriques récentes et les résultats de notre analyse dans un contexte canadien sont éloquents : ils n’appuient pas les velléités des catégories d’investisseurs militant pour l’élimination des structures DCA, ni leur approche quasi dogmatique en la matière. Au contraire, les constats devraient sécuriser les investisseurs et les parties prenantes des sociétés contrôlées.

Malgré tous les avantages constatés, on considère plusieurs de ces sociétés contrôlées comme étant mal gouvernées selon les scores qui leur sont octroyés, et le fait de maintenir le contrôle par un mécanisme DCA, cette « tare », se reflète aussi dans leur score global ESG. Pourtant, il serait juste que la qualité de la gouvernance soit corrélée au rendement à long terme et à la bonne performance auprès des parties prenantes (volets E et S), ce qui n’est pas observé avec les scores actuels.

Il s’avère extrêmement difficile de mesurer le niveau de qualité de la gouvernance d’une société par un score obtenu en fonction d’une grille standardisée. Pour l’évaluer correctement, il faudrait être en mesure de capter toute la finesse de la dynamique d’un groupe, la compétence intrinsèque de chacun des membres du conseil, l’intelligence et la sagesse collective des administrateurs, leur compréhension commune du modèle d’affaires, leur capacité à faire preuve de courage au moment opportun, etc. On a élaboré des standards de « bonne gouvernance » qui peuvent se mesurer simplement, des paramètres édictés au fil des ans comme étant chacun des facteurs qui peuvent contribuer à une meilleure gouvernance mais qui ne se substituent pas à la gouvernance elle-même.

Nous croyons qu’il serait important de dissocier le facteur « G » des facteurs sociaux et environnementaux dans l’évaluation de la performance des sociétés contrôlées. La gouvernance doit être évaluée en fonction des
caractéristiques propres à chacune de ces entreprises et il existe possiblement autant de modèles de bonne gouvernance qu’il y a d’entreprises, mais chacune doit adopter la gouvernance qui lui convient et qui démontrera son efficacité, sa capacité à créer de la valeur à long terme. Le rendement total pour les actionnaires à long terme, tout comme la performance sociale et environnementale, sont des conséquences de l’efficacité du modèle de
gouvernance en place.

L’importance des sociétés familiales contrôlées pour l’économie canadienne est indéniable. Le fait qu’elles aient une longévité supérieure et des retombées importantes auprès de toutes les parties prenantes, qu’elles se montrent préoccupées par les questions environnementales et qu’elles investissent en ayant un horizon temporel qui s’étend parfois au-delà de plusieurs générations, constitue une qualité supplémentaire qui devrait inciter les gouvernements et autres autorités réglementaires à faire en sorte de conserver et encourager ce modèle.

Il ne faut pas se laisser distraire par le discours de tierces parties qui souhaitent imposer un délai à une vision, un terme aux valeurs qui ont permis à des sociétés de s’enraciner pleinement dans leurs communautés.

La rédaction des procès-verbaux : Considérations légales


 

Voici un article publié par Sonia K. Nijjar, Jenness E. Parker, Lauren N. Rosenello et Skadden, Arps, Slate de la firme Meagher & Flom sur le Forum du HLS, qui traite d’un sujet majeur, lequel ne fait pas souvent l’objet d’attention alors que de nombreuses questions se posent sur le sujet.

En effet, on minimise trop souvent l’importance d’un procès-verbal bien rédigé qui permet au conseil d’administration de bien jouer son rôle de représentation des intérêts des parties prenantes, dont les actionnaires.

Les règlementations en gouvernance sont plutôt discrètes sur la façon de rédiger les procès-verbaux des entreprises. La jurisprudence à cet égard est abondante dans les cas de poursuites judiciaires pour protéger les droits des actionnaires !

La rédaction des PV est une activité qui peut avoir des effets positifs ou négatifs sur un plan légal. L’article ci-dessous fait état des enjeux à cet égard.

Bonne lecture !

 

La vraie façon de rédiger un procès-verbal aujourd'hui | Secrétaire-inc

Takeaways

  • Boards should see minutes as a way to tell how they worked to fulfill their duties to stockholders, capturing a board’s deliberations and the reasoning behind its decisions.
  • Properly documenting the board’s deliberative process takes on heightened significance for “mission-critical matters” such as major deals, oversight of monoline businesses or significant revenue flows, or catastrophic events, where board actions may be the subject of stockholder litigation.
  • Well-drafted board minutes can help contain the scope of stockholders’ books and records requests and make it easier to win early dismissal of lawsuits.
  • To protect against claims that a company’s disclosures were misleading, a company’s public statements and filings should be consistent with the board minutes.

Board minutes are an essential part of a company’s internal record keeping. But they are more than a routine, formal exercise. They also play a pivotal role in stockholder litigation. As a contemporaneous record, plaintiff stockholders will scrutinize minutes when evaluating and pursuing claims against directors and officers, and judges will consider minutes at the pleadings stage. Boards should see minutes as a way to tell how they worked in fulfilling their duties to stockholders.

Minutes of important board meetings, and proxy statements describing them, have become increasingly important in recent years as a result of developments in Delaware law. Courts have sometimes granted stockholders early access to documents beyond formal board materials, such as directors’ emails and text messages, where they found that minutes offered too sparse an account of a board’s consideration of a particular issue. In addition, if a formal board record is lacking, stockholders may argue that a board breached its duty to oversee and address risk.

By contrast, a sufficiently clear record in the minutes of directors’ deliberations and the process by which they reached decisions can position the company to head off intrusive probes of internal records at the outset, help prevent complaints from being filed, and potentially aid in winning early dismissal of suits.

 

Logistical Drafting Considerations

There is no one-size-fits-all approach to drafting board minutes, but they typically reflect, among other things, formal matters such as the date that the board meeting was noticed or, alternatively, if notice was waived by all directors; who attended the meeting (including executives, employees and any outside advisers) and how they participated (in person or remotely); as well as when the meeting commenced and adjourned. If the board received presentations, those may also be attached as exhibits.

In some instances, where individual directors make comments or raise questions, good practice is to identify the issues considered, inputs the board received and other details about the discussion generally without a need to detail specific questions or name individual directors.

Potential Stockholder Challenges

When drafting board minutes, keep in mind that there can be several types of stockholder challenges to board action or inaction of a Delaware public company. The board should expect such challenges, whether in the form of a books and records demand, derivative or direct litigation, or demands that the company pursue litigation. Here are the most common issues raised by stockholders, and how good minutes can be helpful in defending against legal challenges:

Delegation to a committee. If a board determines that a committee would be helpful to oversee an investigation or transaction, whether to avoid a potential conflict or allow for more agility and speed with a smaller group, it is best to document the decision with board resolutions. The minutes may (i) explain why the board concluded it was in the company’s best interest to enlist a committee and (ii) specify the committee’s mandate and scope of authority. For example, it may be helpful to explain whether the committee has full authority (like a special committee weighing a transaction where there is a potential conflict of interest for other board members), or whether the committee will make a recommendation for full board approval.

Oversight. When the board is deliberating about significant issues, including those that Delaware courts have deemed “mission-critical,” the board’s process and actions should be adequately captured to reflect its oversight. This may include documenting how it received and considered the input of management and advisers, as well as a discussion of a board’s consideration and decision regarding risks and mitigation of those.

Director independence and conflicts. Directors and officers may complete questionnaires on a regular basis as well as in a specific context, like a transaction, to evaluate their independence and to identify potential conflicts of interest. Certain disclosures, particularly ones that might pose a potential conflict, may warrant board-level consideration. The minutes should reflect this deliberation and subsequent determinations.

Good, thorough minutes are even more important today than in the past because of the proliferation of stockholder books and records requests.

Other conflicts. Where there is a potential conflict regarding any matter, the board should weigh whether that should be disclosed and document that consideration in the minutes. For example, stockholders commonly challenge a board’s choice of advisers — particularly financial firms assisting on transactions. A board may require disclosure of potential adviser conflicts, and consider those before retaining an adviser. It may also insist on updates if any additional material conflicts arise. It is important that the minutes clearly document this process and any conflict considerations. Not all conflicts are fatal, particularly if understood and appropriately considered and addressed (if appropriate), but failing to identify and consider conflicts can be problematic.

Deal processes. Just as it is important to document the board’s deliberation regarding significant issues, it is critical to make a record of the board’s process when selling the company. Boards should receive regular updates about the sale process, including any important communications (or lack thereof) with bidders. For a significant M&A transaction, the record should reflect a thorough, board-centric process, even if — as is generally perfectly appropriate and typical — the CEO is leading negotiations.

It is common to use code names when discussing M&A deal counterparties even in the official record, as other parties may end up seeing the board’s minutes.

Disclosure claims. The company’s public statements and publicly filed documents should reflect what actually happened at the board. Accordingly, when preparing public filings, care should be given to reviewing board materials and minutes. If there are discrepancies, stockholders may allege that the company’s disclosures were incomplete or misleading.

Potential disclosure violations take on heightened significance in the deal context. If a stockholder successfully alleges a disclosure deficiency, directors may not benefit from the protections of two important Delaware decisions, Corwin and MFW. Under Corwin, a transaction approved by fully informed, uncoerced stockholders, not involving a controlling stockholder, is protected by the business judgment rule, which shields directors from liability if they acted in good faith and followed proper procedures.

MFW and later cases that follow also apply the business judgment rule to controlling-stockholder “squeeze out” mergers if certain conditions are satisfied. One condition is that there was a fully informed vote of minority stockholders. Accordingly, when drafting the disclosure document, the board minutes should be used as a guide so that the documents track each other and accurately reflect the board’s deliberations and actions so the board may receive the benefits of Corwin and MFW in any litigation down the road.

Protecting Privilege

It is important to ensure that the fact that legal advice was given to the board is reflected in the minutes at least at a high level, but boards need to guard against waiving the attorney-client privilege. Although privileged information is typically redacted when minutes are produced to plaintiff stockholders, legal advice may at some point become an issue in litigation if the board asserts that it relied on that advice.

To protect privileged information from disclosure, minutes reflecting legal advice should be characterized as an outside attorney or in-house counsel “providing legal advice” about a matter as opposed to “advising the board” to take a certain action, because advice from a lawyer that is not legal in substance — say, advice on business strategy — potentially may not be protected by the privilege. See our April 13, 2021, Informed Board article “Just Between You and Us: The 10 Most Common Client Misconceptions About the Attorney-Client Privilege.”

The Increase in Books and Records Demands Makes Board Minutes All the More Important

Good, thorough minutes are even more important today than in the past because of the proliferation of stockholder books and records requests. Several developments in Delaware law have given stockholders and their counsel strong incentives to make those demands before taking other legal steps. As a result, many Delaware companies find themselves deluged with those requests, which can furnish stockholders with ammunition for litigation. See our June 1, 2022, Informed Board article, “In the Name of the Company: When Stockholders Interfere in the Boardroom.”

By observing careful practices regarding minutes, companies can make it more likely that the courts will not allow access to books and records beyond formal documents such as minutes, thereby limiting the material that can be used in complaints. Moreover, at the pleadings stage, companies may point the court to portions of minutes to rebut the inference given to plaintiffs’ allegations, or to demonstrate “cherry picking” or inaccuracies in the plaintiffs’ characterizations that create a false picture of the board’s process.

In sum, prepared carefully, minutes tell the board’s side of the story to stockholders and courts.

La direction de Twitter a poussé ses parties prenantes sous le bus dans ses transactions avec Musk


 

Voici un cas d’actualité présenté par Lucian A. Bebchuk, Kobi Kastiel et Anna Toniolo* (Harvard Law School) sur le Forum du HLS on Corporate Governance.

L’analyse fait clairement ressortir que, dans le cas de la transaction d’achat de Twitter par Elon Musk, les dirigeants de l’entreprise n’ont accordé aucune importance aux parties prenantes, notamment aux employés (qui ont été poussés sous le bus).

Les auteurs constatent « que l’on ne peut pas s’attendre à ce que les dirigeants d’entreprise qui vendent une entreprise veillent aux intérêts de leurs parties prenantes ».

La direction de Twitter a choisi d’allouer le produit de la vente de l’entreprise entièrement aux actionnaires, et à elle-même !

De plus, l’analyse du cas Twitter montre que l’on remet facilement en question l’importance des beaux énoncés concernant la mission, le but et les valeurs fondamentales de l’entreprise, lorsque le gain est très important .

J’ai corrigé la version traduite par Google, et le résultat final me semble très acceptable.

Vos commentaires sont bienvenus. Bebchuk ne fait pas toujours l’unanimité…

Bonne lecture et bonnes réflexions.

How Twitter Pushed its Stakeholders under the (Musk) Bus

 

Elon Musk a pris le contrôle de Twitter et limogé sa direction - CNET France

 

Notre essai à paraître, « Comment Twitter a poussé ses parties prenantes sous le bus », propose une étude de cas sur l’acquisition de Twitter par Elon Musk. Compte tenu du fort intérêt actuel pour cette acquisition, nous discutons, dans cet article et les suivants, de certaines de nos conclusions et de leurs implications pour les débats actuels sur le capitalisme des parties prenantes.

Une bataille épique a été menée cette année entre Twitter et Elon Musk après que Musk ait tenté de se retirer de l’accord d’acquisition entre eux. Twitter a gagné, et ses actionnaires et dirigeants ont ainsi obtenu d’importants gains financiers.

Alors que la bataille entre ces deux parties a attiré une couverture médiatique massive, nous pensons qu’une attention insuffisante a été accordée à un autre groupe qui devait être affecté par l’accord — les « parties prenantes » de Twitter (c’est-à-dire les composantes non-actionnaires). En particulier, notre analyse conclut que, malgré leur rhétorique des parties prenantes au fil des ans, lors de la négociation de l’accord, les dirigeants de Twitter ont choisi de pousser leurs parties prenantes sous le bus de Musk.

Ce n’est pas parce que la direction de Twitter a été bousculés par Musk. Au contraire, les dirigeants de Twitter ont obtenu de Musk, (et ils se sont battus pour le conserver), d’importants gains monétaires pour les actionnaires (une prime d’environ 10 milliards de dollars), ainsi que pour les dirigeants eux-mêmes (qui, ensemble, ont réalisé un gain de plus d’un milliard de dollars grâce à l’accord). En se concentrant exclusivement sur ces gains monétaires cependant, la direction de Twitter a choisi de ne pas tenir compte des intérêts des parties prenantes.

C’est ainsi que les employés de Twitter, que l’entreprise appelait affectueusement « tweeps » ont été poussés sous le bus, alors que Twitter avait, depuis longtemps, promis de prendre soin d’eux. Les dirigeants de Twitter n’ont pas tenté d’évoquer avec Musk, comment les tweeps seraient affectés par l’accord négocié.

Au lieu de cela, les dirigeants de Twitter ont choisi d’allouer le très important excédent monétaire produit par l’accord entièrement aux actionnaires et aux dirigeants eux-mêmes. Ils ont choisi de n’utiliser aucune partie de cet excédent pour fournir un coussin monétaire aux tweeps qui perdraient leurs positions après la transaction. Notons, qu’allouer, ne serait-ce que 2 % des gains monétaires (qui sont finalement allés aux actionnaires et aux dirigeants d’entreprise), à la protection des employés, auraient permis de fournir un coussin monétaire substantiel aux quelque 50 % des tweeps qui ont été licenciés peu de temps après la conclusion de l’accord.

Notamment, les dirigeants de Twitter n’ont même pas mené de négociations ou de discussions avec Musk pour s’assurer que les tweeps apprendraient leurs licenciements de manière humaine, plutôt que de le déduire après avoir été déconnectés au milieu de la nuit, ou que le travail à distance, l’environnement auquel Twitter avait exprimé un engagement, serait graduel plutôt que soudain.

Les déclarations de mission et les valeurs fondamentales auxquelles les dirigeants de Twitter avaient, depuis longtemps, prêté allégeance, ont également été poussées sous le bus. Lors de la négociation des conditions de la transaction, les dirigeants de Twitter n’ont négocié avec Musk aucune contrainte ni même aucun engagement souple concernant le maintien de ces engagements après la transaction. Les dirigeants de Twitter ne semblent même pas avoir eu de discussions avec Musk concernant ses plans à cet égard, car ils ont déclaré aux employés qu’ils n’avaient aucune information sur ces plans. Les dirigeants de Twitter ont choisi de procéder de cette manière malgré les avertissements et les indications selon lesquels Musk pourrait bien abandonner tout ou partie les solides engagements de Twitter avant l’accord.

Twitter avait depuis longtemps communiqué son engagement à avoir une mission et pas seulement un objectif de profit, et à faire progresser des valeurs telles que l’intégrité civique, l’exclusion des discours de haine, le respect des droits de l’homme, et même le soutien à l’Ukraine dans sa défense contre l’agression. Mais ces engagements semblent avoir reçu peu d’attention ou de poids de la part des dirigeants de Twitter lorsqu’ils ont négocié l’accord Musk.

Au-delà de l’affaire Twitter, nos conclusions ont des implications pour le débat houleux en cours sur la gouvernance des parties prenantes. À cet égard, nos conclusions soutiennent l’idée que la rhétorique des parties prenantes des chefs d’entreprise est principalement pour le spectacle et n’est généralement pas accompagnée de choix réels (par exemple, Bebchuk et Tallarita (2020).

Nos résultats suggèrent en outre que l’on ne peut pas s’attendre à ce que les dirigeants d’entreprise qui vendent leur entreprise veillent aux intérêts des parties prenantes. Ceci est contraire aux prédictions des promesses implicites et des théories de production en équipe de Shleifer-Summers (1988)Coffee (1988) et Blair-Stout (1999), qui ont longtemps été utilisées comme argument pour donner aux dirigeants d’entreprise un droit de veto sur les acquisitions d’entreprises afin qu’ils puissent utiliser ce pouvoir pour défendre les intérêts des parties prenantes.

Enfin, notre étude de cas remet en question le point de vue qui attache de l’importance à l’adoption par les entreprises d’énoncés concernant la mission, le but et les valeurs fondamentales (par exemple, Eccles & Youmans (2016) et Mayer (2019) ). Twitter a été « long » sur de telles déclarations pendant un certain temps, mais décidément « court » sur l’une d’entre elles.

Notre analyse de l’étude de cas sur Twitter est cohérente avec les conclusions de travaux empiriques antérieurs co-écrits par deux d’entre nous. Ce travail empirique a montré que les chefs d’entreprise se sont concentrés sur les intérêts des actionnaires et des hauts dirigeants eux-mêmes, et qu’ils n’ont pas réussi à négocier la protection des parties prenantes dans deux grands échantillons de transactions :

(i) les acquisitions d’entreprises publiques pendant la période COVID au cours de laquelle la rhétorique concernant les parties prenantes était largement employée par les chefs d’entreprise ( Bebchuk, Kastiel et Tallarita (2022) ) ;

(ii) les acquisitions régies par les statuts de la constitution des États autorisant et obligeant les dirigeants vendant leur entreprise à prendre en compte les intérêts des parties prenantes ( Bebchuk, Kastiel et Tallarita (2021)). En complément de ces études, notre étude de cas Twitter actuelle fournit un exemple particulièrement frappant et puissant de la façon dont les dirigeants d’entreprise ignorent en fait les parties prenantes (et toutes rhétoriques antérieures favorable aux parties prenantes) lors de la négociation d’une vente de leur entreprise.


*Lucian Bebchuk  est titulaire de la chaire James Barr Ames de droit, d’économie et de finance et directeur du programme sur la gouvernance d’entreprise à la faculté de droit de Harvard ; Kobi Kastiel  est professeur agrégé de droit à l’Université de Tel-Aviv et chercheur principal du programme de la faculté de droit de Harvard sur la gouvernance d’entreprise ; et Anna Toniolo est boursière postdoctorale au Programme sur la gouvernance d’entreprise de la Harvard Law School.

La parité et la diversité au sein des conseils d’administration | IGOPP


 

Voici le sommaire de la 12e prise de position adoptée par l’Institut sur la gouvernance d’organisation privées et publiques (IGOPP). Je publie ce texte avec l’approbation de ce dernier.

« La présente prise de position considère différents aspects du concept de « diversité », lesquels auront permis de formuler des recommandations qui, nous le souhaitons, pourront apporter une contribution utile à la réflexion sur cet enjeu ».

Le Groupe de travail, présidé par Guylaine Saucier, était composé de :

Louis Audet
Mary-Ann Bell
François Dauphin
Robert Greenhill
Isabelle Marcoux

Bonne lecture !

 

IGOPP

 

En Amérique du Nord, les questions de diversité et d’inclusion se sont manifestées avec insistance au cours des dernières années, et les enjeux de représentativité au sein des conseils d’administration se sont étendus bien au-delà des questions de genre. Le Canada, faisant office de pionnier en la matière, a intégré dans la Loi canadienne sur les sociétés par actions des exigences de divulgation ciblant quatre groupes « désignés ». Depuis 2020, en sus de la représentation féminine, les sociétés d’incorporation fédérale inscrites en bourse doivent désormais divulguer des renseignements au sujet des personnes issues de minorités visibles, de communautés autochtones et des personnes handicapées parmi les membres de leur conseil d’administration et de leur haute direction.

Les premières statistiques recueillies à la suite de cette nouvelle règlementation ont montré une nette sous-représentation de certains de ces groupes au sein des conseils d’administration comparativement à leur présence dans la population active, et que si la représentation féminine a presque doublé depuis 10 ans, la parité est encore loin d’être atteinte.

Les pressions exercées sur les conseils d’administration pour que ceux-ci affichent une diversité accrue sont multiples. Des catégories d’investisseurs institutionnels manifestent ouvertement à cet égard, utilisant leur poids actionnarial pour exiger des changements.

Avec l’évolution rapide de la sensibilité pour ces questions, il est à prévoir que le ton durcira non seulement par ces catégories d’investisseurs, mais aussi dans les lignes directrices émises par les agences de conseil en vote par procuration, et que des recommandations d’abstention ou de vote
« contre » certains administrateurs ou certains membres de comité seront émises de façon plus systématique dans l’avenir pour des questions reliées à la diversité ou la représentativité de certaines minorités — jugée insuffisante — au sein des conseils.

Le concept de diversité a cependant plusieurs définitions, et la littérature qui aborde ce concept a des racines puisant dans les fondements théoriques de nombreuses disciplines. Dans le cadre de notre analyse, nous distinguons trois formes de diversité : 1° la diversité d’attributs sociaux et personnels, 2° la diversité de compétences et perspectives, et 3° la diversité de valeurs. Si la diversité est aujourd’hui considérée comme une caractéristique essentielle en matière de composition des conseils d’administration, c’est d’abord sous la prémisse que la diversité permet d’éviter le risque d’un processus de prise de décision vicié par une trop forte homogénéité, une trop grande complaisance.

La véritable forme de diversité à laquelle on fait habituellement référence à cet égard est la diversité de « compétences et perspectives ». Non seulement cette forme de diversité est-elle souhaitable, mais elle devrait constituer l’assise principale sur laquelle devrait reposer toute la planification en matière de recrutement et de sélection des administrateurs.

Par ailleurs, on cherchera à maintenir une haute cohésion de valeurs et d’idéologies au sein du conseil d’administration et de la haute direction. Donc, la diversité qui peut prendre place au conseil d’administration doit s’effectuer avec des personnes qui ont des valeurs compatibles.

La diversité d’attributs sociaux et personnels peut contribuer aux autres formes de diversité, mais apporte aussi des avantages qui lui sont propres, notamment en facilitant le recrutement, en favorisant la rétention des employés, en participant à la création d’un climat favorable à l’inclusion, sans compter sur la légitimité sociale qu’elle confère.

La sélection de nouveaux administrateurs repose ainsi sur l’évaluation de critères multivariés, et chaque nomination doit être réfléchie en soupesant ses effets sur les différentes dimensions de la diversité du conseil dans son ensemble.

À la lumière de notre analyse, nous formulons donc les sept recommandations suivantes :

1. Les conseils d’administration devraient promouvoir la diversité à tous les niveaux de l’organisation. La diversité et l’inclusion ne doivent pas être des questions réservées à la simple composition du conseil d’administration, mais bien constituer de véritables préoccupations véhiculées et vécues à
tous les niveaux de l’organisation ;

2. Il faudrait faire appel au concept de « parité » pour qualifier la représentation des femmes sur les conseils. Le risque élevé d’amalgame entre la diversité de genre et les autres formes de diversité invite à l’utilisation d’un lexique plus précis. Les femmes, qui composent la moitié de la population, ne constituent pas un groupe minoritaire et leur présence devrait donc statistiquement tendre à représenter la moitié des administrateurs de l’ensemble des conseils d’administration des sociétés
cotées ;

3. Les conseils d’administration devraient établir le profil de diversité du conseil pertinent pour leur organisation. Un conseil d’administration est composé en moyenne de 11 à 13 membres, ce qui rend impossible la représentativité systématique de toutes les formes de minorités qui composent la population active. La diversité pertinente doit s’inscrire dans une logique de soutien à la stratégie de l’entreprise, et la présence de cette diversité sera favorable à une meilleure prise en compte des intérêts à long terme de l’ensemble des parties prenantes de la société ;

4. L’atteinte des objectifs en matière de diversité devrait se faire en respectant le rythme d’intégration de nouveaux administrateurs propre à chaque société. Ceci peut se faire à l’aide de mesures incitatives (par des exigences de divulgation, par exemple), mais nous croyons qu’il faut éviter le recours à des interventions législatives ou à des mesures coercitives (par l’imposition de quotas, par exemple) ;

5. On ne devrait pas imposer des mesures universelles pour l’établissement de mécanismes de renouvellement accéléré des conseils. Ainsi, on ne devrait pas imposer un âge de retraite obligatoire pour les administrateurs ni une limite de terme. Une telle approche n’est pas souhaitable, car les caractéristiques qui définissent la qualité de la contribution d’un administrateur au sein d’un conseil sont variables ;

6. Chaque conseil devrait s’interroger et statuer sur sa taille optimale avant d’ajouter de nouveaux membres ;

7. Le conseil devrait rendre compte annuellement de ses efforts en matière de parité, de diversité et de renouvellement.

Les avantages de la diversité sont manifestes, et vont bien au-delà de la simple volonté pour les sociétés de conserver une forme de légitimité sociale en se conformant aux attentes minimales. Toutefois, pour que ces avantages se matérialisent pleinement, la question de la diversité doit être abordée avec réflexion; elle se doit d’être contextualisée.

La présente prise de position formule un ensemble de recommandations qui visent à aider les conseils à aborder cette question de façon pragmatique, en cohérence avec la stratégie actuelle et future de leur organisation. On y retrouve implicitement des recommandations aux gouvernements et autorités règlementaires, les invitant à éviter toute forme d’intervention qui contraindrait les conseils à modifier leur composition à court terme sans tenir compte de leurs particularités.

La diversité doit recevoir une pleine adhésion, s’instituer comme une conviction. C’est ainsi que s’établira un réel climat d’inclusion à tous les niveaux de la société.

Bilan trimestriel de l’activisme actionnarial – T3 2022


 

Voici un texte publié par Mary Ann Deignan, Rich Thomas, et Christopher Couvelier de la firme Lazard sur le site du HBLS on Corporate Governance.

Cet article  montre les principaux changements observés eu égard à l’activisme international au troisième trimestre de 2022.

Je vous invite à lire la version française de l’article, publiée sur le Forum de Harvard Law School on Corporate Governance, effectuée par Google, que j’ai corrigé.

Bonne lecture !

Quarterly Review of Shareholder Activism – Q3 2022

Que recherchent les investisseurs activistes?

1. Poursuite d’une activité robuste alimentée par un troisième trimestre solide

44 nouvelles campagnes lancées au T3, une augmentation de 52 % par rapport au T3 de l’année précédente, marquant le troisième trimestre consécutif d’augmentation significative de l’activité d’une année sur l’autre

Nombre total de campagnes depuis le début de l’année (171) en hausse de 39 % par rapport à la même période l’an dernier, approchant déjà le total pour l’année 2021 (173)

Poursuivant une tendance au premier semestre, les entreprises technologiques ont été les plus fréquemment ciblées au troisième trimestre, représentant 22 % des nouvelles cibles activistes

Avec 5 nouvelles campagnes au troisième trimestre, Elliott a continué d’accélérer son rythme de 2022 et a maintenant lancé 11 campagnes depuis le début de l’année (plus du double des prochains noms les plus prolifiques)

2. Cibles américaines en ligne de mire

Les cibles nord-américaines représentaient les deux tiers de toutes les nouvelles campagnes au troisième trimestre, au-dessus des niveaux du premier semestre (55 %) et de la moyenne 2018-2021 (59 %)

L’activité du troisième trimestre aux États-Unis (28 nouvelles campagnes) a représenté une augmentation de 133 % par rapport au troisième trimestre de l’année précédente (12 nouvelles campagnes)

L’activité aux États-Unis depuis le début de l’année (96 nouvelles campagnes) a augmenté de 43 % d’une année sur l’autre et correspond désormais au total de l’année 2021

Les récentes campagnes américaines ont ciblé les leaders de l’industrie des méga-capitalisations (dont Cardinal Health, Chevron, Disney, Pinterest et PayPal)

3. L’activité européenne approche déjà du niveau record de l’exercice 2021

Malgré un troisième trimestre relativement lent (10 nouvelles campagnes), l’activité depuis le début de l’année en Europe (45 campagnes) est en hausse de 32 % d’une année sur l’autre et approche déjà le total de l’année 2021 (50 campagnes)

Alors que les entreprises britanniques sont restées les cibles les plus fréquentes de l’Europe (40 % des campagnes européennes depuis le début de l’année, en ligne avec les niveaux moyens pluriannuels), la France a enregistré une part d’activité supérieure à celle des périodes précédentes (18 % des campagnes européennes, contre 12 % de 2019 à 2021)

4. Les revendications de la campagne reflètent l’approche « faites-le ou vendez-le »

Les objectifs liés aux fusions et acquisitions figuraient dans 48 % des campagnes du T3, un rebond significatif par rapport à 39 % au T2 et 32 % au T1

Les demandes « Vendre l’entreprise » depuis le début de l’année (26 campagnes) dépassent déjà les totaux annuels pour 2021 (20) et 2020 (14)

Les demandes autour de la stratégie/des opérations ont continué d’augmenter en fréquence au cours des derniers trimestres (21 % des campagnes du T3, contre 20 % au T2 et 14 % au T1) et restent supérieures à la moyenne 2018 – 2021 (15 %)

5. Thèmes émergents à surveiller

Avec la règle de procuration universelle maintenant en vigueur et une partie importante des fenêtres de nomination des sociétés ouvertes pour la saison AGA 2023 se déroulant au quatrième et au premier trimestre, les campagnes axées sur la représentation au conseil d’administration sont sur le point de se multiplier

Le rôle de l’ESG et l’attention que les entreprises et les investisseurs devraient lui accorder commencent à être remis en question

Le nouvel activiste Strive Asset Management s’en prend à plusieurs sociétés de premier ordre pour avoir donné la priorité aux problèmes E&S au détriment de la création de valeur pour les actionnaires

Le Texas a interdit à certaines entreprises et fonds (dont BlackRock) de faire des affaires dans l’État en raison de pratiques ESG en contradiction avec le secteur énergétique de l’État

Activité de campagne mondiale

L’activité YTD 2022 approche déjà les niveaux de l’année 2020 et 2021 ; alors que les tendances régionales depuis le début de l’année sont conformes aux dernières années, le troisième trimestre a vu une activité nord-américaine accrue

 

Les leçons à tirer des gains des femmes dans la composition des conseils d’administration


Je vous invite à lire la courte version française de l’article, effectuée par Google, que j’ai corrigée. Ce travail de correction est certainement encore perfectible, mais le résultat est très satisfaisant.
Bonne lecture !

La semaine dernière,  un juge californien a invalidé une loi adoptée en 2018  exigeant que les sociétés cotées en bourse dont le siège est dans l’État aient au moins une femme dans leur conseil d’administration. Cette décision fait suite  à une décision similaire d’un juge le mois dernier , jugeant inconstitutionnelle une loi d’État adoptée en 2020, obligeant les entreprises à respecter un quota d’au moins un administrateur de conseil d’administration racialement, ethniquement ou autrement diversifié. Alors que la décision est un coup dur pour les défenseurs de la diversité des genres du conseil d’administration et que l’État devrait faire appel, l’impact de la loi est déjà clair. L’analyse de la croissance des conseils d’administration des  entreprises basées en Californie en 2021 a révélé que plus de la moitié des nouveaux membres du conseil d’administration cette année-là étaient des femmes.

Cette tendance s’est poursuivie au-delà des limites des entreprises dont le siège est en Californie. L’analyse JUST a révélé que la diversité moyenne des genres dans les conseils d’administration du Russell 1000 est passée de 23,8 % à 28,2 % entre 2019 et 2021. Lorsque nous décomposons ces gains par seuils de représentation de 30 %, 40 % et 50 %, nous constatons des gains dans chacun de ces groupes. (Figure 1).

Figure 1 : Pourcentage d’entreprises dont la diversité des genres au sein du conseil d’administration est égale ou supérieure à 30 %, 40 % et 50 %.

En 2021, près de la moitié (44 %) des conseils d’administration analysés par JUST Capital étaient composés d’au moins 30 % de femmes. Beaucoup moins de conseils étaient composés de 40 % ou plus de femmes et seulement 3 % des conseils atteignaient la parité ou comptaient plus de 50 % de femmes. De plus, de 2019 à 2021, le pourcentage d’entreprises dans les trois seuils a augmenté de plus de 50 %. Néanmoins, la diversité des conseils d’administration a encore un long chemin à parcourir pour atteindre la parité hommes-femmes, comme en témoigne la lenteur de la croissance du seuil le plus élevé de 50 % ou plus.

Bien que l’analyse de JUST Capital montre que la diversité des genres au sein du conseil d’administration a considérablement augmenté à chacun des trois seuils en seulement deux ans, cela n’a pas toujours été le cas. Les progrès en matière de diversité des genres ont été auparavant lents, voire glacials. Entre 2012 et 2017, la part des administrateurs femmes dans le S&P 500 n’a augmenté que de cinq points de pourcentage ( de 17 % à 22 % ). Mais au cours des cinq dernières années, le  pourcentage de femmes siégeant au conseil d’administration du S&P 500 a augmenté de neuf points de pourcentage  (de 22 % à 31 %),  presque le double  de l’augmentation de 2012 à 2017.

Le succès du mouvement pour la diversité des genres au sein des conseils d’administration contient des leçons clés – concernant la pression des investisseurs, la formation de coalitions et des demandes spécifiques – qui peuvent aider à accélérer les efforts plus larges en faveur de la diversité des entreprises.

La pression des investisseurs peut conduire à de vrais résultats

La pression effective des actionnaires est un facteur majeur de l’augmentation de la diversité des genres au sein des conseils d’administration. À partir de 2017, les campagnes des «trois grands» investisseurs institutionnels, BlackRock, State Street et Vanguard, ont utilisé leur influence pour faire progresser la diversité des sexes au sein des conseils d’administration avec diverses politiques de vote qui ont défié les conseils d’administration qui n’étaient pas suffisamment diversifiés. Les recherches indiquent  que cela a conduit les entreprises à élargir leurs efforts de recrutement de candidates, à élire davantage de femmes aux conseils d’administration et aux postes de présidentes des comités du conseil d’administration.

Pour compléter la pression des investisseurs institutionnels en faveur de la diversité  du conseil d’administration, la règle de divulgation du conseil d’administration du Nasdaq , qui a été approuvée par la SEC en août 2021, marque une approche différente pour favoriser la diversité du conseil d’administration. La règle du Nasdaq encourage la diversité des conseils d’administration en demandant aux entreprises de divulguer publiquement les données démographiques de leur conseil d’administration et, pour les entreprises qui n’ont pas au moins deux administrateurs différents (divers définis comme des femmes, appartenant à un groupe racial ou ethnique sous-représenté, ou comme LGBTQ+), d’expliquer pourquoi cela reste le cas. La règle du Nasdaq pousse à une plus grande transparence et des rapports normalisés donnent aux investisseurs un meilleur aperçu des divers indicateurs démographiques des administrateurs.

Et cette approche a connu du succès. S’exprimant lors d’un événement JUST Capital , la vice-présidente principale du Nasdaq et responsable des inscriptions et des revenus aux États-Unis, Karen Snow, a déclaré qu’avant la règle, environ 25% du S&P 500 ont divulgué les données démographiques de leur conseil d’administration et maintenant plus de 60% l’ont divulgué. « Il s’agit de prendre le leadership maintenant et de présenter des lignes directrices qui pourraient aider les investisseurs et les autres membres de la communauté à comprendre ce que vous faites », a-t-elle déclaré. Pour Snow, l’accent mis par la règle sur la divulgation, plutôt que sur les quotas, a permis de voir les progrès des entreprises. Une approche similaire à d’autres formes de divulgation de la diversité,  y compris la démographie de la main-d’œuvre , pourrait aider à accélérer la transparence des entreprises américaines.

Le plaidoyer par le biais de réseaux et de coalitions est essentiel à l’engagement des investisseurs

Alors que l’engagement des investisseurs a incité les entreprises à nommer plus de femmes à leurs conseils d’administration, les organisations de défense des droits ont joué un rôle crucial dans l’élévation de la diversité des genres au sein des conseils d’administration comme une priorité pour les investisseurs. Le  30% Club , né au Royaume-Uni en 2010 et étendu à l’international, et la  30 Percent Coalition , fondée aux États-Unis en 2011, ont développé avec succès des coalitions entre investisseurs, membres de conseils d’administration et experts en gouvernance d’entreprise pour défendre la diversité des genres au sein des conseils d’administration.

De plus, les organisations de réseautage dirigées par des femmes ont joué un rôle en aidant les entreprises à trouver de nouveaux talents à la direction du conseil d’administration. Les partenaires du Réseau de la diversité d’Equilar  , le consortium de l’organisation pour faire progresser la diversité au sein des conseils d’administration, contiennent plusieurs groupes de réseautage dirigés par des femmes, dont certains sont régionaux ou universitaires. Women Corporate Directors  et  Athena Alliance , deux autres partenaires du réseau de la diversité, offrent une formation et un encadrement aux femmes ainsi que des opportunités de réseautage pour augmenter leur probabilité de se joindre à un conseil d’administration.

Des demandes spécifiques mènent à des résultats spécifiques

Une autre leçon qui peut être appliquée aux pressions en faveur de la diversité des entreprises est que les objectifs sont utiles, mais que des objectifs moins ambitieux conduiront à des réalisations moins ambitieuses. Dans la plupart des efforts de plaidoyer entourant la diversité des genres au sein des conseils d’administration,  le chiffre de 30 % est cité comme seuil cible  et a même été utilisé pour marquer certaines organisations, comme on le voit dans le 30 % Club et la 30 Percent Coalition. Certains considèrent que 30 % représentent la  masse critique  où les groupes sous-représentés peuvent avoir un impact sur la dynamique des conseils d’administration et ce pourcentage a été adopté par les investisseurs comme le pourcentage recommandé de diversité des genres au sein d’un conseil.

D’autres groupes ont évolué pour fixer des objectifs plus ambitieux en matière de diversité des sexes au sein des conseils d’administration, et ils soutiennent que le pourcentage de femmes dans les conseils d’administration des entreprises devrait être plus représentatif de la population. 50/50 Women on Boards , par exemple, plaide désormais pour la parité hommes-femmes dans les conseils d’administration des sociétés du Russell 3000 après avoir atteint son objectif initial de 20 % de femmes administratrices en 2020. , mais les données de JUST Capital montrent que les entreprises du JUST 100 sont plus de deux fois plus susceptibles d’avoir une diversité de genre au sein du conseil d’administration de 50 % ou plus que leurs pairs du Russell 1000. Cependant, comme le montre la figure 1 ci-dessus, les entreprises qui présentent ce niveau de mixité au sein de leur conseil d’administration restent très rares.

En plus de fixer des objectifs, il est également important de prendre en compte les poussées intersectionnelles en faveur de la diversité. Il est important de noter que toutes les femmes n’ont pas bénéficié de la même manière des pressions en faveur de la diversité des genres au sein des conseils d’administration. En 2020,  les femmes blanches occupaient trois fois plus de sièges au conseil d’administration que les femmes de couleur dans le Fortune 500. Comme indiqué dans une  analyse JUST de 2021 sur la diversité du conseil d’administration, les groupes de défense de la représentation raciale/ethnique peuvent contribuer à ces efforts. Mais parce que les mouvements historiques autour de la mixité des conseils d’administration n’ont pas pris en compte la race dès le départ, leurs efforts ont conduit à des avancées inégales pour les femmes. L’élévation de la diversité raciale / ethnique des conseils d’administration des entreprises est cruciale pour étendre la diversité des conseils d’administration au-delà du genre et garantir que les femmes blanches ne sont pas les principales bénéficiaires des poussées de diversité.

Et bien que nous continuions à voir une augmentation de la diversité des sexes au sein des conseils d’administration, il est important de ne pas confondre ce succès avec les progrès des femmes dans l’ensemble des entreprises américaines. Des données récentes montrent que les femmes sont  terriblement sous-représentées dans la C-Suite, et fait peut-être encore plus alarmant, les femmes cadres subissent toujours les  mêmes types de discrimination sexuelle  qui affligent les femmes à tous les échelons des entreprises américaines. Les investisseurs et les groupes de défense devraient étendre leur attention à la diversité au-delà du niveau du conseil d’administration. Les campagnes pour la diversité de la suite C et d’autres niveaux de leadership ont le potentiel de créer une représentation plus équitable au sommet, et d’autres efforts peuvent pousser à des résultats similaires dans l’ensemble de la main-d’œuvre d’une entreprise.

La diversité des sexes au sein des conseils d’administration des entreprises américaines continue d’augmenter, mais il a fallu une décennie d’efforts soutenus de la part de plusieurs groupes pour atteindre ce succès. Les leçons apprises au cours de cette période peuvent et doivent être mises à profit pour aider à accélérer des efforts plus larges visant à diversifier les rangs des entreprises américaines.

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*Molly Stutzman est « Analyst of Corporate Research » à JUST Capital.

La professionnalisation de la gouvernance


Voici un article qui vient de paraître sur le site du Collège des administrateurs de sociétés

Dans cet article*, je tente de faire la lumière sur l’évolution fulgurante du concept de gouvernance d’entreprise et sur les raisons qui ont mené à sa professionnalisation.

Bonne lecture !

Professionnalisation de la gouvernance

La professionnalisation de la gouvernance

Dans cet article, nous tenterons de faire la lumière sur l’évolution fulgurante du concept de gouvernance d’entreprise et sur les raisons qui ont mené à sa professionnalisation.

Mais d’abord, qu’entend-on par professionnalisation de la gouvernance ? La professionnalisation, c’est essentiellement le processus de reconnaissance d’un corpus de connaissances, de compétences et d’expériences relatif à l’exercice des activités de la gouvernance d’entreprise.

Ainsi, on parlera de l’évolution du métier d’administrateur vers un statut de professionnel de la gouvernance qui combine une formation continue dans les domaines du savoir pertinents et un code de conduite adapté à la profession (déontologie).

LA PROFESSIONNALISATION DE LA GOUVERNANCE : UN PROCESSUS EN PLEINE EXPANSION

Depuis une vingtaine d’années, on assiste à une professionnalisation accrue de la fonction d’administrateur qui se manifeste par une modification et un élargissement du rôle et des responsabilités des conseils. Les CA sont de plus en plus sollicités et questionnés au sujet de leurs décisions et de l’entreprise.

À l’avenir, on exigera toujours plus des administrateurs. C’est pourquoi la formation en gouvernance est essentielle et devient même une exigence pour certaines organisations. Les administrateurs sont désormais invités à suivre des formations en gouvernance de sociétés, notamment des programmes menant à des certifications universitaires.

Le processus de professionnalisation de la gouvernance est en évolution rapide. La gouvernance, comme discipline, tend vers une pratique de plus en plus accomplie au fur et à mesure du développement d’une assise ancrée dans la recherche de son efficacité. Plusieurs organisations de formation, telles que le Collège des administrateurs de sociétés de l’Université Laval, se sont donné comme mission de « promouvoir la bonne gouvernance de sociétés en offrant des formations reconnues et à la fine pointe des meilleures pratiques » (1).

Il est important de souligner que la notion de gouvernance n’est pas nouvelle en soi. De tous temps, les sociétés humaines ont été gouvernées par des régimes qui ont instauré diverses configurations d’exercice du pouvoir. La gouvernance sociale a toujours été un domaine réservé aux sciences sociales, plus spécialement aux sciences politiques.

Ce qui est nouveau dans le monde de la gouvernance, surtout depuis une vingtaine d’années, c’est l’application du concept au domaine des organisations privées, cotées en bourse, OBNL, sociétés d’État, etc. En effet, si l’on se réfère au corpus des sciences de la gestion, la gouvernance, comme champ d’enseignement et de recherche, y est relativement absente. On peut affirmer que la prise en compte de la portée de la gouvernance d’entreprises est très récente, et que sa professionnalisation est en bonne voie d’être affirmée et renforcée grâce aux nombreuses recherches académiques sur la question.

À cet effet, mentionnons le Forum du Harvard Law School sur la gouvernance
« corporative »
 qui a publié 6 400 billets (provenant de plus de 5 000 contributeurs), lesquels ont été largement cités dans plus de 800 articles de revue de droit et de publications en gouvernance. (2)

On constate une intensification marquée des recherches et des publications de la part d’entreprises de consultation en gouvernance telles que Spencer| Stuart, Deloitte, McKinsey, PwC, pour n’en nommer que quelques-unes, qui produisent des rapports annuels sur l’état de la gouvernance des entreprises cotées en bourse. L’un des documents les plus exhaustifs sur la situation de la gouvernance au Canada est le
« 2020 Canada Spencer Stuart Index » (SSBI) qui présente des statistiques détaillées et comparatives, et brosse un tableau complet des constats eu égard aux grandes tendances en gouvernance. (3)

Au Québec, et ailleurs dans le monde, les écoles de gestion concentrent leurs enseignements sur les disciplines éminemment utiles aux gestionnaires (le management, les ressources humaines, la finance, l’assurance, l’immobilier, le marketing, les systèmes opérationnels de décision, les technologies et les systèmes d’information, la comptabilité, etc.), mais, encore aujourd’hui, elles accordent trop peu d’attention à la gouvernance des sociétés, notamment aux activités fiduciaires des administrateurs, nommés pour assurer l’équilibre du pouvoir entre les propriétaires (les actionnaires), les parties prenantes (employés clients, fournisseurs, entités sociales, etc.) et les gestionnaires (les dirigeants choisis pour gérer l’entreprise).

Au cours des dernières décennies, la gouvernance des sociétés a subi d’importants changements, dont les plus marquants concernent la composition de l’actionnariat, la primauté du conseil d’administration, l’activisme des actionnaires et des investisseurs et la prééminence des autorités réglementaires. Ces transformations se traduisent par une évolution significative du rôle et du fonctionnement des conseils d’administration et de ses comités. Ainsi, depuis une vingtaine d’années, les exigences de formation, de compétence et d’expérience des administrateurs n’ont cessé de croître ; si bien qu’un bon niveau de connaissance des outils et des pratiques de gouvernance devient une part essentielle du cursus en administration. Ces nouveaux développements ont grandement contribué à la professionnalisation de la gouvernance.

LES CONSEILS D’ADMINISTRATION EN MUTATION

L’environnement des conseils d’administration a été ébranlé par la nouvelle dynamique imposée par les changements dans la composition des CA, par l’avènement des actionnaires activistes (qui sont perçus comme des intrus à la recherche de rendements à court terme) et par les nouvelles dispositions émanant des autorités réglementaires qui imposent de nouvelles obligations aux entreprises et aux administrateurs.

Au chapitre de l’actionnariat mondial, un rapport de l’OCDE (4) publié en 2019 montrait que l’actionnariat des 10 000 sociétés les plus importantes représentait 90 % de la capitalisation totale. Le capital est de plus en plus concentré.

  • La principale catégorie d’actionnaires est celle des investisseurs institutionnels (fonds de pension, compagnies d’assurance, gestionnaires d’actifs), qui détiennent 41 % du capital de l’ensemble des sociétés cotées du monde;
  • Les sociétés privées (y compris les holdings) et les particuliers possèdent chacun 18 % de la capitalisation mondiale;
  • Le secteur public (gouvernements nationaux et locaux, fonds souverains, entreprises d’État) possède 14 % de la capitalisation mondiale;
  • Plus de 8 % des entreprises cotées dans le monde ont un actionnariat majoritairement public.

Dorénavant, les investisseurs institutionnels veulent se prononcer sur les orientations des entreprises dans lesquelles ils investissent. Les représentants des actionnaires recherchent des administrateurs chevronnés pour orienter et superviser les intérêts de groupes très diversifiés.

C’est la reconnaissance de sérieuses lacunes dans la formation des administrateurs qui a incité plusieurs grandes organisations à proposer des activités de développement débouchant sur des certifications en gouvernance, souvent universitaires. Comme on l’a mentionné précédemment, les activités fiduciaires des administrateurs de sociétés étaient très peu considérées et encadrées par les institutions d’enseignement supérieures.

Un peu partout dans le monde, on a assisté à la création de programmes de formation et de certifications des administrateurs. Ainsi, au Québec, le Collège des administrateurs de sociétés « doit sa création à l’initiative de quatre grands partenaires convaincus de la nécessité de renforcer la gouvernance de sociétés : (1) l’Autorité des marchés financiers (2) la Caisse de dépôt et placement du Québec (3) le ministère du Conseil exécutif et (4) la Faculté des sciences de l’administration de l’Université Laval. En plus de ces quatre visionnaires, le Collège bénéficie de l’appui d’un bon nombre de partenaires d’excellence associés et ses formations en gouvernance sont reconnues par plusieurs ordres et organismes professionnels » (5).

LA RÉGLEMENTATION IMPOSE SA LOI !

Selon nous, les scandales Enron et WorldCom représentent un tournant dans la réglementation en gouvernance des sociétés. En effet, c’est dans la foulée de ces événements que le gouvernement américain a adopté, en 2002, la loi Sarbanes-Oxley (SOX) qui impose à toutes les entreprises de déposer auprès de la SEC (l’organe de régulation des marchés boursiers américains) des états financiers produits par des auditeurs indépendants, et certifiés personnellement par les dirigeants de l’entreprise. Cette loi rend donc les hauts dirigeants pénalement responsables de l’exactitude et de la validité des résultats financiers. (6)

C’est à cette époque que les autorités de réglementation des marchés financiers, à l’échelle mondiale, ont renforcé les règles qui s’appliquent à la gouvernance des entreprises (règles de décision, de composition du conseil, de transparence, de surveillance, d’éthique et de reddition de comptes). On milite en faveur de l’instauration de nouveaux mécanismes de renforcement de la professionnalisation de la gouvernance des entreprises.

Ainsi, aux États-Unis, l’ancien président de la SEC, Richard Breeden a produit, en mai 2003, un rapport comportant 78 recommandations. Ce rapport devrait à terme devenir la base de la réforme de la gouvernance d’entreprise, et ses propositions devaient s’imposer à toutes les grandes et moyennes entreprises. (7)

Il apparaissait nécessaire, à beaucoup, que se termine l’ère, pendant laquelle des patrons régnaient sans limites et sans partage sur des sociétés dans lesquelles personne n’osait poser les vraies questions. Les propositions de Richard Breeden devaient permettre l’instauration de multiples règles ayant pour but de limiter les initiatives des PDG tout puissants, en tentant de rendre la totalité des administrateurs indépendants de la direction de l’entreprise. Les nouveaux conseils d’administration des entreprises fautives ont procédé, en juillet 2003, à l’adoption de toutes les propositions du rapport.

Voici quelques-unes des propositions qui ont fait leur chemin dans les nouvelles réglementations.

  • Interdiction du cumul des fonctions de PDG et de PCA (président du Conseil d’administration).
  • Inéligibilité au Conseil d’administration de tout responsable de société travaillant avec la société à administrer.
  • Meilleure rémunération des administrateurs, mais obligation de consacrer 25 % du revenu à l’achat d’actions de la société à administrer.
  • Interdiction aux administrateurs de siéger au Conseil d’administration de plus de deux firmes cotées en bourse.
  • Obligation au Conseil d’administration de se réunir au moins 8 fois par an.
  • Obligation aux membres du Conseil d’administration d’aller visiter les installations et sites de l’entreprise.
  • Obligation aux membres du Conseil d’administration de recevoir chaque année une formation spéciale pour mieux comprendre l’entreprise et son secteur.
  • Interdiction à un administrateur de conserver son poste plus de dix ans.
  • Obligation de remplacer chaque année un des administrateurs, afin d’éviter que la collégialité du conseil n’aboutisse à la passivité.
  • Interdiction de payer les dirigeants avec des options d’achat de titres.
  • Création d’un plafond de rémunération pour les dirigeants.
  • Renforcement de la démocratie directe donnée aux actionnaires de base.

On note dans les points cités qu’il n’est pas fait mention de règles s’appliquant à la diversité et à l’inclusion, ni aux obligations de divulgation extensives, ni à l’attention à apporter aux parties prenantes. Ces considérations feront l’objet d’autres modifications aux différents codes de gouvernance.

UNE GOUVERNANCE GUIDÉE PAR LA CRÉATION DE VALEUR

Dans la littérature sur la conception des systèmes de gouvernance, on retrouve différentes tendances! Quelle est celle qui vous inspire et qui vous semble réaliste ?

Plusieurs systèmes de gouvernance choisissent de privilégier la création de valeur pour l’actionnaire (shareholder value en anglais). Dans cette approche, les intérêts des dirigeants s’alignent sur ceux des actionnaires et des investisseurs financiers. L’organisation du conseil d’administration et la réglementation en matière de transparence et de rémunération des dirigeants sont négociées en vue d’atteindre cet objectif.

Un autre système de gouvernance valorise plutôt la création de valeur pour l’ensemble des parties prenantes (stakeholder value en anglais). Dans ce cas, on cherchera à créer de la richesse entre les différentes ressources humaines et matérielles par coopération avec différents types de parties prenantes : clients, fournisseurs, employés, actionnaires, collectivités territoriales… La performance est mesurée au regard de l’ensemble des partenaires. Ce type de gouvernance favorisera le développement de deux types de capital : le capital financier, mais aussi le capital humain (savoir-faire, compétences, innovation).

Enfin, il est important de souligner l’apport d’Yvan Allaire, président du conseil d’administration de l’Institut sur la gouvernance d’organisations publiques et privées (IGOPP), qui propose une gouvernance créatrice de valeur. Selon sa conception, l’objectif financier d’une entreprise devrait être la maximisation de la valeur à long terme de la compagnie, un objectif qui dépasse le seul intérêt de l’actionnaire pour englober toutes les parties concernées. (8)

LE DÉPLOIEMENT DE L’OFFRE DE FORMATION EN GOUVERNANCE

Il apparaît essentiel, à ce stade-ci, de souligner la réalisation des efforts entrepris par les institutions canadiennes afin de répondre à la forte demande de formation de professionnels à la fine pointe de la gouvernance, mais aussi d’innover par la conception de programmes de certification de haut niveau à l’intention des administrateurs de sociétés.

D’abord, notons que les formations en gouvernance sont maintenant omniprésentes dans toutes les institutions d’enseignement au Canada. Les formations recoupent généralement les thématiques suivantes : gouvernance des sociétés cotées, gouvernance des PME, gouvernance des TI, gouvernance des OBNL, gouvernance des coopératives, gouvernance des sociétés d’État.

Les formations abordent un ensemble de thèmes spécifiques, par exemple, l’évaluation des administrateurs et des CA, la rémunération de la direction et des membres du CA, l’audit interne et externe, l’établissement de stratégies, la gestion des risques, le développement durable et ESG, la performance financière, la gestion de crises, les comités du CA, etc. Les formations sont souvent axées sur les nouvelles habilitées à développer ainsi que sur le savoir-être, par exemple, le leadership de la présidence du CA, la culture de la confiance, les habiletés politiques, les habilités en ressources humaines, etc.

Enfin, on note que les formations continues en gouvernance au Canada sont offertes dans diverses localisations, et que les rythmes d’apprentissage proposés sont variés. Les formations sont de plus en plus offertes en ligne, surtout depuis le début de la pandémie de Covid-19.

Au Canada, on compte trois programmes d’exception. Les trois programmes sont affiliés à de grandes institutions universitaires, tandis que seuls les deux premiers mènent à une certification universitaire (ASC et C.Dir.). Les diplômés de chacun des trois programmes obtiennent le droit d’utiliser une désignation reconnue à l’échelle internationale à la fin de leur parcours.

formation gouvernance

L’offre de programmes de formation continue en gouvernance au Canada est très vaste, ce qui démontre concrètement les grandes préoccupations des institutions universitaires pour la professionnalisation de la gouvernance. Mais, il est important de noter que ce phénomène s’étend à l’ensemble des pays de par le monde.

FORTE CROISSANCE DE LA FORMATION EN GOUVERNANCE À L’ÉCHELLE INTERNATIONALE

On dénombre des centaines d’organisations internationales dont la mission est la formation et la recherche en gouvernance. Parmi les plus importantes, on peut citer :

  • L’Institute of Directors (IOD) en Grande-Bretagne, avec plusieurs instituts dans les pays du Commonwealth; (9)
  • ECODA, une organisation qui regroupe les instituts de formation de tous les pays européens; (10)
  • La National Association of Corporate Directors (NACD), la première et la plus puissante organisation américaine qui offre un programme de certification des administrateurs de sociétés. (11)

L’ensemble de ces organisations est chapeauté par le Global Netwok of Director Institutes (GNDI), qui produit le Global Network of Director Institutes 2020–2021 Survey Report, un document de recherche qui brosse un portrait de l’état de la gouvernance dans le monde en temps de pandémie. (12)

CONCLUSION

Ainsi, comme on l’a vu, la prolifération des organisations dédiées à la formation et à la certification des administrateurs est un signe éloquent de la professionnalisation de la gouvernance au Canada et dans le monde.

Les tâches et les responsabilités des administrateurs ont dorénavant une portée plus dominante en même temps que les pratiques de saine gouvernance deviennent quasi-universelles. La gouvernance est maintenant un concept incontournable ; les administrateurs sont de plus en plus nombreux à rechercher la certification de leurs compétences et de leurs habiletés à siéger aux conseils d’administration.

La place réservée aux femmes sur les CA poursuit sa progression, malgré le fait que le mouvement soit trop lent. Dans l’ensemble, la composition des CA est constituée de personnes mieux formées et fait appel à une plus grande diversifié ethnoculturelle, mais le taux de renouvellement des administrateurs est encore trop faible pour assurer une évolution rapide des mentalités ainsi qu’une diversification des qualifications. Eu égard au renouvellement des conseils, les études montrent que l’âge moyen des administrateurs continue d’augmenter et que la nomination de jeunes administrateurs est moins fréquente que les années antérieures. (13)

Voici certaines valeurs recherchées chez les administrateurs dans l’exécution de leurs tâches : l’indépendance de la direction, la volonté de création de valeur pour toutes les parties prenantes, la mise à jour des apprentissages en gouvernance, la maîtrise du secteur d’activité et des nouvelles technologies. Les conseils d’administration doivent se métamorphoser afin de faire un meilleur usage des compétences autour de la table. À cet égard, je vous invite à prendre connaissance du complément à cet article qui porte sur la matrice des profils et compétences des membres d’un CA, présentant ainsi un modèle développé par l’équipe du Collège (14).

L’orientation et la stratégie doivent devenir les centres d’intérêt des administrateurs, et leur travail doit essentiellement se faire par l’intermédiaire des différents comités du conseil mis en place. L’une des meilleures façons d’améliorer les processus de décision, en sus de la formation continue en gouvernance, est l’évaluation de la contribution des administrateurs, menée sous la responsabilité de la présidence du comité de gouvernance.

La professionnalisation de la gouvernance est en marche ! Rien ne peut arrêter ce mouvement…

_____________________

RÉFÉRENCES

    • L’article a été publié par Jacques Grisé, Ph.D., F.Adm.A, conseiller/expert en gouvernance, professeur titulaire de management à la retraite de la faculté des sciences de l’administration de l’université Laval.

Tendances mondiales et régionales 2022 en matière de gouvernance d’entreprise


Tendances mondiales prévues pour 2022

1. Des investisseurs affirmés prêts à voter pour le changement
2. Des normes plus élevées en matière de divulgation et d’action en matière de climat
3. L’amélioration de l’efficacité du conseil devient la norme
4. Un accent accru sur l’équité, la diversité et les initiatives de culture inclusive au niveau du conseil d’administration et de l’entreprise

Au cours des dernières années, certains observateurs de la gouvernance et membres du conseil d’administration ont prédit (ou espéré) que l’attention des actionnaires et des autres parties prenantes sur ces sujets diminuerait. Mais les experts que nous avons interrogés n’auraient pas pu être plus clairs : ces sujets sont plus importants que jamais, et les investisseurs et autres s’apprêtent à être plus exigeants qu’ils ne l’ont été ces dernières années.

Des investisseurs plus affirmés et exigeants qui se sentent habilités à exiger des actions et des informations sur un nombre croissant de sujets et, faute de répondre à ces exigences, plus susceptibles que jamais de voter contre les sociétés et les administrateurs individuels lors des assemblées annuelles des actionnaires.

Des normes plus élevées pour l’attention des entreprises au climat , car la matérialité du changement climatique pour les entreprises individuelles et la société dans son ensemble est incontestable. Comme Larry Fink l’a écrit dans la lettre de 2022 de Blackrock aux PDG, « la plupart des parties prenantes… s’attendent désormais à ce que les entreprises jouent un rôle dans la décarbonation de l’économie mondiale ». 1

Les pratiques améliorées d’efficacité du conseil deviennent la norme à mesure que les investisseurs et les autres parties prenantes réalisent que de bonnes pratiques de composition, de renouvellement et d’évaluation entraînent une amélioration des performances de l’entreprise et une diminution de l’exposition aux risques.

Urgence concernant les initiatives d’équité et de diversité à la fois dans l’entreprise et dans la salle de réunion, alors que les preuves s’accumulent que les organisations diversifiées surpassent les autres et que les parties prenantes exigent des progrès sans délai.

Nous pensons que « plus » prendra deux formes en 2022 : non seulement il y aura plus d’activité dans chacun de ces domaines (les conseils d’administration agissent, de nouvelles réglementations entrent en jeu, etc.), mais il y aura également plus d’attention portée à tous de ces domaines par les actionnaires et les parties prenantes. Le niveau de contrôle et de surveillance publique du conseil d’administration et des administrateurs à partir de 2022 augmentera au-delà de tout ce que les administrateurs ont connu auparavant.

Dans cet esprit, nous allons maintenant partager certaines des tendances les plus urgentes dans chaque région et comment nous en sommes arrivés là où nous en sommes aujourd’hui.

États-Unis et Canada États-Unis et Canada

Les attentes concernant la surveillance environnementale, les rapports et la performance continueront d’augmenter.

Au cours des dernières années, les investisseurs se sont de plus en plus concentrés sur la surveillance, les rapports et les performances environnementales des sociétés en portefeuille. Les directives de vote par procuration pour ces investisseurs, dont plusieurs des plus grands gestionnaires d’actifs au monde, deviennent beaucoup plus strictes. Par exemple, les directives de vote par procuration 2022 récemment publiées par Vanguard indiquent qu’il envisagera de voter contre les administrateurs pour les «défaillances importantes de la surveillance des risques», y compris la surveillance des risques climatiques. 2La lettre annuelle du PDG de State Street Global Advisors, publiée le 12 janvier 2022, déclare que les entreprises des principaux indices aux États-Unis et sur plusieurs autres marchés devraient aligner leurs divulgations liées au climat sur le TCFD, et que SSGA prendra des mesures de vote contre administrateurs s’ils ne répondent pas aux attentes en matière de divulgation ; les « émetteurs les plus importants » de son portefeuille recevront un engagement et des demandes encore plus ciblés. 3 Les attentes des investisseurs continuent d’augmenter et les entreprises qui n’augmentent pas leurs propres efforts en matière de développement durable seront examinées plus rigoureusement.

Divers conseils des normes de durabilité ont fusionné pour créer l’International Sustainability Standards Board (ISSB), régi par les IFRS. Cette évolution vers un ensemble cohérent de normes fondées sur le marché s’accompagnera probablement de divulgations légalement requises. La réglementation proposée par la Securities and Exchange Commission des États-Unis est également attendue prochainement, bien qu’il faudra des mois (voire des années) pour que les règles soient finalisées et appliquées. Le 16 décembre, le premier ministre canadien Justin Trudeau a envoyé des lettres de mandat à ses ministres, suggérant une « approche pangouvernementale du changement climatique », selon un représentant du Réseau action climat Canada. 4La lettre de mandat au ministre de l’Environnement et du Changement climatique et au ministre des Finances exigeait des divulgations financières obligatoires liées au climat, 5 mais il y avait de nombreuses autres demandes spécifiques au climat adressées à d’autres ministères, notamment les Ressources naturelles, le Développement international et la Sécurité publique.

Alors que la divulgation obligatoire établira des normes sur ce que les entreprises doivent divulguer concernant les efforts de développement durable, les organisations doivent s’attendre à ce qu’en 2022, de nombreuses parties prenantes importantes, y compris les grands actionnaires, demandent des éclaircissements supplémentaires au-delà de ce que la loi exige. En plus d’améliorer les informations sur les priorités, les promesses et les performances environnementales, les entreprises peuvent mieux répondre à ces attentes en constante évolution en attribuant judicieusement des responsabilités de surveillance au conseil d’administration et en augmentant la communication et l’engagement des actionnaires sur les sujets de développement durable.

Les actionnaires seront plus affirmés et les entreprises avisées amélioreront leurs programmes d’engagement actionnarial.

Chaque saison de proxy présente des investisseurs qui poussent une entreprise à changer de cap. Et 2021 n’a pas fait exception; La course aux procurations réussie du moteur n ° 1 chez ExxonMobil a probablement été l’histoire de gouvernance d’entreprise la plus discutée de l’année. Comme nous l’avons déjà écrit, cette course aux procurations était à la fois une histoire sur la composition, la gouvernance et la durabilité du conseil d’administration, ainsi qu’une leçon sur la valeur des pratiques efficaces d’engagement des actionnaires. La perception par les plus grands investisseurs d’Exxon du fait que les dirigeants de l’entreprise ne les écoutent pas au sujet de la composition du conseil d’administration et d’une stratégie pour un avenir sans carbone était essentielle à la capacité du moteur n ° 1 à éliminer Goliath et à placer trois administrateurs au conseil d’administration de l’entreprise.

Ne vous y trompez pas : l’assertivité actionnariale ne se limitera pas au « E » de l’ESG. En 2021, il y a eu plus de votes pour les propositions d’actionnaires et contre les administrateurs que jamais auparavant. Nos entretiens révèlent que cette tendance devrait se poursuivre en 2022, avec davantage de propositions d’actionnaires recevant un soutien important (30 % ou plus) ou un soutien majoritaire. Alors que les propositions environnementales continueront d’attirer l’attention et le soutien des actionnaires, les propositions sur d’autres sujets importants, notamment la diversité, l’équité et l’inclusion, l’engagement politique des entreprises et les droits des actionnaires, bénéficieront également d’un soutien important.

Les projecteurs sont braqués sur DE&I, la culture et la gestion du capital humain.

La demande de conseils d’administration, de suites C et de main-d’œuvre diversifiés n’a jamais été aussi forte. Il est largement admis que la diversité au sein de ces groupes reflète mieux – et sert mieux – une société mondiale diversifiée et améliore en conséquence le leadership, la gouvernance et, en fin de compte, les performances financières et la solidité de la réputation.

La demande de diversité des conseils d’administration se reflète de plus en plus dans les mandats, tels que les exigences de la Californie en matière de diversité de genre et de race / ethnique dans les conseils d’administration, et le changement de règle du Nasdaq exigeant la divulgation de la diversité des conseils d’administration et les mandats de conformité ou d’explication pour des statistiques minimales sur la diversité des conseils d’administration. En plus d’autres États et organismes de réglementation ajoutant leurs propres exigences en matière de fonds propres, les investisseurs deviennent également plus exigeants. Par exemple, les politiques de vote par procuration de BlackRock aux États-Unis et au Canada pour 2022 notent toutes deux : « nous pensons que les conseils d’administration devraient aspirer à une diversité de 30 % des membres et encourager les entreprises à avoir au moins deux administrateurs dans leur conseil d’administration qui s’identifient comme des femmes et au moins un qui s’identifie comme un membre d’un groupe sous-représenté. 6

La pandémie en cours a également mis en lumière les relations des entreprises avec leurs employés. Dans sa lettre annuelle aux PDG, Larry Fink de BlackRock note à quel point ces relations ont changé au cours de la dernière année, les travailleurs étant plus exigeants que jamais. Il écrit : « Les travailleurs qui exigent plus de leurs employeurs sont une caractéristique essentielle d’un capitalisme efficace. Cela stimule la prospérité et crée un paysage plus compétitif pour les talents, poussant les entreprises à créer de meilleurs environnements plus innovants pour leurs employés, des actions qui les aideront à réaliser de plus grands profits pour leurs actionnaires. 7 Nos entretiens suggèrent que l’intérêt pour un large éventail de sujets concernant les employés, notamment la culture d’entreprise, le retour au travail, la santé mentale, la garde d’enfants et l’inégalité des revenus, gagnera en importance en 2022 et au-delà.

L’accent sera davantage mis sur l’efficacité du conseil, y compris la composition, l’évaluation et les rafraîchissements.

Les parties prenantes continueront d’attendre la bonne composition du conseil d’administration pour le présent et l’avenir de l’entreprise ; cela comprend un conseil collectivement diversifié et efficace. Les conseils seront sous pression en 2022 pour démontrer des engagements continus envers l’auto-évaluation et la planification ciblée des rafraîchissements. ISS déclare que le rafraîchissement du conseil est mieux réalisé par un programme continu d’évaluations individuelles des administrateurs. Certains des plus grands investisseurs et conseillers en vote réclament directement de solides programmes d’évaluation des conseils d’administration. Par exemple, les directives de vote d’ISS pour les États-Unis en 2022 notent : « Le rafraîchissement du conseil est mieux mis en œuvre par le biais d’un programme continu d’évaluations individuelles des administrateurs, menées chaque année, pour s’assurer que les besoins changeants du conseil sont satisfaits et pour apporter de nouvelles perspectives, compétences et diversité au fur et à mesure. nécessaire.


Auteurs

Rich Fields dirige la pratique de l’efficacité du conseil d’administration de Russell Reynolds Associates. Il est basé à Boston.
Rusty O’Kelley III codirige le conseil d’administration de Russell Reynolds Associates et CEO Advisory Partners dans les Amériques. Il est basé à Stamford.
Laura Sanderson co-dirige le conseil d’administration de Russell Reynolds Associates et CEO Advisory Partners en Europe. Elle est basée à Londres.
Helen Metcalfe est membre du conseil d’administration de Russell Reynolds Associates et CEO Advisory Partners. Elle est basée à Londres.
Jacques Sarfatti est membre du conseil d’administration de Russell Reynolds Associates et CEO Advisory Partners. Il est basé à São Paulo.
Alvin Chiang est membre du conseil d’administration de Russell Reynolds Associates et CEO Advisory Partners. Il est basé à Singapour.
Jordan Frantz est membre du conseil d’administration de Russell Reynolds Associates et CEO Advisory Partners. Il est basé à Boston.
Melissa Martin est membre du conseil d’administration de Russell Reynolds Associates et CEO Advisory Partners. Elle est basée à Washington, DC.
Jennifer Thevervelil est membre du conseil d’administration de Russell Reynolds Associates et CEO Advisory Partners. Elle est basée à New York.
Susanne Suhonen est membre du conseil d’administration de Russell Reynolds Associates et CEO Advisory Partners. Elle est basée à Londres.

Les références

1. https://www.blackrock.com/corporate/investorrelations/larry-fink-ceo-letter
2. https://about.vanguard.com/investment-stewardship/portfolio-company-resources/US_Proxy_Voting.pdf
3. https://www.ssga.com/us/en/institutional/ic/insights/ceo-letter-2022-proxy-voting-agenda
4. https://www.thestar.com/news/canada/2021/12 /22/full-court-press-onclimate-in-mandate-letters-but-environmentalists-will-wait-and-see.html
5. Lettre de mandat du ministre de l’Environnement et du Changement climatique, 16 décembre 2021
6. https:// www.blackrock.com/corporate/literature/factsheet/blk-responsible-investment-guidelines-us.pdf ,https://www.blackrock.com/corporate/literature/fact-sheet/blk-responsible-investment-guidelines-canada.pdf
7. https://www.blackrock.com/corporate/investorrelations/larry-fink-ceo -lettre

Lettre de Larry Fink, président de BlackRock, aux PDG et aux présidents de CA


Je vous présente la lettre annuelle Larry Fink, fondateur, président et PDG de BlackRock inc., datée du 19 janvier 2022.

L’auteur expose sa philosophie à l’ensemble des PDG et des présidents de CA. Dans cette lettre annuelle vraiment pertinente, Larry Fink montre comment les entreprises doivent se préoccuper du capitalisme des parties prenantes (stakeholder capitalism) et adopter une gestion agile qui tient compte des changements climatiques et de l’exécution de la mission à long terme.

Je vous invite à lire la version française de la publication effectuée par Google, que j’ai corrigée. Ce travail de correction est certainement encore perfectible, mais le résultat est très satisfaisant.

Bonne lecture !

 

BlackRock's Larry Fink Defends Stakeholder Capitalism In Annual Letter To CEOs
BlackRock’s Larry Fink Defends Stakeholder Capitalism In Annual Letter To CEOs

Chaque année, je me fais une priorité de vous écrire au nom des clients de BlackRock, qui sont actionnaires de votre entreprise. La majorité de nos clients investissent pour financer leur retraite. Leurs horizons temporels peuvent s’étendre sur des décennies.

La sécurité financière que nous cherchons à aider nos clients à atteindre ne se crée pas du jour au lendemain. C’est une entreprise de longue haleine, et nous adoptons une approche à long terme. C’est pourquoi, au cours de la dernière décennie, je vous ai écrit, en tant que PDG et présidents des sociétés dans lesquelles nos clients sont investis. J’écris ces lettres en tant que fiduciaire pour nos clients qui nous confient la gestion de leurs actifs — pour mettre en évidence les thèmes qui, à mon avis, sont essentiels pour générer des rendements durables à long terme et les aider à atteindre leurs objectifs.

Lorsque mes partenaires et moi avons fondé BlackRock en tant que startup il y a 34 ans, je n’avais aucune expérience dans la gestion d’une entreprise. Au cours des trois dernières décennies, j’ai eu l’occasion de discuter avec d’innombrables PDG et d’apprendre ce qui distingue vraiment les grandes entreprises. Maintes et maintes fois, ce qu’ils partagent tous, c’est qu’ils ont un sens clair du but ; valeurs cohérentes ; et, surtout, ils reconnaissent l’importance de s’engager avec leurs principales parties prenantes et d’agir pour elles. C’est le fondement du capitalisme des parties prenantes.

Le capitalisme des parties prenantes n’est pas une question de politique. Ce n’est pas un programme social ou idéologique. Ce n’est pas « woke ». C’est le capitalisme, motivé par des relations mutuellement bénéfiques entre vous et les employés, clients, fournisseurs et communautés sur lesquels votre entreprise s’appuie pour prospérer. C’est le pouvoir du capitalisme.

Dans le monde interconnecté d’aujourd’hui, une entreprise doit créer de la valeur pour l’ensemble de ses parties prenantes et être appréciée par celle-ci afin d’offrir une valeur à long terme à ses actionnaires. C’est grâce à un capitalisme efficace des parties prenantes que le capital est efficacement alloué, que les entreprises atteignent une rentabilité durable et que la valeur est créée et maintenue à long terme. Ne vous y trompez pas, la juste recherche du profit est toujours ce qui anime les marchés ; et la rentabilité à long terme est la mesure par laquelle les marchés détermineront en fin de compte le succès de votre entreprise.

À la base du capitalisme se trouve le processus de réinvention constante — les entreprises doivent continuellement évoluer à mesure que le monde qui les entoure change ou elles risquent d’être remplacées par de nouveaux concurrents. La pandémie a accéléré l’évolution de l’environnement opérationnel de pratiquement toutes les entreprises. Cela change la façon dont les gens travaillent et la façon dont les consommateurs achètent. Il crée de nouvelles entreprises et en détruit d’autres. Plus particulièrement, cela accélère considérablement la façon dont la technologie remodèle la vie et les affaires. Les entreprises innovantes qui cherchent à s’adapter à cet environnement ont un accès plus facile que jamais au capital pour réaliser leurs visions. Et la relation entre une entreprise, ses employés et la société se redéfinit.

Le COVID-19 a également aggravé l’érosion de la confiance dans les institutions traditionnelles et exacerbé la polarisation dans de nombreuses sociétés occidentales. Cette polarisation présente une multitude de nouveaux défis pour les PDG. Les militants politiques ou les médias peuvent politiser les activités de votre entreprise. Ils peuvent détourner votre marque pour faire avancer leurs propres agendas. Dans cet environnement, les faits eux-mêmes sont souvent contestés, mais les entreprises ont la possibilité de montrer l’exemple. Les employés considèrent de plus en plus leur employeur comme la source d’information la plus fiable, la plus compétente et la plus éthique, plus que le gouvernement, les médias et les ONG.

C’est pourquoi votre voix est plus importante que jamais. Il n’a jamais été aussi essentiel pour les PDG d’avoir une voix cohérente, un objectif clair, une stratégie cohérente et une vision à long terme. La raison d’être de votre entreprise est son étoile polaire dans cet environnement tumultueux. Les parties prenantes sur lesquelles votre entreprise s’appuie pour générer des bénéfices pour les actionnaires ont besoin d’avoir de vos nouvelles directement, d’être engagées et inspirées par vous. Ils ne veulent pas nous entendre, en tant que PDG, donner des avis sur chaque question d’actualité, mais ils ont besoin de savoir où nous en sommes sur les questions sociétales intrinsèques au succès à long terme de nos entreprises.

Placer l’objectif de votre entreprise au cœur de vos relations avec vos parties prenantes est essentiel à votre succès à long terme. Les employés doivent comprendre et comprendre votre objectif ; et quand ils le font, ils peuvent être vos plus ardents défenseurs. Les clients veulent voir et entendre ce que vous représentez, car ils cherchent de plus en plus à faire affaire avec des entreprises qui partagent leurs valeurs. Et les actionnaires doivent comprendre le principe directeur qui sous-tend votre vision et votre mission. Ils seront plus enclins à vous soutenir dans les moments difficiles s’ils ont une compréhension claire de votre stratégie et de ce qui se cache derrière.

Un nouveau monde du travail

Aucune relation n’a été plus modifiée par la pandémie que celle entre employeurs et employés. Le taux d’abandon aux États-Unis et au Royaume-Uni atteint des sommets historiques. Et aux États-Unis, nous assistons à l’une des plus fortes croissances salariales depuis des décennies. Les travailleurs saisissant de nouvelles opportunités sont une bonne chose : cela démontre leur confiance dans une économie en croissance.

Bien que le roulement et l’augmentation des salaires ne soient pas une caractéristique de toutes les régions ou de tous les secteurs, les employés du monde entier attendent davantage de leur employeur, notamment plus de flexibilité et un travail plus significatif. Alors que les entreprises se reconstruisent à la sortie de la pandémie, les PDG sont confrontés à un paradigme profondément différent de celui auquel nous sommes habitués. Les entreprises s’attendaient à ce que les travailleurs viennent au bureau cinq jours par semaine. La santé mentale était rarement discutée en milieu de travail. Et les salaires des personnes à faible et moyen revenus ont à peine augmenté.

Ce monde a disparu.

Des travailleurs qui exigent toujours plus de leurs employeurs sont une caractéristique essentielle d’un capitalisme efficace. Elle stimule la prospérité et crée un paysage plus compétitif pour les talents, poussant les entreprises à créer de meilleurs environnements plus innovants pour leurs employés, des actions qui les aideront à réaliser de plus grands profits pour leurs actionnaires. Les entreprises qui livrent récoltent les fruits. Nos recherches montrent que les entreprises qui ont forgé des liens solides avec leurs employés ont vu des niveaux de roulement plus faibles et des rendements plus élevés pendant la pandémie. [1]

Les entreprises qui ne s’adaptent pas à cette nouvelle réalité et ne répondent pas à leurs travailleurs le font à leurs risques et périls. Le roulement augmente les dépenses, réduit la productivité et érode la culture et la mémoire de l’entreprise. Les PDG doivent se demander s’ils créent un environnement qui les aide à concourir pour attirer les talents. Chez BlackRock, nous faisons la même chose : travailler avec nos propres employés pour naviguer dans ce nouveau monde du travail.

La création de cet environnement est plus complexe que jamais et va au-delà des questions de rémunération et de flexibilité. En plus de bouleverser notre relation avec l’endroit où nous travaillons physiquement, la pandémie a également mis en lumière des questions telles que l’équité raciale, la garde des enfants et la santé mentale — et a révélé l’écart entre les attentes générationnelles au travail. Ces thèmes sont désormais au centre des préoccupations des PDG, qui doivent réfléchir à la manière dont ils utilisent leur voix et se connectent sur les questions sociales importantes pour leurs employés. Ceux qui font preuve d’humilité et restent ancrés dans leur objectif sont plus susceptibles de créer le type de lien qui perdure tout au long de la carrière de quelqu’un.

Chez BlackRock, nous voulons comprendre l’impact de cette tendance sur votre secteur et votre entreprise. Que faites-vous pour approfondir le lien avec vos employés ? Comment vous assurez-vous que les employés de tous horizons se sentent suffisamment en sécurité pour maximiser leur créativité, leur innovation et leur productivité ? Comment vous assurez-vous que votre conseil a la bonne surveillance de ces questions critiques ? Les lieux où nous travaillons, et comment nous travaillons, seront changés à tout jamais. Comment la culture de votre entreprise s’adapte-t-elle à ce nouveau monde ?

De nouvelles sources de capitaux alimentent les perturbations du marché

Au cours des quatre dernières décennies, nous avons assisté à une explosion de la disponibilité du capital. Aujourd’hui, les actifs financiers mondiaux totalisent 400 000 milliards de dollars. [2] Cette croissance exponentielle s’accompagne de risques et d’opportunités pour les investisseurs comme pour les entreprises, et signifie que les banques ne sont plus les seules gardiennes du financement.

Les jeunes entreprises innovantes n’ont jamais eu aussi facilement accès au capital. Il n’y a jamais eu autant d’argent disponible pour que de nouvelles idées deviennent réalité. Cela alimente un paysage dynamique d’innovation. Cela signifie que pratiquement tous les secteurs regorgent de startups perturbatrices qui tentent de renverser les leaders du marché. Les PDG d’entreprises établies doivent comprendre ce paysage changeant et la diversité des capitaux disponibles s’ils veulent rester compétitifs face à des entreprises plus petites et plus agiles.

BlackRock veut voir les entreprises dans lesquelles nous investissons pour nos clients évoluer et se développer afin qu’elles génèrent des rendements intéressants pour les décennies à venir. En tant qu’investisseurs de long terme, nous nous engageons à travailler avec des entreprises de tous les secteurs. Mais nous aussi nous devons être agiles et veiller à ce que les actifs de nos clients soient investis, en cohérence avec leurs objectifs, dans les entreprises les plus dynamiques, qu’elles soient ds startups ou des acteurs établis, ayant les meilleures chances de réussir dans la durée. En tant que capitalistes et intendants, c’est notre travail.

Je crois en la capacité du capitalisme à aider les individus à atteindre un avenir meilleur, à stimuler l’innovation, à bâtir des économies résilientes et à résoudre certains de nos défis les plus insolubles. Les marchés de capitaux ont permis aux entreprises et aux pays de prospérer. Mais l’accès au capital n’est pas un droit. C’est un privilège. Et le devoir d’attirer ce capital de manière responsable et durable vous incombe.

Capitalisme et durabilité

La plupart des parties prenantes, des actionnaires aux employés, en passant par les clients, les communautés et les régulateurs, s’attendent désormais à ce que les entreprises jouent un rôle dans la décarbonisation de l’économie mondiale. Peu de choses auront plus d’impact sur les décisions d’allocation du capital — et donc sur la valeur à long terme de votre entreprise — que l’efficacité avec laquelle vous naviguez dans la transition énergétique mondiale dans les années à venir.

Cela fait deux ans que j’ai écrit que le risque climatique est un risque d’investissement. Et au cours de cette courte période, nous avons assisté à un déplacement tectonique du capital. [3] Les investissements durables ont maintenant atteint 4 000 milliards de dollars. [4] Les actions et les ambitions en matière de décarbonisation ont également augmenté. Ce n’est que le début — le changement tectonique vers l’investissement durable continue de s’accélérer. Qu’il s’agisse de capitaux déployés dans de nouvelles entreprises axées sur l’innovation énergétique ou de capitaux transférés d’indices traditionnels vers des portefeuilles et des produits plus personnalisés, nous verrons plus d’argent en mouvement.

Chaque entreprise et chaque industrie sera transformée par la transition vers un monde net zéro. La question est, dirigerez-vous ou serez-vous dirigé ?

En quelques années, nous avons tous vu des innovateurs réinventer l’industrie automobile. Et aujourd’hui, tous les constructeurs automobiles se précipitent vers un avenir électrique. L’industrie automobile, cependant, n’est qu’à la fine pointe — chaque secteur sera transformé par de nouvelles technologies durables.

Les ingénieurs et les scientifiques travaillent 24 heures sur 24 sur la façon de décarboniser le ciment, l’acier et les plastiques ; transport maritime, camionnage et aviation ; l’agriculture, l’énergie et la construction. Je crois que la décarbonisation de l’économie mondiale va créer la plus grande opportunité d’investissement de notre vie. Cela laissera également derrière les entreprises qui ne s’adaptent pas, quel que soit leur secteur d’activité. Et tout comme certaines entreprises risquent d’être laissées pour compte, il en va de même pour les villes et les pays qui ne planifient pas l’avenir. Ils risquent de perdre des emplois, même si d’autres endroits en gagnent. La décarbonisation de l’économie s’accompagnera d’une énorme création d’emplois pour ceux qui s’engagent dans la nécessaire planification à long terme.

Les 1 000 prochaines licornes ne seront pas des moteurs de recherche ou des entreprises de médias sociaux, ce seront des innovateurs durables et évolutifs, des startups qui aident le monde à se décarboner et rendent la transition énergétique abordable pour tous les consommateurs. Nous devons être honnêtes sur le fait que les produits verts coûtent souvent plus cher aujourd’hui. La réduction de cette prime verte sera essentielle pour une transition ordonnée et juste. Avec la quantité sans précédent de capitaux à la recherche de nouvelles idées, les opérateurs historiques doivent être clairs sur leur cheminement vers une économie nette zéro. Et ce ne sont pas seulement les startups qui peuvent et vont perturber les industries. Les titulaires audacieux peuvent et doivent le faire aussi. En effet, de nombreux opérateurs historiques disposent d’un avantage en termes de capital, de connaissance du marché et d’expertise technique à l’échelle mondiale, nécessaires à la perturbation à venir.

Notre question à ces entreprises est la suivante : que faites-vous pour perturber votre entreprise ? Comment vous préparez-vous et participez-vous à la transition nette zéro ? Alors que votre industrie est transformée par la transition énergétique, suivrez-vous le chemin du dodo ou serez-vous un phénix ?

Nous nous concentrons sur la durabilité non pas parce que nous sommes des écologistes, mais parce que nous sommes des capitalistes et des fiduciaires pour nos clients. Cela nécessite de comprendre comment les entreprises adaptent leurs activités aux changements massifs que subit l’économie. Dans le cadre de cette orientation, nous demandons aux entreprises de fixer des objectifs à court, moyen et long terme en matière de réduction des gaz à effet de serre. Ces objectifs et la qualité des plans pour les atteindre sont essentiels aux intérêts économiques à long terme de vos actionnaires. C’est aussi pourquoi nous vous demandons d’émettre des rapports cohérents avec la Task Force on Climate-related Financial Disclosures (TCFD) : car nous pensons qu’il s’agit d’outils essentiels pour comprendre la capacité d’une entreprise à s’adapter à l’avenir.

La transition vers le zéro net est déjà inégale, les différentes parties de l’économie mondiale évoluant à des vitesses différentes. Cela n’arrivera pas du jour au lendemain. Nous devons passer par des nuances de brun à des nuances de vert. Par exemple, pour assurer la continuité d’approvisionnements énergétiques abordables pendant la transition, les combustibles fossiles traditionnels comme le gaz naturel joueront un rôle important à la fois pour la production d’électricité et le chauffage dans certaines régions, ainsi que pour la production d’hydrogène.

Le rythme du changement sera très différent dans les pays en développement et développés. Mais tous les marchés nécessiteront des investissements sans précédent dans les technologies de décarbonisation. Nous avons besoin de découvertes transformatrices au même niveau que l’ampoule électrique, et nous devons encourager les investissements dans celles-ci afin qu’elles soient évolutives et abordables.

Alors que nous poursuivons ces objectifs ambitieux — lesquels prendront du temps — les gouvernements et les entreprises doivent veiller à ce que les gens continuent d’avoir accès à des sources d’énergie fiables et abordables. C’est la seule façon de créer une économie verte qui soit juste et équitable et qui permet d’éviter la discorde sociale. Et tout plan qui se concentre uniquement sur la limitation de l’offre et ne répond pas à la demande d’hydrocarbures fera grimper les prix de l’énergie pour ceux qui peuvent le moins se le permettre, ce qui entraînera une plus grande polarisation autour du changement climatique et érodera les progrès.

Se départir de secteurs entiers — ou simplement transférer des actifs à forte intensité de carbone des marchés publics vers les marchés privés — ne ramènera pas le monde à zéro net. Et BlackRock ne poursuit pas le désinvestissement des sociétés pétrolières et gazières en tant que politique. Nous avons certains clients qui choisissent de se départir de leurs actifs tandis que d’autres clients rejettent cette approche. Des entreprises prévoyantes dans un large éventail de secteurs à forte intensité de carbone transforment leurs activités et leurs actions sont un élément essentiel de la décarbonisation. Nous pensons que les entreprises qui mènent la transition représentent une opportunité d’investissement vitale pour nos clients et que l’orientation des capitaux vers ces phénix sera essentielle pour parvenir à un monde net zéro.

Le capitalisme a le pouvoir de façonner la société et d’agir comme un puissant catalyseur de changement. Mais les entreprises ne peuvent pas le faire seules et elles ne peuvent pas être la police du climat. Ce ne sera pas un bon résultat pour la société. Nous avons besoin que les gouvernements fournissent des voies claires et une taxonomie cohérente pour la politique, la réglementation et la divulgation de la durabilité sur tous les marchés. Ils doivent également soutenir les communautés touchées par la transition, aider à catalyser les capitaux vers les marchés émergents et investir dans l’innovation et la technologie qui seront essentielles à la décarbonisation de l’économie mondiale.

C’est le partenariat entre le gouvernement et le secteur privé qui a conduit au développement de vaccins COVID-19 en un temps record. Lorsque nous exploitons le pouvoir des secteurs public et privé, nous pouvons réaliser des choses vraiment incroyables. C’est ce que nous devons faire pour atteindre le zéro net.

Donner aux clients le choix des votes en matière ESG

Le capitalisme des parties prenantes consiste à fournir des rendements durables et à long terme aux actionnaires. Et la transparence autour de la planification de votre entreprise pour un monde net zéro en est un élément important. Mais ce n’est qu’une des nombreuses divulgations que nous et d’autres investisseurs demandons aux entreprises de faire. En tant que gardiens du capital de nos clients, nous demandons aux entreprises de démontrer comment elles vont s’acquitter de leur responsabilité envers les actionnaires, notamment par le biais de pratiques et de politiques environnementales, sociales et de gouvernance saines.

En 2018, j’ai écrit que nous allions doubler la taille de notre équipe d’intendance et elle reste la plus importante de l’industrie. Nous avons constitué cette équipe afin que nous puissions comprendre les progrès de votre entreprise tout au long de l’année, et pas seulement pendant la saison des procurations. C’est à vous de tracer votre propre route et de nous dire comment vous avancez. Nous cherchons à comprendre l’éventail complet des problèmes auxquels vous êtes confrontés, pas seulement ceux qui font l’objet du bulletin de vote, mais aussi les éléments qui concernent votre stratégie à long terme.

Tout comme d’autres parties prenantes adaptent leurs relations avec les entreprises, de nombreuses personnes repensent leurs relations avec les entreprises en tant qu’actionnaires. Nous constatons un intérêt croissant parmi les actionnaires, y compris parmi nos propres clients, pour la gouvernance d’entreprise des sociétés ouvertes.

C’est pourquoi nous poursuivons une initiative visant à utiliser la technologie pour donner à un plus grand nombre de nos clients la possibilité d’avoir leur mot à dire sur la façon dont les votes par procuration sont exprimés dans les entreprises dans lesquelles leur argent est investi. Nous offrons maintenant cette option à certains clients institutionnels, y compris les fonds de pension qui font vivre 60 millions de personnes. Nous travaillons à élargir cet univers.

Nous nous engageons pour un avenir où chaque investisseur, même les investisseurs individuels, peut avoir la possibilité de participer au processus de vote par procuration s’il le souhaite.

Nous savons qu’il existe d’importants obstacles réglementaires et logistiques pour y parvenir aujourd’hui, mais nous pensons que cela pourrait apporter plus de démocratie et plus de voix au capitalisme. Chaque investisseur mérite le droit d’être entendu. Nous continuerons à poursuivre l’innovation et à travailler avec d’autres acteurs du marché et régulateurs pour faire avancer cette vision vers la réalité.

Bien sûr, de nombreux chefs d’entreprise sont responsables de la supervision des actifs en actions, que ce soit par le biais des fonds de pension des employés, des comptes de trésorerie d’entreprise ou d’autres investissements effectués par votre entreprise. Je vous encourage à demander à votre gestionnaire d’actifs de vous donner la possibilité de participer plus directement au processus de vote par procuration.

L’équipe Investment Stewardship de BlackRock reste au cœur de notre approche fiduciaire, et nombre de nos clients préfèrent que l’équipe continue de s’engager et d’exécuter le vote en leur nom. Mais fondamentalement, les clients devraient au moins avoir le choix et la possibilité de participer plus directement au vote.

Chez BlackRock, nous sommes convaincus que les entreprises sont plus performantes lorsqu’elles réfléchissent à leur rôle dans la société et agissent dans l’intérêt de leurs employés, clients, communautés et actionnaires.

Cependant, nous pensons également qu’il reste encore beaucoup à apprendre sur l’impact de la relation d’une entreprise avec ses parties prenantes sur la valeur à long terme. C’est pourquoi nous lançons un Center for Stakeholder Capitalism, pour créer un forum de recherche, de dialogue et de débat. Cela nous aidera à explorer davantage les relations entre les entreprises et leurs parties prenantes et entre l’engagement des parties prenantes et la valeur actionnariale. Nous réunirons des PDG, des investisseurs, des experts en politiques et des universitaires de premier plan pour partager leur expérience et livrer leurs idées.

Il n’est pas facile de répondre aux intérêts divergents des nombreuses parties prenantes divergentes d’une entreprise. En tant que PDG, je le sais de première main. Dans ce monde polarisé, les PDG auront invariablement un ensemble de parties prenantes exigeant que nous fassions une chose, tandis qu’un autre ensemble de parties prenantes exigera que nous fassions exactement le contraire.

C’est pourquoi il est plus important que jamais que votre entreprise et sa direction soient guidées par sa raison d’être. Si vous restez fidèle à l’objectif de votre entreprise et que vous vous concentrez sur le long terme, tout en vous adaptant à ce nouveau monde qui nous entoure, vous offrirez des rendements durables aux actionnaires et contribuerez à réaliser le pouvoir du capitalisme pour tous.


Notes de fin

1 Kushel R., Van Nostrand E., Weinberg C., Paul V., Tran Q., Kazdin J., Schwaiger K., Basu D., Segafredo L., Dieterich C., Seeking outperformance through sustainable insights, BlackRock, Octobre 2021, page 8. (retourner)

Traverser l’horizon : la gestion d’actifs nord-américaine dans les années 2020, McKinsey & Company, octobre 2021, page 34. (retourner)

Durabilité : Le changement tectonique transforme l’investissement, BlackRock, février 2020. (retourner)

4 Sources : Morningstar, Simfund, Broadridge. Les données incluent les fonds communs de placement durables, les ETF, les actifs sous gestion institutionnels et alternatifs, tels que définis par des sources de données tierces, à l’exclusion des indicateurs d’intégration/d’engagement. Données MF et ETF en date d’octobre 21, données institutionnelles et alternatives en date de juin 21. (retourner)

 

Devoirs de surveillance par le conseil d’administration : principaux domaines d’intervention pour 2022


Voici un excellent article de Holly J. Gregory, associé de Sidley Austin, publié sur le site de Harvard Law School Forum on Corporate Govenance, qui brosse un tableau très complet des actions, des devoirs et des obligations des administrateurs à l’aube de l’an 2022.

L’article résume clairement les devoirs de surveillance des administrateurs et met en évidence les problèmes susceptibles de nécessiter une attention particulière du conseil d’administration en 2022, notamment :

    • Stratégie et risque ;
    • Questions environnementales, sociales et de gouvernance (ESG) ;
    • Problèmes de capital humain et de main-d’œuvre ;
    • Engagement et activisme des actionnaires ;
    • Gestion de crise ;
    • Relations conseil-direction et culture du conseil.

Je vous invite à lire la version française de la publication effectuée par Google, que j’ai corrigée. Ce travail de correction est certainement encore perfectible, mais le résultat est très satisfaisant.

Bonne lecture !

Board Oversight: Key Focus Areas for 2022

 

Sidley Austin LLP (@SidleyLaw) / Twitter

 

Les conseils fonctionnent dans un environnement commercial complexe et dynamique dans lequel les attentes des parties prenantes et les demandes d’attention du conseil augmentent. Les défis de fonctionner pendant la pandémie de COVID-19 dans un environnement incertain continuent de se faire sentir alors que les entreprises anticipent une nouvelle normalité post-pandémique.

Les entreprises sont confrontées à des pressions sur plusieurs fronts, notamment la résistance au retour au travail en personne dans un marché des talents hautement concurrentiel, les goulots d’étranglement et l’inflation de la chaîne d’approvisionnement, le potentiel de ralentissement économique mondial et national et le risque accru de cyberattaques, d’événements climatiques inhabituels et l’action réglementaire (y compris l’application des lois antitrust et la fiscalité), le tout dans une atmosphère de contrôle accru de la surveillance du conseil d’administration.

S’assurer que les administrateurs sont bien placés pour s’acquitter de leur responsabilité de surveillance nécessite une évaluation périodique des priorités du programme du conseil et des structures, processus et contrôles connexes qui sont en place pour s’assurer que le conseil est bien informé en temps opportun des questions nécessitant son attention.

Devoir de surveillance

Bien que le conseil d’administration soit responsable, en vertu du droit des sociétés, de la direction et de la gestion de l’entreprise, il délègue généralement des pouvoirs importants au PDG et à la haute direction pour gérer l’entreprise. Une fois que le conseil a délégué de larges pouvoirs, sa principale responsabilité est de superviser le rendement de la direction (tout en s’occupant des domaines qui ne sont pas délégués à la direction, tels que les questions de gouvernance, la rémunération et la succession du chef de la direction, la rétention et la surveillance de l’auditeur indépendant, l’approbation des transactions majeures, détermination des versements de dividendes et modifications des statuts).

La surveillance du conseil implique l’enquête continue des administrateurs pour savoir si la délégation de pouvoirs du conseil à la direction est raisonnable et si le conseil a reçu des informations suffisantes et exactes de la direction pour prendre cette décision. Les domaines typiques de surveillance comprennent les initiatives stratégiques, la performance financière et l’intégrité des états financiers et des processus comptables et d’information financière, la gestion des risques et la conformité.

Les conseils d’administration ont la responsabilité d’identifier et de surveiller les risques et la conformité sur une base continue, et ils doivent le faire rigoureusement en ce qui concerne les risques critiques. Cela nécessite que le conseil comprenne les risques associés à la stratégie d’entreprise et aux opérations commerciales, les systèmes de gestion des risques et de conformité qui sont en place, et les systèmes d’information et de contrôle qui sont conçus pour porter les problèmes de risque et de conformité à l’attention de la direction et du conseil. Les conseils d’administration doivent être prêts à réagir aux problèmes de risque et de conformité au fur et à mesure qu’ils surviennent et doivent s’occuper de leur propre structure et de leurs propres processus de surveillance des risques et de la conformité.

La majorité des sociétés ouvertes confient la responsabilité de la surveillance de l’ensemble des risques d’entreprise à leurs comités d’audit, qui, comme l’exigent les normes de cotation en bourse, sont composés de personnes ayant des connaissances financières, mais qui peuvent ne pas avoir d’expérience avec les risques non financiers. Les comités de risque ou de conformité autonomes sont relativement rares, tout comme les comités axés uniquement sur l’environnement, la santé et la sécurité. Selon une enquête de 2020 de la National Association of Corporate Directors (NACD) auprès des entreprises de Russell 3000, environ 9 % des conseils d’administration ont des comités des risques, environ 4 % ont des comités de conformité distincts et 4 % ont des comités de l’environnement, de la santé et de la sécurité (NACD, Inside Public Company Boardroom (30 oct. 2020), disponible sur  nacdonline.org).

Les conseils d’administration doivent évaluer s’ils sont structurés de manière appropriée pour la surveillance des risques et de la conformité, et doivent également examiner périodiquement les systèmes d’information et de contrôle conçus pour garantir que les informations pertinentes sont portées à l’attention de la direction et du conseil d’administration en temps opportun. Compte tenu de sa charge de travail déjà lourde, le comité d’audit n’est peut-être pas idéalement placé pour se concentrer sur les risques critiques au niveau requis.

Stratégie et risque

Le conseil doit rester concentré sur la fourniture de conseils et de surveillance, la majorité de son temps étant réservée à la discussion de la stratégie d’entreprise et à l’évaluation de la qualité des performances de la direction, y compris l’accent mis par la direction sur la continuité des activités, les opportunités et les risques. Le conseil joue un rôle clé en aidant la direction à comprendre et à se concentrer sur les risques associés aux stratégies d’entreprise, aux moteurs de la performance de l’entreprise et à l’environnement commercial et politique, en déterminant l’appétit pour le risque de l’entreprise et en consacrant les ressources appropriées aux activités d’identification et de gestion des risques. À la lumière de la jurisprudence récente du Delaware mettant l’accent sur le rôle du conseil d’administration en ce qui concerne les risques critiques (voir l’encadré, Responsabilité des administrateurs en cas de défaillance de la surveillance), l’attention du conseil d’administration sur les moteurs fondamentaux de l’entreprise, les risques les plus critiques auxquels l’entreprise est confrontée et la manière dont ces forces peuvent être affectées devraient représenter, avec les questions stratégiques, une partie importante de l’ordre du jour du conseil.

Les questions de stratégie sont de plus en plus étroitement liées aux questions d’objet social et aux questions ESG (voir ci-dessous Objet social et questions  ESG). Par exemple, étant donné l’intense concentration des investisseurs et des régulateurs sur le changement climatique, les engagements des entreprises en faveur d’un bilan carbone zéro d’ici 2050 (ou avant) augmentent. Pour de nombreuses entreprises, le passage à un avenir neutre en carbone nécessitera un changement important dans les opérations, et peut même nécessiter la sortie de certaines activités. Les conseils d’administration, de concert avec la direction, devraient examiner les options et alternatives stratégiques, y compris la possibilité d’investir dans des secteurs d’activité alternatifs. De même, les préoccupations croissantes concernant les questions de confidentialité et de justice sociale peuvent avoir une importance stratégique pour les entreprises de certains secteurs.

Responsabilité des administrateurs pour manquement à la surveillance

Les administrateurs peuvent être tenus responsables s’ils n’exercent pas une surveillance. Bien que ce type d’action en justice ait généralement échoué, il survit plus fréquemment à une requête en irrecevabilité.

Par exemple, une réclamation pour manquement à la surveillance a récemment survécu à une requête en rejet dans  In re Boeing Co. Derivative Litigation  (2021 WL 4059934 [Del. Ch. 7 sept. 2021]). Cette décision fournit des indications sur les indicateurs de surveillance active des risques critiques que les tribunaux s’attendent à voir et qui, s’ils sont absents, appuient une réclamation contre les administrateurs. Dans  Boeing, les actionnaires ont allégué que les administrateurs de Boeing n’avaient pas supervisé les problèmes de sécurité liés aux problèmes logiciels des 737 MAX connus de la direction. Soutenus par les informations reçues de la société en réponse à une demande de livres et de registres et des chartes des comités accessibles au public, les actionnaires ont allégué que :

    • Aucun comité du conseil d’administration n’était spécifiquement chargé de superviser la sécurité des avions, et chaque charte de comité était muette en ce qui concerne la sécurité des avions.
    • Le comité d’audit s’est concentré sur les risques financiers et de production, et non sur les risques liés à la sécurité des avions.
    • Le processus de visibilité des risques d’entreprise supervisé par le comité d’audit s’est concentré sur les risques financiers et de production, et n’a pas spécifiquement mis l’accent sur la sécurité des avions.
    • Les mises à jour annuelles du conseil sur la conformité n’abordaient pas la sécurité des avions, et la sécurité des avions n’était pas un point régulier à l’ordre du jour des réunions du conseil.
    • La direction n’a pas fait rapport au conseil sur les problèmes de sécurité, et le conseil n’avait pas les moyens de recevoir les rapports internes et les plaintes concernant la sécurité, y compris les plaintes des dénonciateurs.

Le tribunal a estimé que les plaignants avaient invoqué des faits suffisants pour étayer les affirmations selon lesquelles le conseil d’administration avait complètement échoué à établir un système de rapport sur la sécurité des avions et avait ignoré les signaux d’alarme concernant les problèmes de sécurité des compagnies aériennes.

Début novembre 2021, une proposition de règlement entre les administrateurs actuels et anciens de Boeing et les actionnaires de la société a été déposée auprès du tribunal. Aux termes de ce règlement, les administrateurs paieraient 237,5 millions de dollars (largement couverts par une assurance), un montant record pour un cas d’échec de la surveillance. Le règlement proposé exige également que l’entreprise ait au moins trois administrateurs ayant une expérience liée à la sécurité et un administrateur supplémentaire ayant une expertise en matière d’aviation/aérospatiale, d’ingénierie ou de surveillance de la sécurité des produits dans un délai d’un an.

Le conseil doit :

    • Veiller à ce qu’une proportion considérable du temps du conseil soit consacrée aux questions stratégiques, y compris les plans et transactions stratégiques spécifiques, et l’orientation plus large à long terme de l’entreprise.
    • Considérer avec la direction quelles opportunités sont susceptibles d’émerger dans l’environnement actuel, comment les questions d’objet social et d’ESG sont liées à la stratégie d’entreprise, et quelles opportunités et quels risques découlent de l’attention accrue portée aux intérêts des parties prenantes et à l’ESG, y compris le changement climatique.
    • Comprendre les risques associés aux décisions stratégiques et aux opérations, ainsi que les processus mis en place par la direction pour identifier, surveiller et gérer les risques.
    • Surveiller la performance de la direction dans la mise en œuvre de la stratégie et la gestion des risques associés.
    • Obtenir un jugement commercial bien informé sur les risques de conformité, de sécurité ou d’autres qui pourrait être critique pour la mission.
    • Déterminer si le conseil a clairement délégué à un comité la responsabilité d’aider à la surveillance des risques critiques. Les chartes des comités devraient manifestement refléter cette responsabilité, et les membres des comités devraient avoir une expérience appropriée (ou avoir accès à une expertise appropriée) et recevoir des informations pertinentes.
    • Examiner les processus de rapport qui garantit que les informations sur les risques critiques (y compris la conformité) sont portées à l’attention du conseil et des comités d’une manière claire, facile à comprendre et ne dépend pas indûment de la discrétion de la direction. Le conseil devrait envisager de faire appel à un tiers pour l’aider à examiner ces systèmes d’information et de contrôle.
    • Discuter régulièrement des risques et de la conformité, y compris des risques critiques, lors des réunions du conseil et des comités, le conseil examinant la gestion des risques d’entreprise et les risques critiques de l’entreprise au moins une fois par an.
    • S’assurer que les ordres du jour, les procès-verbaux et les documents de réunion du conseil et des comités reflètent les discussions sur les problèmes de risque et de conformité liés à la surveillance continue, aux examens périodiques et aux analyses plus approfondies, ainsi qu’aux situations spéciales.
    • Tenir la direction responsable de la création et du maintien d’une culture d’entreprise qui donne la priorité à la réalisation de l’objectif de l’entreprise avec intégrité et professionnalisme, et pour la mise en œuvre et le maintien de systèmes de conformité, de gestion des risques et d’information et de contrôle adaptés à l’objectif.

Objet de l’entreprise et questions ESG

Dans un environnement d’attentes croissantes concernant le rôle des entreprises dans la société, les conseils d’administration doivent rester concentrés sur le fait que l’entreprise innove en fournissant des biens et des services d’une manière qui réponde aux attentes équitables d’un éventail de parties prenantes. La rhétorique de la primauté des actionnaires est remplacée par une reconnaissance plus large que, pour que les actionnaires profitent à long terme, un éventail d’autres parties prenantes et intérêts doivent être satisfaits (voir Business Roundtable, Statement on the Purpose of a Corporation (19 août 2019) , disponible sur  businessroundtable.org ; pour plus d’informations, consultez  The  Corporate Purpose Debate et The Modern Standard for  Corporate Responsibility : Business Roundtable’s Redéfinition  on Practical Law).

Ce changement n’a pas modifié la responsabilité juridique des administrateurs. Les obligations fiduciaires d’agir dans le meilleur intérêt de l’entreprise et de ses actionnaires restent les mêmes. Cependant, les administrateurs disposent d’un pouvoir discrétionnaire considérable (en dehors des transactions de vente de contrôle) pour prendre en compte les intérêts des non-actionnaires, tant qu’il existe un lien plausible avec un objectif commercial rationnel qui vise en fin de compte à profiter à la société et à ses actionnaires sur le long terme.

La vision plus large de l’objet social est liée à l’intérêt croissant des investisseurs, des clients, des employés et des régulateurs pour les questions ESG. Les préoccupations concernant le changement climatique, la pandémie de COVID-19 et les inégalités raciales et autres ont attiré l’attention sur les problèmes environnementaux et sociaux. De nombreuses parties prenantes se tournent vers les entreprises pour les aider à trouver des solutions (pour plus d’informations, consultez Aborder  les  problèmes de justice sociale : Implications pour le Conseil sur le droit pratique). Le fait de relier ces efforts à l’objectif et aux stratégies uniques de l’entreprise contribuera à garantir que ces activités sont entreprises conformément aux meilleurs intérêts de l’entreprise et à l’amélioration de la valeur à long terme pour les actionnaires.

La manière dont une entreprise aborde les questions ESG est de plus en plus perçue comme liée à sa résilience face aux crises et à sa capacité à créer de la valeur sur le long terme, et comme un enjeu stratégique. Dans leur examen de la stratégie d’entreprise, les conseils d’administration et la direction doivent évaluer comment les problèmes ESG, tels que le changement climatique, la confidentialité ou d’autres préoccupations sociales, pourraient avoir un impact sur l’entreprise et les options pour résoudre ces problèmes.

L’augmentation spectaculaire de l’intérêt et du soutien des investisseurs pour les initiatives ESG et la divulgation accrue de ces initiatives ne montrent aucun signe de ralentissement. Les investisseurs continuent de rechercher une plus grande transparence sur les questions ESG, et tant les investisseurs que les conseillers en vote scrutent la divulgation. Les propositions des actionnaires sur les questions ESG reçoivent un plus grand nombre de votes, et les actionnaires activistes soulignent les vulnérabilités ESG dans leurs campagnes, y compris le manque d’expertise au sein du conseil d’administration concernant les principaux risques ESG.

De nombreux grands investisseurs institutionnels pensent qu’une bonne performance sur les questions ESG est liée à la création de valeur, et ils cherchent plus fréquemment à s’engager avec les entreprises sur les questions d’environnement et de diversité, d’équité et d’inclusion (DEI). Ils sont plus nombreux que par le passé à voter en faveur des propositions d’actionnaires environnementaux et sociaux, ce qui explique le nombre record de ces propositions qui ont reçu un soutien majoritaire en 2021. Parmi les propositions d’actionnaires environnementales et sociales votées jusqu’au 30 juin 2021, 20 % ont reçu un soutien majoritaire, contre 12 % en 2020 (EY Americas Center for Board Matters, What Boards Should Know About ESG Developments in the 2021 Proxy Season (3 août 2021), disponible sur  ey.com). Les investisseurs votent également contre les administrateurs en raison de problèmes ESG, tels que leur incapacité à agir sur les problèmes climatiques, un manque de diversité au sein du conseil d’administration, un excès de vitesse ou un manque d’indépendance.

L’entreprise doit faire particulièrement attention à sa divulgation ESG pour garantir l’exactitude, car une divulgation inexacte peut donner lieu à des mesures d’exécution de la SEC et à des allégations de fraude en valeurs mobilières (affirmant qu’un engagement ESG déclaré était faux en raison de l’incapacité à prendre des mesures conformes à l’engagement), et sera également examiné par des actionnaires activistes (pour plus d’informations, consultez  Oversight of EESG Disclosure  on Practical Law).

Le conseil doit :

    • Comprendre comment la direction s’assure que les considérations des parties prenantes et les questions ESG sont intégrées dans les décisions stratégiques et commerciales, ainsi que dans la gestion des risques de l’entreprise. Cela comprend l’examen des mesures pour mesurer les performances par rapport aux objectifs, en veillant à ce que les contrôles et procédures de divulgation soient conçus pour soutenir à la fois la divulgation ESG volontaire et obligatoire, et la mesure dans laquelle la rémunération de la direction devrait inclure un élément de la rémunération incitative ESG.
    • Examinez comment le conseil, y compris les comités du conseil, assure une surveillance appropriée des questions ESG.
    • Envisager d’articuler une déclaration d’objectif spécifique à l’entreprise qui décrit comment les biens ou services fournis par l’entreprise, et les activités d’entreprise connexes, servent les intérêts des parties prenantes et le bien social au sens large, et réfléchissez à la manière d’utiliser cet objectif articulé comme un guide pour les décisions d’entreprise.
    • Discuter avec la haute direction des points suivants :
      • visualiser l’objet spécifique de l’entreprise ;
      • prendre en compte les intérêts des principales parties prenantes (telles que les clients, les fournisseurs et les employés) dans la poursuite d’actions dans le meilleur intérêt à long terme de l’entreprise et de ses actionnaires ; et
      • s’engager et communiquer sur ces questions avec les principales parties prenantes.
    • Discuter avec la direction des autres points suivants :
      • leurs efforts pour réévaluer les pratiques commerciales afin d’identifier les pratiques non intentionnellement discriminatoires, par exemple, dans le traitement des clients ;
      • les contours et les objectifs des efforts ESG, y compris le soutien à l’éducation, aux soins de santé, à la sécurité alimentaire, à la diversité des fournisseurs et à la justice sociale ; et
      • la divulgation ESG et les considérations relatives à l’importance relative dans les documents de l’entreprise auprès de la SEC, dans les rapports de responsabilité d’entreprise ou de développement durable et sur le site Web de l’entreprise.
    • Établir des normes et des politiques concernant la durabilité et la responsabilité sociale, y compris les questions environnementales, le lobbying et les contributions politiques, et les droits de l’homme.
    • Rester informé des développements et des tendances en matière de divulgation ESG, y compris les déclarations et les directives de la SEC, les déclarations d’investisseurs institutionnels importants, les tendances des propositions d’actionnaires, les activités des normalisateurs non gouvernementaux, l’analyse comparative des sociétés homologues et la législation fédérale.

Problèmes de capital humain et de main-d’œuvre

La pandémie de COVID-19, ainsi que le passage à une économie fondée sur la connaissance, ont mis en évidence la valeur du capital humain et déclenché des changements dans les besoins des entreprises, les préférences de travail, le marché du capital humain et les risques associés (par exemple, la cybersécurité et la conformité). Les questions de gestion du capital humain sont essentielles à la culture d’entreprise et constituent un domaine clé de la surveillance du conseil d’administration. Ces problèmes comprennent :

    • Gestion des talents, y compris le recrutement, la promotion et la rétention des employés.
    • Santé et sécurité des employés.
    • Rémunération et avantages sociaux équitables, y compris le salaire minimum, l’équité salariale et les congés payés.
    • DEI à tous les niveaux de l’entreprise.
    • Actions de formation et de développement de carrière.
    • Problèmes de gestion de la main-d’œuvre, y compris les licenciements.
    • Efforts pour lutter contre la discrimination, le harcèlement et l’intimidation.
    • Traitement des lanceurs d’alerte.

Les mesures du capital humain continueront d’être un objectif majeur au cours de la saison des procurations 2022, étant donné le niveau élevé d’intérêt des investisseurs pour ces questions et la divulgation accrue des ressources en capital humain requise par les récentes modifications apportées à la réglementation. Cela comprend une discussion sur les mesures ou les objectifs du capital humain sur lesquels l’entreprise se concentre dans la gestion de ses activités, dans la mesure où cela est important pour une compréhension de l’activité de l’entreprise prise dans son ensemble.

De plus, la relève de la direction continue d’être une priorité clé du conseil, et les conseils devraient examiner les plans de relève d’urgence pour le PDG et les autres postes de direction clés pour s’assurer qu’ils sont à jour.

Le conseil doit :

    • Comprendre à travers des discussions avec la direction comment le marché actuel des talents affecte l’entreprise, y compris l’impact des politiques de retour au travail, et comment la direction résout les difficultés ou les pénuries de main-d’œuvre, y compris les plans d’investissement dans la formation, les salaires et les avantages sociaux des travailleurs.
    • Donner le ton au sommet grâce à des communications et des politiques conçues pour protéger le bien-être des employés et soutenir DEI.
    • Discuter avec la direction de leurs efforts pour :
      • améliorer le DEI dans la main-d’œuvre, y compris aux niveaux supérieurs, et l’équité salariale et des chances (telle que l’accès à la formation et aux promotions) ; et
      • protéger l’entreprise contre les pratiques discriminatoires dans l’embauche, la rémunération et la promotion des employés.
    • Concentrez-vous sur la culture d’entreprise, en mettant l’accent sur les attentes selon lesquelles la direction favorisera au sein de l’entreprise une culture de comportement éthique, d’utilisation équitable, de respect de la DEI et d’intégrité.
    • Superviser les efforts de la direction pour éduquer le personnel sur le code de conduite de l’entreprise et les normes de comportement attendues.
    • Déterminer les incitations appropriées pour attirer et retenir les dirigeants et aligner les cadres clés sur les attentes de performance.
    • Déterminez si les plans d’incitation doivent être retravaillés pour s’assurer que les comportements appropriés sont encouragés.

Engagement et activisme des actionnaires

Il incombe aux conseils d’administration et aux équipes de direction d’informer et de dialoguer avec les actionnaires sur l’objectif et la stratégie de l’entreprise, les décisions clés du conseil d’administration et les justifications de ces décisions. L’engagement offre une opportunité de mieux comprendre les points de vue des actionnaires, ce qui peut être utile pour formuler des approches de la stratégie d’entreprise, des questions ESG et d’autres questions. Bien que les administrateurs doivent tenir compte des points de vue des actionnaires, ils ne peuvent pas s’en remettre à ces points de vue, mais doivent toujours porter des jugements commerciaux éclairés qu’ils croient être dans le meilleur intérêt de la société.

L’un des avantages de l’établissement de la confiance et des relations avec les actionnaires clés sur la base de la transparence et de la compréhension est que les actionnaires peuvent être plus disposés à soutenir le conseil d’administration et la direction face à l’activisme des actionnaires et à d’autres pressions. Avec une volatilité accrue du marché boursier et alors que les trésors de guerre des fonds spéculatifs continuent de croître, les activités d’OPA hostiles et les autres menaces d’activisme des actionnaires augmentent. Les conseils d’administration peuvent s’attendre à ce que les militants exploitent la vulnérabilité accrue des entreprises cibles. Il en va de même pour les offres publiques d’achat non sollicitées d’acheteurs stratégiques bien capitalisés.

Le conseil d’administration doit s’assurer que l’entreprise est en mesure de réagir, notamment par le biais d’un examen de la prise de contrôle et de la préparation des activistes avec des conseillers financiers et juridiques. Cela comprend un examen pour s’assurer que l’entreprise dispose d’une équipe et de protocoles de communication appropriés, de protections réglementaires à la pointe de la technologie et d’une pilule empoisonnée à jour (pour plus d’informations, consultez Actionnariat des actionnaires et  Défenses contre les prises de contrôle — liste de contrôle sur le droit pratique). Si l’entreprise est approchée par un activiste, le conseil d’administration et la direction doivent tenir compte des problèmes qu’ils soulèvent et ne pas automatiquement passer en mode défensif.

Le conseil doit :

    • Superviser activement et participer, le cas échéant, à l’engagement avec les actionnaires clés, en mettant l’accent sur l’écoute et l’apprentissage des points de vue des actionnaires et le développement de relations durables.
    • Chercher à comprendre le point de vue des actionnaires clés sur l’objet de l’entreprise, qui est souvent lié aux questions ESG, telles que le changement climatique, l’IEI et la culture d’entreprise.
    • Rester informé des points de vue des conseillers en vote (sans supposer qu’ils reflètent nécessairement les points de vue des actionnaires de la société).
    • Considérer avec la direction comment divers types d’actionnaires activistes sont susceptibles de percevoir l’entreprise, y compris ses stratégies et ses pratiques de gouvernance, afin d’identifier les vulnérabilités.
    • Confirmer que la direction surveille les changements dans la propriété des actions.
    • Mettre à jour ou activer les plans de préparation de la défense avec la direction, notamment en identifiant un avocat spécial pour la lutte par procuration, en examinant les défenses structurelles, en mettant une pilule empoisonnée en place et en élaborant un plan de communication efficace.

Gestion de crise

Chaque conseil d’administration est susceptible de faire face à une crise qui l’oblige à s’impliquer plus activement dans la supervision de la réponse de la direction ou même dans l’élaboration et la mise en œuvre de la réponse elle-même si la crise implique des problèmes d’intégrité, de crédibilité ou de capacité de gestion. Pour préparer l’entreprise à réagir rapidement et avec assurance à une crise provoquée par des événements externes ou internes, le conseil d’administration et la direction doivent prendre en compte les sources de crises potentielles et élaborer des plans pour y faire face. L’intégration de la préparation aux crises dans le conseil d’administration et la culture d’entreprise peut aider à réduire les tensions inévitables qui surviennent lorsqu’une entreprise est soumise à une pression importante.

Dans la plupart des cas, la direction abordera la crise au jour le jour et gérera les communications liées à la crise, mais le conseil d’administration doit s’attendre à se réunir plus fréquemment et à être tenu au courant. Les administrateurs doivent comprendre ce qui est connu et ce qui ne l’est pas encore, ce que la direction fait pour approfondir l’enquête, qui est l’équipe de crise à la fois au sein de la direction et par rapport aux conseillers clés, et ce que la direction prévoit de transmettre dans ses communications et ses messages de haut niveau. Le conseil (et la direction) devrait éviter de faire des déclarations qui supposent un résultat positif avant d’avoir une visibilité totale sur la situation.

Cependant, dans les questions impliquant des conflits d’intérêts ou d’intégrité de la direction, le conseil doit jouer un rôle plus actif, généralement par l’intermédiaire d’un comité actuel ou spécial composé d’administrateurs indépendants et désintéressés (non conflictuels). Le conseil devrait engager des avocats et éventuellement d’autres conseillers, diriger les avocats dans l’enquête sur les faits et éviter de faire des déclarations au début de l’enquête sur la confiance dans la direction ou un résultat positif présumé.

En cas de crise, le conseil d’administration doit veiller à ce que le secret professionnel de l’avocat ne soit pas levé (dans la mesure appropriée). Les régulateurs et les auditeurs peuvent s’attendre à être informés dès le début du problème et de ce que l’entreprise fait pour enquêter, et le conseil d’administration devrait demander conseil à un conseiller juridique à ce sujet. Il convient également de réfléchir à la manière de dialoguer avec les employés, les clients, les fournisseurs, les régulateurs et les actionnaires, afin que l’entreprise parle d’une seule voix. Une fois que tous les faits sont connus et que la crise immédiate a été résolue (notamment par le biais de rapports aux régulateurs, de mesures disciplinaires ou les deux), le conseil d’administration doit déterminer si les systèmes de conformité ou de contrôle doivent être renforcés.

Pour se préparer à une crise, le conseil devrait :

    • Déterminez si l’entreprise a :
      • des plans de continuité des activités adaptés aux risques potentiels de perturbation identifiés, notamment par le biais d’une discussion avec la direction sur les éventualités pertinentes. Le conseil devrait continuellement réévaluer l’adéquation des plans à la lumière des développements ; et
      • un plan de gestion de crise à jour pour aider l’entreprise à réagir de manière appropriée, sans sous-réagir ni surréagir.
    • Veiller à ce qu’il puisse agir efficacement en cas de crise en adoptant des structures et des pratiques de gouvernance qui soutiennent une culture du conseil d’administration dans laquelle un consensus peut être facilement atteint après une discussion approfondie et éclairée, les points de vue indépendants sont respectés et valorisés et la confidentialité est protégée.

Relations conseil-direction et culture du conseil

Bien que le conseil d’administration surveille le rendement de la direction et fournisse une orientation, il doit également servir de caisse de résonance pour la direction afin de tester et d’affiner les idées et de ressource pour l’expertise. Des relations solides entre le conseil et la direction nécessitent des concessions mutuelles constructives et respectueuses, une reconnaissance de la distinction entre les rôles du conseil et de la direction, et une transparence fondée sur l’attente que la direction annonce rapidement de mauvaises nouvelles. Le conseil d’administration doit développer une relation de travail solide avec le PDG et les autres membres de l’équipe de direction, tout en étant capable de fournir des conseils et des critiques constructifs.

De même, le conseil doit développer sa propre culture de confiance, de respect et d’ouverture. La capacité d’exercer un jugement objectif et d’exprimer et de considérer divers points de vue tout en travaillant vers un consensus est nécessaire. Dans le cadre de leurs processus annuels d’évaluation et de renomination, les conseils devraient déterminer si leur composition est appropriée ou nécessite un rafraîchissement. La composition et le rafraîchissement du conseil d’administration font l’objet d’une surveillance accrue de la part des actionnaires (y compris des militants), qui accordent une plus grande attention aux qualifications et à la diversité des administrateurs, et examinent attentivement la divulgation de l’entreprise sur ce sujet. Les grands investisseurs institutionnels continuent de considérer la diversité des conseils d’administration comme une priorité clé, et divers états américains et le NASDAQ ont imposé des exigences de diversité aux conseils d’administration.

Le conseil doit :

    • Assurer la clarté de la délégation de pouvoirs à la direction, de la communication des attentes en matière de performance et des structures de rémunération incitative connexes.
    • Offrir à la direction le bénéfice de l’expertise collective du conseil, sans oublier que le conseil supervise la direction et il ne doit pas dicter des actions qui relèvent clairement de la compétence de la direction.
    • Recruter des administrateurs hautement qualifiés possédant une expertise pertinente et capables de respecter l’engagement de temps requis, en tenant compte des considérations de diversité.
    • Envisager des mécanismes de renouvellement du conseil d’administration, y compris des limites d’âge et de mandat, et examiner les évaluations individuelles des administrateurs.
    • Éviter de considérer la décision de renomination comme une fatalité et fondez les décisions de renomination sur une évaluation de l’expertise pertinente, de la capacité à prendre le temps nécessaire et des performances réelles.
    • Évaluer le leadership du conseil d’administration et des comités, et envisager la rotation des postes de direction et des membres des comités, en veillant à ce que le leadership soit en place pour fournir un contrepoids solide, mais favorable à la direction.

 

Top 10 des billets publiés sur Harvard Law School Forum au 4 novembre 2021


Voici, comme à l’habitude, le compte rendu hebdomadaire du forum de la Harvard Law School sur la gouvernance corporative au 4 novembre 2021.

Cette semaine, j’ai relevé les dix principaux billets.

Bonne lecture !

 

Free Vector | Neon top ten sign

 

  1. Disrupting the Disruptors? The “Going Public Process”in Transition
  2. Carbon Zero and the Board
  3. Racial Equity Audits:A New ESG Initiative
  4. The Current State of Human Capital Disclosure
  5. Common Ownership, Executive Compensation, and Product Market Competition
  6. ISS’Annual Policy Survey Results
  7. The State of U.S. Sustainability Reporting
  8. Lucian Bebchuk and the Study of Corporate Governance
  9. SEC Reopens Comment Period for Dodd-Frank Clawback Rule
  10. Mandating Disclosure of Climate-Related Financial Risk

Top 10 des billets publiés sur Harvard Law School Forum au 14 octobre 2021


Voici, comme à l’habitude, le compte rendu hebdomadaire du forum de la Harvard Law School sur la gouvernance corporative au 14 octobre 2021.

Cette semaine, j’ai relevé les dix principaux billets.

Bonne lecture !

Ensemble Des Dix Meilleures étiquettes | Vecteur Gratuite

 

  1. SEC Form 10-K Comments Regarding Climate-Related Disclosures
  2. Data Governance Tips for Companies Following SEC’s In re App Annie
  3. Questions to Ask Before Forming a New Board Committee
  4. Crisis Management in the Era of “No Normal”
  5. 2022 Proxy and Annual Report Season
  6. Banking-Crisis Interventions, 1257-2019
  7. Sustainability Impact in Investor Decision-Making
  8. Just Say No? Shareholder Voting on Securities Class Actions
  9. Special Committee Report
  10. Comment on Climate Change Disclosures

Top 10 des billets publiés sur Harvard Law School Forum au 29 juillet 2021


Voici, comme à l’habitude, le compte rendu hebdomadaire du forum de la Harvard Law School sur la gouvernance corporative au 29 juillet 2021.

Cette semaine, j’ai relevé les dix principaux billets.

Bonne lecture !

Harvard Law -Tesla's Governance Record & ESG | Blog | Truvalue Labs

  1. EESG Activism After ExxonMobil
  2. Corporate Governance in the Face of an Activist Investor
  3. Commenters Weigh in on SEC Climate Disclosures Request for Public Input
  4. SEC Increasingly Turns Focus Toward Strength of Cyber Risk Disclosures
  5. Connecting the Dots: Breaking the ESG Code
  6. Buybacks: Look Before You Leap
  7. Stewardship Excellence: ESG Engagement In 2021
  8. Voluntary Environmental and Social Disclosures
  9. Spotlight on Boards and Board Oversight of Business Strategy and Risk Management in a Post-Pandemic World
  10. Does Socially Responsible Investing Change Firm Behavior?

Top 10 des billets publiés sur Harvard Law School Forum au 21 mai 2021


Voici, comme à l’habitude, le compte rendu hebdomadaire du forum de la Harvard Law School sur la gouvernance corporative au 21 mai 2021.

Cette semaine, j’ai relevé les dix principaux billets.

Bonne lecture !

Top Ten Reasons to Work With A Neal Estate Team Buyer Specialist

  1. Cybersecurity Oversight and Defense — A Board and Management Imperative
  2. Materiality: The Word that Launched a Thousand Debates
  3. Do ESG Funds Make Stakeholder-Friendly Investments?
  4. Which Corporate ESG News Does the Market React To?
  5. The Lipton Archive
  6. Mitigating SPAC Enforcement and Litigation Risks
  7. Human Capital Disclosure: What Do Companies Say About Their “Most Important Asset”?
  8. Is Public Equity Deadly? Evidence from Workplace Safety and Productivity Tradeoffs in the Coal Industry
  9. The Case for a Best Execution Principle in Cross-Border Payments
  10. 2021 Proxy Season Issues and Early Voting Trends

Top 10 des billets publiés sur Harvard Law School Forum au 22 avril 2021


Voici, comme à l’habitude, le compte rendu hebdomadaire du forum de la Harvard Law School sur la gouvernance corporative au 22 avril 2021.

Cette semaine, j’ai relevé les dix principaux billets.

Bonne lecture !

AHLA - Top Ten Issues in Health Law 2021

  1. Interest in SPACs is Booming…and So is the Risk of Litigation
  2. Statement by Commissioner Peirce on Rethinking Global ESG Metrics
  3. Integrating Sustainability and Long Term Planning for the Biopharma Sector
  4. When Disclosure Is The Better Part of Valor: Lessons From The AT&T Regulation FD Enforcement Action
  5. How Boards Can Get Human Capital Management Right in Five (Not So) Easy Steps
  6. SEC Approves NYSE’s Amended “Related Party” and “20%” Stockholder Approval Rules
  7. The Activism Vulnerability Report Q4 2020
  8. The Giant Shadow of Corporate Gadflies
  9. Was Milton Friedman Right about Shareholder Capitalism?
  10. A New Theory of Material Adverse Effects

Top 10 des billets publiés sur Harvard Law School Forum au 26 mars 2021


Voici, comme à l’habitude, le compte rendu hebdomadaire du forum de la Harvard Law School sur la gouvernance corporative au 26 mars 2021.

Cette semaine, j’ai relevé les dix principaux billets.

Bonne lecture !

Le Classement Doré Isolé Main écrit Le Mot TOP TEN Classement Clip Art Libres De Droits , Vecteurs Et Illustration. Image 84666394.

  1. Equality Metrics
  2. SEC Announces It Will Aggressively Scrutinize Issuers’ Climate Change Disclosure
  3. Gensler and SEC’s 2021 Examination Priorities Highlight ESG and Climate Risk
  4. Corporate Officers Face Personal Liability for Steering Sale of the Company to a Favored Buyer
  5. BlackRock’s 2021 Engagement Priorities
  6. Are Women Underpriced? Board Diversity and IPO Performance
  7. Activist Shareholder Proposals and HCM Disclosures in 2021
  8. Protests from Within: Engaging with Employee Activists
  9. Behavioral Psychology Might Explain What’s Holding Boards Back
  10. The Distribution of Voting Rights to Shareholders

Top 10 des billets publiés sur Harvard Law School Forum au 4 mars 2021


Voici, comme à l’habitude, le compte rendu hebdomadaire du forum de la Harvard Law School sur la gouvernance corporative au 4 mars 2021.

Cette semaine, j’ai relevé les dix principaux billets.

Bonne lecture !

 

Top 10 Global Consumer Trends 2020 | Research World

 

  1. The Capital Markets Tug-of-War Between US and China
  2. How Boards Can Prepare for Activism’s Next Wave
  3. An Introduction to Activist Stewardship
  4. Biden’s “Money Cop” to Shine a Light on ESG Disclosure
  5. Climate Risk and the Transition to a Low-Carbon Economy
  6. Gender Quotas and Support for Women in Board Elections
  7. 2021 Global and Regional Trends in Corporate Governance
  8. 2021 Compensation Committee
  9. Proxy Advisory Firms Release First Reports on Latest Best Practices
  10. Duty and Diversity

La gouvernance des entreprises progressistes


Aujourd’hui, je vous présente la gouvernance des entreprises vue sous l’angle de la prééminence de la raison d’être économique ET sociale.

André Coupet et Philippe Carpentier ont accepté d’agir à titre d’auteurs invités sur mon blogue en gouvernance, et je les remercie énormément.  La perspective exprimée dans leur modèle innovant est très inspirante pour les gestionnaires prêts à envisager une nouvelle façon de concevoir la gouvernance et le management des entreprises, en tenant compte des parties prenantes.

Leur article fait partie intégrante de l’ouvrage publié récemment par André Coupet « Vers Une Entreprise Progressiste, le modèle pour basculer dans un capitalisme humaniste au service des parties prenantes » (1).

Après avoir exercé le métier de conseil en stratégie à Montréal et à Paris, au sein du Groupe SECOR, André Coupet* se concentre sur le modèle de l’entreprise progressiste. Élaboré en collaboration avec le Groupement des chefs d’entreprise du Québec et des think tanks français, ce modèle s’inscrit dans la raison d’être de l’auteur : « Inciter les chefs d’entreprise à mettre leur organisation au service d’un monde meilleur ».

Philippe Carpentier** est associé et conseiller stratégique de la firme Brio Conseils pour laquelle il réalise, depuis plusieurs années, des transformations d’entreprises complexes, en collaboration étroite de hauts dirigeants. Ses interventions touchent notamment des restructurations, des expansions géographiques, des fusions et des acquisitions, de nouveaux positionnements, la création ou le repositionnement d’unités d’affaires, le changement de leadership, la nouvelle gouvernance, etc.

Bonne lecture. Vos commentaires sont les bienvenus !

GOUVERNANCE DE L’ENTREPRISE PROGRESSISTE

par
 André COUPET* et Philippe CARPENTIER**

 

Entreprise Progressiste | Un modèle capitaliste et humaniste

 

De plus en plus de dirigeants sont aujourd’hui convaincus que la maximisation de la valeur au seul bénéfice des actionnaires a créé d’immenses déséquilibres économiques et sociaux dans nos sociétés tout en ne garantissant pas l’utilisation optimale des ressources disponibles sur la planète.

Désormais, beaucoup d’entre eux s’intéressent à la RSE ou aux nouveaux modèles d’entreprise relevant de la « Purpose Economy » (2) aux États-Unis, ou du phénomène B-CORP présent non seulement aux États-Unis, mais aussi au Canada et en Europe, ou encore du récent mouvement des « Entreprises à Mission » en France.

Stimulants, ces modèles sont toutefois peu diserts sur le thème de la stratégie et surtout celui de la Gouvernance, sujet délicat puisqu’il s’agit de définir qui détient le pouvoir et comment celui-ci s’exercera. Nous proposons ci-après une nouvelle façon de concevoir la gouvernance, cette proposition ne pouvant se comprendre qu’en revisitant le modèle de l’Entreprise Progressiste, présenté initialement dans la Revue Gestion (3) à l’automne 2016. S’appuyant sur le vécu de femmes et d’hommes d’affaires sollicités par André COUPET au sein de divers think tanks, Terra Nova et Entreprise et Progrès en France, et le Groupement des Chefs d’Entreprise du Québec, ce modèle innovant est ancré dans une réalité vécue par des entreprises voulant faire autrement tout en étant parfaitement rentables (4).

L’entreprise progressiste : Cinq Composantes interreliées

 

L’entreprise progressiste allie l’économie et l’humanisme dans sa raison d’être, dans son éthique, dans sa stratégie et dans sa gouvernance. Bien commun, l’entreprise progressiste se veut profitable : le profit permet de créer de la valeur pour l’ensemble de ses parties prenantes ; il est un moyen au service d’une fin (« Purpose before profit »). Volontaire, l’entreprise progressiste se différencie de ses concurrentes par sa contribution à la Société, contribution positive apportant du sens aux clients de l’entreprise et à tous les acteurs et partenaires qui participent à la création de valeur.

Concrètement, le modèle de l’entreprise progressiste se structure autour de 5 composantes :

1— Une Raison d’être économique ET sociétale

 

La raison d’être d’une entreprise définit ce pourquoi celle-ci existe, ce qu’elle apporte de fondamentalement utile à ses clients Et à la société, et ce, si possible, de façon distinctive. Au-delà des offres, de la technologie et même du domaine d’intervention, la raison d’être cible une préoccupation reliée à la Société. Au domaine choisi s’ajoute une contribution à la construction d’un monde meilleur.

Danone résume ainsi sa raison d’être en une phrase : « apporter la santé par l’alimentation au plus grand nombre » ; la formule « Du bonheur à l’intérieur et à l’extérieur » que véhicule PRANA, un distributeur canadien d’aliments biologiques et certifiés sans OGM, illustre bien cette vision qui va bien au-delà du produit.

2— Des valeurs humanistes

 

L’éthique d’une entreprise au service du bien commun peut se définir autour des 4 valeurs clés de l’humanisme : le respect, l’équité, l’honnêteté et l’ouverture à l’autre (bienveillance, diversité, altruisme…). Inscrites dans le processus décisionnel, ces valeurs débouchent sur un management participatif, libéré, et sur des modes d’organisation plus horizontaux, plus propices à la mobilisation de tous les acteurs.

3— Une Stratégie intégrée

 

Il n’y a pas un Plan d’affaires d’un côté avec ses objectifs économiques (Chiffre d’affaires, marge, part de marché…) et une démarche environnementale et sociétale de type RSE de l’autre comme si celle-ci venait corriger, adoucir la stratégie. L’aspect sociétal de la raison d’être est intégré dans le modèle d’affaires en s’inspirant de concepts issus de l’économie circulaire, du commerce équitable ou plus efficacement encore de l’économie de la fonctionnalité qui est centrée sur l’utilité et l’usage du produit plutôt que sur la propriété et l’achat : le manufacturier de voitures se lancera dans la location de voitures ou même l’autopartage.

Une stratégie intégrée débouche naturellement sur une performance globale où le profit et les indicateurs économiques font cause commune avec les indicateurs « sociétaux », du niveau d’engagement des employés à la proportion d’énergie renouvelable utilisée tout au long de la chaîne de valeur en passant par le taux de satisfaction des fournisseurs ou la création d’emplois dans la communauté…

4— Une création de valeur partagée

 

Traditionnellement, les exercices de définition de la stratégie, qui visent à maximiser le retour aux actionnaires, passent par une « proposition de valeur » attractive, unique si possible, en faveur des clients : Amazon ou Ryan Air font cela très bien sans être des entreprises progressistes puisque les autres parties prenantes, employés, fournisseurs, territoire…, font plutôt l’objet d’une extraction de valeur sans contrepartie.

La stratégie de l’entreprise progressiste définit, non pas une, mais 5 propositions de valeur, une par grande partie prenante : outre les clients, il faut une proposition de valeur pour les employés : promettre — on fait ici référence à la marque employeur — et délivrer un développement des compétences, des évolutions de carrière, des parcours à l’international, des possibilités de prendre des congés sabbatiques ou autres, etc. Pour les fournisseurs, il s’agira de les impliquer dans les processus de définition de la stratégie, d’amélioration de la qualité, d’innovation, dans un partenariat à long terme. Pour le territoire, il s’agira de s’engager sur la création d’emplois, de collaborer avec les universités ou collèges pour ajuster les programmes de formation aux réalités nouvelles, etc. Autant de propositions de valeur attractives qui font que les clients, les étudiants ou les chercheurs d’emplois, les fournisseurs, les territoires… voudront travailler avec cette entreprise qui crée de « la valeur partagée ».

5— Une Gouvernance en cohérence avec l’approche par les parties prenantes

 

À partir du moment où l’on comprend que l’intérêt à long terme de l’entreprise est de travailler en intelligence et de créer de la valeur avec et pour l’ensemble des parties prenantes, et à partir du moment où l’on reconnaît que les résultats aujourd’hui sont désormais une fonction de 4 facteurs : le talent, le capital, le temps et l’alignement des intérêts de l’écosystème, il devient logique, impératif d’intégrer le talent et les principales parties prenantes dans les instances de gouvernance de l’entreprise. Le système anglo-saxon est peu ouvert à cette idée. En Europe, 13 pays ont déjà adopté des législations qui font entrer les salariés dans les conseils d’administration ; depuis près de 50 ans, l’Allemagne fonctionne plutôt bien, n’est-ce pas ? avec le principe de la codétermination ; les administrateurs salariés étant obligatoirement à égalité avec les administrateurs actionnaires dans les conseils des entreprises de plus de 2000 employés.

À la codétermination nous préférons la TRIDÉTERMINATION, une gouvernance et donc une organisation du CA fondées sur 3 piliers plutôt que deux. Nous préconisons une approche plus ouverte, qui ne se referme pas sur la dialectique capital-travail, plutôt passéiste, peu en phase avec la nécessaire prise en considération du principal facteur de succès qu’est le talent. Or celui-ci ne se loge pas que chez les employés, mais également chez les clients et chez les fournisseurs, lesquels font aujourd’hui de la co-construction de produits ou services avec l’entreprise. Cette opposition capital-travail serait d’ailleurs plus délicate autour de la table du conseil d’administration des entreprises ayant un historique chargé en matière de relations de travail.

Les administrateurs indépendants peuvent constituer la troisième force des conseils et éviter l’éventuelle confrontation évoquée précédemment. Toutefois, aujourd’hui, les administrateurs indépendants, qui sont choisis pour leur compétence, leur parcours, leur sagesse…, n’ont pas de mandat particulier autre que celui de veiller à la conformité des instances et à la pérennité des entreprises, ce qui convient évidemment bien aux actionnaires.

Tout en conservant ces deux responsabilités, on peut demander explicitement aux administrateurs indépendants d’être particulièrement vigilants quant aux intérêts à court et à long terme de toutes les parties prenantes ; ils veilleront notamment à ce que les réalités, les difficultés et les attentes des clients, des fournisseurs, de la Société civile ou du territoire… soient prises en compte. Les administrateurs indépendants existent déjà dans nombre d’entreprises ; hormis le choix des candidats qui sera un peu plus complexe, cette solution est plus simple et surtout dépourvue de tout conflit d’intérêts potentiel contrairement à la proposition parfois suggérée de nommer des administrateurs représentant les clients ou les fournisseurs. Il importe d’ailleurs ici de rappeler que les administrateurs sont tenus de défendre les intérêts de toute l’entreprise, de faire corps avec les décisions du Conseil d’administration, cette instance devant réfléchir et décider dans la sérénité, la discrétion et la solidarité.

Cette remarque s’impose pour éviter toute ambiguïté en ce qui a trait aux administrateurs salariés. Élus par l’ensemble des employés de l’entreprise, le rôle des administrateurs salariés ne doit pas être confondu avec celui d’autres acteurs, syndiqué ou non, membre des instances représentatives du personnel. Le thème des relations de travail, avec tous ses sujets extrêmement concrets concernant la vie de celles et de ceux qui travaillent dans l’entreprise, n’a pas à envahir l’ordre du jour du CA, instance fondamentale pour la pérennité de l’entreprise et centrée en conséquence sur la stratégie. Le dialogue social s’inscrit dans l’opérationnel ; il relève de la direction générale ou de la direction des ressources humaines.

Le CA, acteur clé de la réflexion stratégique

 

Trop souvent, le CA ne fait qu’approuver et contrôler. Dans l’entreprise progressiste, le CA se réapproprie le temps long et aligne l’entreprise sur sa raison d’être, il s’implique donc avant, pendant et après le choix de la stratégie. Le CA  est au cœur du processus de réflexion stratégique, dans sa formulation, dans les décisions auxquelles il aboutira, dans le contrôle de sa mise en œuvre et dans l’examen des résultats.

Dans l’entreprise progressiste, le CA et l’équipe de direction ne sont pas isolés l’un de l’autre, voire en opposition dans des calculs pour savoir qui a le plus d’ascendant sur l’autre… C’est pourquoi, par exemple, pour préparer la stratégie, les membres du CA et de l’équipe de direction se retrouvent conjointement lors de 1 ou 2 journées de réflexion et de partage où les statuts de mandants et de mandataires sont mis de côté pour faciliter les échanges.

En étant composé de représentants des parties prenantes et en se concentrant sur la stratégie, le CA trouve toute sa place : il est le décideur ultime, pleinement responsable. Et il devient inutile de mettre en place, à côté du CA, comme certains le proposent, un comité des parties prenantes, qui ne peut être qu’un assemblage hétéroclite, sans pouvoir, consultatif, permettant au CA traditionnel de se défausser, d’esquiver ses responsabilités à l’égard des parties prenantes autres que les actionnaires.

LA GOUVERNANCE, la clé du changement de paradigme

 

On reproche souvent aux entreprises de ne faire que du verdissement d’image quand celles-ci se contentent de capitaliser sur l’angoisse écologique des consommateurs en mettant en avant quelques belles initiatives en faveur de l’environnement.

La distinction entre ces entreprises opportunistes et celles qui souhaitent s’inscrire comme des organisations citoyennes, pleinement responsables et soucieuses de la prospérité de toutes les personnes qui, à des degrés divers, dépendent d’elles, se fera au regard de leur stratégie et, ultimement, de leur gouvernance : La Stratégie est-elle intégrée, au service d’une raison d’être porteuse de sens pour la Société, empreinte d’altruisme en lieu et place de la cupidité ? La gouvernance est-elle en phase avec cette ouverture vers tous les acteurs, en harmonie avec son environnement ?

La gouvernance, telle que définie ici, fait que le modèle de l’entreprise progressiste va bien au-delà de la RSE traditionnelle ; elle constitue la clé de voûte d’un capitalisme nouveau, le capitalisme des parties prenantes (5).


Notes et références

1 COUPET A. « Vers une entreprise progressiste, le modèle pour basculer dans un capitalisme humaniste au service des parties prenantes », Éditions Paris Québec Inc., décembre 2020 ; disponible sur http://www.entrepriseprogressiste.com.

2— HURST A. « The Purpose Economy », Elevate, 2014.

3— COUPET A. et DORMAGEN E. « Au-delà de la RSE — l’entreprise progressiste », Gestion, vol.41, n° 3, automne 2016, p.25-29.

4— COUPET A. et JEZEQUIEL M. « L’Éthique créatrice de valeur partagée », Gestion, vol.43, n° 4, hiver 2018, p.81-83.

5— COUPET A. et LEMARCHAND A. « Vers un capitalisme des parties prenantes », La Croix, 14 janvier 2019.


Les auteurs :

*  André Coupet est licencié en Sciences économiques de l’Université de Paris et diplômé MBA de l’Université de Sherbrooke, André Coupet a exercé pendant plus de 30 ans le métier de conseil en stratégie, notamment les stratégies « client », à Montréal et à Paris.  Il se concentre aujourd’hui sur l’émergence d’un nouveau modèle économique pour les entreprises. Il a ouvert et dirigé la filiale parisienne du Groupe canadien SECOR. Homme de conviction, il écrit régulièrement dans des journaux économiques ou des revues universitaires, notamment la Revue Gestion HEC Montréal, et s’implique dans des forums de réflexion progressiste conformément aux valeurs qu’il défend.

** Philippe Carpentier est associé et conseiller stratégique de la firme Brio Conseils pour laquelle il réalise, depuis plus de 20 ans, des transformations d’entreprises complexes, en collaboration étroite de hauts dirigeants. Ses interventions touchent notamment des restructurations, des expansions géographiques, des fusions et des acquisitions, de nouveaux positionnements, la création ou le repositionnement d’unités d’affaires, le changement de leadership, la nouvelle gouvernance, etc.

Top 15 des billets publiés sur Harvard Law School Forum au 18 février 2021


Voici le compte rendu hebdomadaire du forum de la Harvard Law School sur la gouvernance corporative au 18 février 2021.

Cette semaine. j’ai relevé les quinze principaux billets.

Bonne lecture !

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  1. Spencer Stuart S&P MidCap 400 Board Report
  2. A New Whistleblower Environment Emerges
  3. Stakeholder Capitalism: From Balance Sheet to Value Sheet
  4. BlackRock’s 2021 CEO Letter
  5. CFO Signals
  6. 2021 Proxy Season: Executive Compensation Considerations
  7. How We Evaluate Shareholder Proposals
  8. Advisers by Another Name
  9. COVID-19 and Comparative Corporate Governance
  10. A Conversation with Bill Ackman
  11. Troubling Signs from Recent M&A Case Law
  12. Shareholderism Versus Stakeholderism—A Misconceived Contradiction: A Comment on “The Illusory Promise of Stakeholder Governance” by Lucian Bebchuk and Roberto Tallarita
  13. Risk Factor Disclosures for the Recovery Era
  14. Corporate Transparency Act: What Companies Need to Know
  15. Executive Compensation in the Context of the COVID-19 Pandemic

Top 10 des billets publiés sur Harvard Law School Forum au 20 janvier 2021


Voici le compte rendu hebdomadaire du forum de la Harvard Law School sur la gouvernance corporative au 20 janvier 2021
Cette semaine, j’ai relevé les dix principaux billets.
Bonne lecture !

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  1. CEO Succession Practices in the Russell 3000 and S&P 500
  2. Financing Year in Review: From Crisis to Comeback
  3. Climate Activism: Status Check and Opportunities for Public Companies
  4. A Look at This Year’s Voting Trends Following the US N-PX Disclosures
  5. Year-End Accounting and Financial Reporting Considerations
  6. Investors Hold Boards Accountable—When Equipped With the Right Reports
  7. Directors Using Their Employer’s Email Account
  8. How Boards Can Promote a New Leadership Model for Companies
  9. Why ESG Can No Longer Be a PR Exercise
  10. Racial Diversity and Investment