Top 10 des billets publiés sur Harvard Law School Forum au 19 novembre 2020


Voici le compte rendu hebdomadaire du forum de la Harvard Law School sur la gouvernance corporative au 19 novembre 2020.

Cette semaine, j’ai relevé les dix principaux billets.

Bonne lecture !

 

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  1. Decision Making in 50:50 Joint Ventures
  2. Delaware Reaffirms Director Independence Principle in Founder-Led Company
  3. Shareholders’ Rights & Shareholder Activism 2020
  4. ESG Management and Board Accountability
  5. Financial Institution Regulation Under President Biden
  6. Corporations in 100 Pages
  7. Racial Equity on the Board Agenda
  8. The Rise of the General Counsel
  9. Revealing ESG in Critical Audit Matters
  10. SEC Division of Enforcement 2020 Annual Report

Problématiques de gouvernance communes lors d’interventions-conseils auprès de diverses organisations – Partie II – La présidence du CA


Lors de mes consultations en gouvernance des sociétés, je constate que j’interviens souvent sur des problématiques communes à un grand nombre d’organisations et qui sont cruciales pour l’exercice d’une gouvernance exemplaire.

Dans cette deuxième partie, j’aborde la définition des fonctions du président du conseil d’administration (PCA) d’une société.

L’article d’André Laurin intitulé « La fonction de président de CA» est certes l’un des textes les plus complets pour décrire les fonctions de président du conseil d’administration.

Dans ce document, l’auteur précise le « contexte et l’encadrement réglementaire et jurisprudentiel » en insistant sur le rôle crucial du PCA et sur le rehaussement des règles de gouvernance, entre autres la dissociation des fonctions de PCA et de PDG.

Voici de longs extraits de cet article.

La fonction de président de CA

 

Le leadership de la présidence – Collège des administrateurs de sociétés

 

Contexte et encadrement législatif réglementaire et jurisprudentiel

Rôle vital et hausse des normes de fonctionnement

Le président du conseil joue un rôle vital au sein d’une société. Ce rôle et les
responsabilités qui en découlent ont pris une importance accrue avec la hausse des normes de fonctionnement applicables aux conseils d’administration et, par conséquent, aux administrateurs. L’adoption de règles et de lignes directrices dans le cas des émetteurs assujettis, ou de directives dans le cas de certaines sociétés d’État, la publicité des pratiques exemplaires en matière de régie d’entreprise et les poursuites plus fréquentes intentées contre les administrateurs se sont conjuguées pour provoquer cette hausse des normes.

Parmi ces normes, on retrouve en première ligne dans le cas des émetteurs assujettis et de certaines sociétés d’État beaucoup de règles de divulgation, de contrôles et de conformité et une importance considérable accordée à la notion d’indépendance.

Les règles ont eu pour effet secondaire d’accroître la lourdeur administrative et les coûts pour les émetteurs assujettis et de susciter une image, à certains égards, négative de la gouvernance dans plusieurs milieux. Il importe de ne pas confondre ces règles avec la bonne gouvernance ni la conformité avec l’intégrité. Les premiers sont des moyens, à l’occasion exagérés, alors que les seconds sont des objectifs, toujours valables, que les sociétés doivent
rechercher.

Quant au critère d’indépendance, il ne devrait pas être érigé en valeur absolue et principale et, sous réserve de l’utile séparation des pouvoirs avec la direction dans nombre de cas, ne devrait pas céder le pas aux critères de compétence, d’expérience, de crédibilité, de légitimité et d’intégrité. De plus, la possibilité de certains conflits ponctuels d’intérêts ne devrait pas faire perdre automatiquement la qualification d’administrateur indépendant pour cette seule raison.

Yvan Allaire, président de l’Institut sur la gouvernance d’organisations privées et publiques et son coauteur Dr Mihaela Firsirotu ont bien résumé, dans une courte phrase, les limites à l’utilisation du critère d’indépendance « Le concept est sans intérêt quand il est mesurable et insaisissable quand il est intéressant ».

Élimination progressive du cumul des fonctions de chef de la direction et de président du conseil

Pendant plusieurs années et dans le cas de plusieurs sociétés, le président et chef de la direction occupait également le poste de président du conseil. Ce cumul de fonctions était très fréquent chez les émetteurs assujettis américains, mais moins fréquent chez les émetteurs assujettis canadiens.

Les dernières statistiques publiées par le Risk Metrics Group révèlent que 45 % des émetteurs assujettis américains n’octroient plus les deux postes à la même personne (environ 36 % des « Standard & Poors —500 companies » selon Corporate Library, un groupe de recherche de Portland, Maine).

Au Canada, le cumul est beaucoup moins fréquent chez les émetteurs assujettis. Selon un rapport de Patrick O’Callaghan et Associés, publié en décembre 2006 en partenariat avec Korn/Ferry International, 79 % des plus importants émetteurs assujettis canadiens avaient en 2005 un président de conseil ou un leader indépendant du conseil (c.-à-d. distinct du chef de la direction).

En ce qui a trait aux sociétés fermées à but lucratif, le cumul est encore une pratique très répandue et va nécessairement le demeurer dans la plupart des cas compte tenu de la réalité de l’entreprise, de sa direction et de son actionnariat. En effet, dans le cas de ces sociétés, l’actionnaire ou les actionnaires principaux sont très souvent les dirigeants de la société et exercent donc directement le contrôle sur celle-ci.

Quant aux OSBL, le cumul a été et demeure l’exception plutôt que la règle.

Nos commentaires sont donc surtout pertinents dans le cas des émetteurs assujettis, des OSBL et de certaines sociétés fermées à but lucratif (c.-à-d., celles comportant plusieurs actionnaires et qui n’ont pas de convention unanime d’actionnaires ou qui, ayant une telle convention, ont opté pour le non-cumul des fonctions).

On peut résumer comme suit un des arguments des tenants du non-cumul moins grande est l’implication de la majorité sinon de la totalité des actionnaires ou membres dans la gestion quotidienne de la société et plus forte devrait être la préférence pour le non-cumul des fonctions.

En effet, le non-cumul vise, entre autres, à permettre aux actionnaires ou membres d’exercer une surveillance adéquate de la direction et de la gestion quotidienne déléguée. La capacité d’exercer un jugement indépendant constitue un autre fondement de la position des partisans du non-cumul.

Silence relatif des lois sur le président du conseil et sur ses responsabilités particulières

Ni la Loi sur les compagnies (Québec) ne traitent des responsabilités du président du conseil. La Loi sur la gouvernance des sociétés d’État (Québec) régissant les sociétés d’État du gouvernement du Québec, prescrit, quant à elle, l’exigence d’indépendance du président du conseil et lui confie certaines tâches précises sans pour autant énoncer un mandat précis ou une description de tâches complète.

Les lignes directrices adoptées par les Autorités canadiennes en valeurs mobilières, qui font partie de l’Instruction générale 58-201 relative à la gouvernance et qui s’adressent aux émetteurs assujettis canadiens, formulent certaines recommandations précises : « Le président du conseil devrait être un administrateur indépendant. Lorsque cela n’est pas approprié, un administrateur indépendant devrait être nommé pour agir comme “administrateur principal”.

Toutefois, un président du conseil indépendant ou un administrateur principal indépendant devrait jouer le rôle de véritable chef du conseil et veiller à ce que le programme de travail du conseil lui permette de s’acquitter correctement de ses fonctions.

Le conseil d’administration devrait élaborer des descriptions de poste claires pour le président du conseil et le président de chaque comité du conseil… »

La jurisprudence n’a presque pas abordé directement la question des obligations et des responsabilités particulières du président du conseil. Une décision australienne a cependant, établi que du fait de son rôle central de coordination des activités du conseil, la prestation du président du conseil devait être évaluée à la lumière des attentes et des pouvoirs liés à cette fonction.

« La Commission désire démontrer qu’il est monnaie courante dans les sociétés cotées que les responsabilités du président du conseil soient plus étendues que celles des autres administrateurs afin que celui-ci puisse veiller à ce que le conseil s’acquitte de ses tâches de surveillance. ».

Cette décision australienne va dans le sens des décisions canadiennes et américaines qui ont analysé la responsabilité de chacun des administrateurs à la lumière soit du poste occupé (p. ex., président ou membre d’un comité de vérification) soit des connaissances ou des compétences professionnelles particulières d’un administrateur (p. ex., l’avocat administrateur par rapport à une question juridique ou le spécialiste en financement par rapport à une évaluation financière ou aux conditions d’ententes de financement).

« Toutefois, à notre avis, les membres des comités de vérification devraient endosser une plus grande responsabilité que les autres administrateurs pour ce qui s’est produit lors de l’assemblée du conseil du 24 juillet 1990, non pas parce que le degré de diligence leur étant imposé était plus important, mais plutôt parce que leur situation était différente.

En tant que membres des comités de vérification, ils avaient plus de chances d’obtenir de l’information relative aux affaires de la société et d’examiner ces dernières que les non-membres. Par conséquent, on s’attendait à plus de leur part relativement à la surveillance du processus de communication de l’information financière et à la manière de signaler les problèmes aux autres administrateurs. »

La faute ou le respect ou non-respect des obligations d’un administrateur est évalué en fonction de son mandat, des attentes exprimées et des obligations qui lui sont imposées par la loi (diligence et loyauté). En l’absence de dispositions spécifiques de la loi, les tribunaux comparent le soin, la diligence et la compétence utilisés par l’administrateur à ceux de la personne prudente en pareilles circonstances ou, en d’autres termes, aux pratiques reconnues. L’article 122 (1) b) de la Loi canadienne sur les sociétés par actions fait d’ailleurs référence de manière explicite à cette comparaison :

Devoir des administrateurs et dirigeants

Les administrateurs et les dirigeants doivent, dans l’exercice de leurs fonctions, agir :

    1. avec intégrité et de bonne foi au mieux des intérêts de la société ;
    2. avec le soin, la diligence et la compétence dont ferait preuve en pareilles circonstances une personne prudente.
      Par conséquent, la responsabilité potentielle du président du conseil est analysée à la lumière des obligations imposées à tout un chacun des administrateurs, mais en prenant en compte, dans son cas et entre autres, les responsabilités et les pouvoirs spécifiques qui lui ont été confiés, et de la façon dont un président du conseil prudent devait ou aurait dû se comporter dans les circonstances. Donc, peu de pistes jurisprudentielles directes, mais certains indices d’évaluation de la responsabilité particulière d’un président du conseil.


Portrait suggéré par les meilleures pratiques

Sauf dans certaines circonstances exceptionnelles, la fonction de président du conseil comporte deux (2) volets principaux dans le cas de la majorité des sociétés où il y a non-cumul des fonctions de président du conseil et de chef de la direction :

    • la coordination et l’animation du conseil, et
    • l’interface entre le conseil et la direction.

Coordination et animation

Bien que le conseil doive assumer, en vertu de la plupart des lois constitutives, la responsabilité de la gestion de la société, la gestion quotidienne est, quant à elle, habituellement déléguée aux dirigeants, le conseil conservant la surveillance de cette gestion (« nose in fingers out ») et certains sujets prioritaires.

Le rôle principal du président du conseil est d’exercer ses talents et ses compétences, de consacrer le temps, les efforts et l’énergie raisonnables pour favoriser un fonctionnement et un rendement optimaux du conseil et de veiller au bon fonctionnement du conseil et à l’exécution de son mandat.

Voici les rubriques communes qu’un mandat du conseil devrait comprendre dans le cas de presque tous les types de sociétés :

    • promotion d’une culture éthique et d’intégrité au sein de la société et dans ses relations et transactions ;
    • surveillance de la gestion ;
    • orientations et plan stratégique ;
    • définition des rôles et des attentes (conseil, direction, président) ;
    • planification de la relève (direction et conseil) ;
    • budget et états financiers ;
    • contrôles et politiques (p. ex., code d’éthique) ;
    • gouvernance et mises en candidature ;
    • gestion des risques ;
    • évaluation et rémunération (dirigeants et conseil) ;
    • divulgation et qualité de l’information.

Il est évident que la responsabilité de surveillance de la gestion implique des rapports, des questions et des vérifications. Les administrateurs ne doivent pas être que des approbateurs aveugles ou complaisants des propositions et des actions de la direction ; ils doivent surveiller, questionner et vérifier.

Cependant, il faut rappeler qu’ils doivent clairement consacrer une part importante de leur énergie à apporter une valeur ajoutée à la société et à aider la direction à élaborer et réaliser le plan stratégique de la société.

En d’autres termes, et pour reprendre un thème cher à Yvan Allaire, auquel ce bulletin référait précédemment, ils ne devraient pas limiter leur rôle à l’aspect « fiduciaire », mais devraient être des contributeurs importants à la création de valeur.

Dans la coordination de l’exécution du mandat du conseil, le président du conseil est donc appelé à favoriser la répartition et la contribution des talents et des compétences des administrateurs en fonction de cette dynamique créatrice de valeur. C’est donc sous l’éclairage de ce commentaire que doivent être compris les différents volets de la tâche du président du conseil qu’on retrouve dans les lignes
qui suivent.

Pour favoriser l’exécution de ce mandat du conseil, le président du conseil devrait, avec « le soin, la diligence et la compétence dont ferait preuve en pareilles circonstances une personne prudente », entre autres :

  1. veiller à ce que les administrateurs :
    • reçoivent la formation et l’information pertinentes et nécessaires en temps utile ;
    • puissent obtenir réponse à leurs questions ;
    • puissent recevoir l’assistance matérielle (outils et documents) et celle d’experts ; et
    • puissent exprimer leurs points de vue et donc à ce qu’une part importante du temps alloué aux réunions soit réservée à l’expression de leurs questions et commentaires ;
  1. veiller à ce que chacun des éléments du mandat du conseil fasse l’objet d’actions, de décisions et de suivis lors des réunions du conseil, selon un calendrier et un programme de travail ; ainsi, il devrait préparer les réunions du conseil (y compris, de manière plus spécifique, élaborer l’ordre du jour, obtenir ou faire préparer les documents qui doivent être soumis et prévoir, choisir et organiser les présentations qui seront faites au conseil) et vérifier le suivi qui a été fait aux demandes et aux décisions antérieures du conseil ;
  2. diriger et animer les réunions formelles et informelles du conseil de manière à faire ressortir les points de vue de chacun et à favoriser l’élaboration de solutions et la prise de décisions (« consensus builder ») ;
  3. entre les réunions, s’informer des préoccupations des
    administrateurs à l’égard de la société et de ses activités, de la direction de la société, du fonctionnement du conseil et de la prestation des autres
    administrateurs ;
  4. aider les nouveaux administrateurs à faire un apprentissage rapide de leur charge ;
  5. coordonner l’évaluation du fonctionnement et de la prestation du conseil en collaboration avec le comité à qui le mandat de responsabilité de gouvernance a été confié et collaborer à l’évaluation que les autres administrateurs et la direction devraient faire de cette prestation ;
  6. veiller à ce que les plaintes, les commentaires et les suggestions des actionnaires ou des membres puissent être recueillis et communiqués au conseil, si ceux-ci sont d’importance, et à ce que toute atteinte aux droits des actionnaires ou membres portées à sa connaissance soit rapidement corrigée ou, à défaut, communiquée au conseil ;
  7. voir à ce que les assemblées des actionnaires ou membres soient dûment convoquées et à ce que les actionnaires ou membres puissent exercer leurs droits lors et à l’égard de ces assemblées et les présider à moins que cette présidence soit confiée à un professionnel ;
  8. veiller à ce que chaque comité du conseil respecte son mandat et son programme de travail et fasse dûment rapport au conseil ;
  9. surveiller le respect des politiques de la société applicables aux administrateurs par ceux-ci, à moins que ce mandat ne soit confié à un comité du conseil ;
  10. appuyer le chef de la direction en ce qui a trait à la représentation de la société auprès de la communauté ;
  11. selon des balises établies de concert avec la direction ou validées par le conseil, assumer une partie des communications officielles de la société dans certaines circonstances.

Rôle d’interface entre le conseil et la direction

Les motifs de bonne gouvernance qui militent en faveur du non-cumul des fonctions et d’une dynamique d’imputabilité de la direction envers le conseil ou, en d’autres termes, d’un juste équilibre de poids et contrepoids (« check and balance ») n’ont pas pour effet de diminuer l’importance du travail d’équipe entre la direction et le conseil dans la poursuite des objectifs de la société.

Le président du conseil est au centre de ces deux dynamiques auxquelles le conseil doit participer.

D’une part, c’est le président du conseil qui, comme on l’a vu, doit préparer et coordonner les travaux du conseil et veiller à ce que les décisions du conseil soient respectées par la direction. À ce titre, il devrait, par exemple :

    • communiquer à la direction les demandes, les attentes et les commentaires du conseil ;
    • obtenir pour le conseil les rapports désirés (rapports réguliers sur matières précises et sur le suivi de l’implantation des décisions) ;
    • s’informer auprès de la direction de tout élément important qui devrait être porté à la connaissance du conseil ou de l’un de ses comités ;
    • avec le comité de gestion et de rémunération des cadres supérieurs, suivre l’évolution de la carrière des principaux dirigeants, du plan de relève, des prestations des autres dirigeants et de la dynamique prévalant au sein de l’équipe de direction, de même qu’évaluer le chef de la direction pour que des rapports et des recommandations éclairés puissent être transmis au conseil ;
    • faire le point avec le chef de la direction sur une base régulière, entre les réunions, sur les perspectives de la société, les préoccupations, les défis et problèmes plus immédiats et les projets importants (financement, acquisition…) de la direction ;
    • veiller à ce que la direction soumette au conseil d’administration toute question qui est du ressort du conseil.

D’autre part, en plus de son rôle et de ses responsabilités officielles, le président du conseil est appelé, en pratique et dans la plupart des cas, à être le conseiller et souvent le confident du chef de la direction et parfois celui d’autres membres de la direction. Ainsi, le chef de la direction peut vouloir par exemple lui exprimer à l’occasion ses frustrations ou préoccupations personnelles ou encore lui demander son avis sur un projet donné ou un problème particulier.

Dans le contexte du travail d’équipe, ce rôle de sage et de conseiller est non seulement normal et sain, mais essentiel. Par ailleurs, en le jouant, le président du conseil doit être prudent et ne pas mettre en échec ou s’écarter de son rôle et de ses responsabilités officielles. De manière plus particulière, il ne doit pas affaiblir ses responsabilités et son rôle d’évaluation du chef de la direction.

Circonstances exceptionnelles d’implication plus directe

Certaines situations peuvent et, dans nombre de cas, devraient provoquer une implication plus directe du conseil et, par voie de conséquence, du président du conseil. Mentionnons, de manière non exhaustive, certaines circonstances :

    • la survenance d’événements susceptibles d’influer négativement et de manière importante sur la profitabilité de la société, l’avoir des actionnaires, la capacité de la société de poursuivre ses objectifs et sa mission ou encore sa réputation ; les situations d’insolvabilité de la société ;
    • les projets majeurs d’acquisition ;
    • les décisions susceptibles d’influer sur les droits des actionnaires ou des membres à ce titre ;
    • toute initiative d’un tiers visant à acquérir une partie significative des titres de la société ou de ses éléments d’actif (OPA ou autre type) ;
    • de façon plus générale, toute situation où les intérêts personnels de la direction sont susceptibles d’être en conflit avec ceux de la société ou de
      l’ensemble de ses actionnaires ou de ses membres ;
    • toute modification importante du plan stratégique ou du plan d’affaires de la société ;
    • toute dénonciation, allégation ou manifestation apparente d’une violation importante d’une règle de droit en matière de valeurs mobilières ou d’une règle de droit ayant pour objet la protection des actionnaires ou des membres de la société ;
    • toute dénonciation, allégation ou manifestation apparente d’une violation par la société de toute autre règle de droit susceptible d’entraîner des conséquences sérieuses pour la société ;
    • l’incapacité d’agir du chef de la direction pour quelque raison que ce soit, ou sa démission ou son congédiement.

Dans de telles circonstances, le président du conseil devrait clairement veiller à ce que le conseil soit rapidement et complètement informé et à ce qu’il contrôle et encadre l’élaboration de solutions ou de mesures correctrices, prenne les décisions qu’il juge appropriées et surveille le processus d’implantation de ces décisions.

Dans un tel contexte, le conseil devrait, dans plusieurs de ces cas, donner un mandat spécifique au président du conseil, à un autre administrateur ou à un comité pour que celui-ci joue un rôle plus important et plus direct que celui assumé en temps normal, de manière à ce que le conseil, par son intermédiaire, exerce un véritable contrôle du respect de ses décisions et du processus de gestion des circonstances exceptionnelles en question.

Écueils à éviter

Les raisons qui sont à l’origine de la séparation des fonctions et des pouvoirs du président du conseil et du chef de la direction et d’une répartition claire des mandats entre la direction et le conseil (« nose in fingers out ») nous permettent également de relever certains écueils qu’un président du conseil devrait éviter. Ainsi, le président du conseil devrait
idéalement éviter :

    • de se mêler de la gestion quotidienne ;
    • d’intervenir auprès des membres de la direction qui relèvent du chef de la direction ou des autres employés sauf pour poser des questions et ainsi éviter d’affecter négativement la crédibilité et l’autorité des dirigeants ;
    • de donner quelque directive que ce soit au chef de la direction qui ne serait pas l’expression des décisions du conseil et du ressort de celui-ci ;
    • sauf dans les circonstances exceptionnelles décrites précédemment, de ne pas maintenir la distance critique qui doit être maintenue entre la direction et le conseil et ainsi diminuer ou éliminer l’imputabilité de la direction ;
    • de devenir dans la pratique et au quotidien l’équivalent d’un supérieur immédiat du chef de la direction ;
    • d’accepter des faveurs personnelles importantes qui soient susceptibles d’influer sur l’exercice de son jugement indépendant à l’égard de la direction en général et du chef de la direction en particulier ; et
    • dans le cas où le président du conseil diverge de point de vue avec la majorité des administrateurs, d’amener le chef de la direction à ne pas implanter la décision du conseil de façon à aller dans le sens de la position minoritaire qu’il soutient.Plusieurs ont souligné que la présence physique quotidienne régulière du président du conseil dans les bureaux de la société accroît les risques qu’il se mêle de choses qui ne le regardent pas ou qu’il ne maintienne pas la distance suffisante pour assurer l’équilibre de poids et contrepoids « check and balance ».

Assistance au président du conseil

La société doit fournir au président du conseil les outils et les ressources matérielles et humaines adéquats pour accomplir son travail. Si tel n’est pas le cas, il sera difficile pour le président du conseil d’exécuter son mandat de manière efficace.

Ainsi, le président du conseil devrait avoir accès aux ressources du secrétariat de la société. Le mandat du secrétaire corporatif devrait prévoir que celui-ci doit respecter les instructions du président du conseil à l’égard des réunions du conseil. De plus, le secrétaire corporatif devrait respecter les exigences de confidentialité que peuvent lui imposer à l’occasion le président du conseil, les présidents de comités du conseil, le conseil ou les comités eux-mêmes, et ce, même à l’égard de la direction. Enfin, la direction devrait recueillir et prendre en compte les commentaires du président du conseil et du conseil sur l’évaluation de la prestation du secrétaire corporatif.

Compétences, qualités et habiletés d’un président du conseil

Les propos suivants se risquent à suggérer un profil idéal de certaines compétences, qualités et habiletés que devrait posséder un bon président de conseil d’administration.

Commençons par la négative : le président du conseil ne devrait pas être un gestionnaire frustré ou une personne assoiffée de pouvoir.

Outre les qualités évidentes d’intelligence et de leadership et les talents requis pour dégager ou bâtir des consensus, une personne appelée à assumer le poste de président du conseil devrait, entre autres et de manière plus particulière :

    • être capable d’exercer un jugement indépendant par rapport à la direction et à ses intérêts personnels ;
    • avoir la capacité de comprendre les enjeux, les défis, les réalités et les problèmes d’une direction d’entreprise ;
    • être un bon juge de personnes ; avoir une grande capacité d’écoute, de compréhension et de respect des autres ;
    • avoir une capacité de synthèse, un bon sens des priorités et un bon jugement ;
    • être capable de faire ressortir les talents et les points de vue de chacun ;
    • avoir une capacité de communication de haut niveau ;
    • avoir un profil d’intégrité sans taches ;
    • être capable de faire preuve d’une humilité suffisante pour laisser les feux des projecteurs se porter sur le chef de la direction plutôt que sur lui ;
    • avoir une connaissance adéquate du secteur d’activités dans lequel la société œuvre ou avoir la capacité d’acquérir rapidement cette connaissance ;
    • avoir la capacité ou le courage de prendre des décisions difficiles ; et
    • avoir un parcours et une expérience où ces compétences, ces qualités, ces talents et ces habiletés ont pu être éprouvés avec succès.

Aux États-Unis, certains ont d’ailleurs invoqué l’impossibilité de trouver des personnes offrant un tel profil pour justifier le maintien du cumul des fonctions.

Les votes et l’expression de dissidences ne devraient pas constituer des pratiques régulières au sein du conseil, car elles ne traduisent pas un fonctionnement harmonieux et collégial et à l’enseigne de la recherche du consensus. Un véritable bâtisseur de consensus est habituellement capable d’en réduire la fréquence de façon significative.

Présidents de comités

Plusieurs des commentaires formulés à l’égard du président du conseil s’appliquent dans une bonne mesure aux présidents de comités du conseil, aux présidents de comités de retraite ou d’autre type de comités, en faisant certaines adaptations.

Conclusion

Chaque société et chaque époque de l’évolution d’une société ont leurs caractéristiques et leurs exigences. Le contexte, l’identité des actionnaires ou des membres de la société, selon le cas, la composition du conseil et la personnalité du président du conseil et celle de chef de la direction font partie des nombreux facteurs qui vont influer sur le rôle du président du conseil et sur les qualités spécifiques que le président du conseil d’une société donnée devrait posséder.

Toutefois, les caractéristiques et exigences fondamentales devraient demeurer les mêmes et ce, peu importe les circonstances. Ce bulletin a tenté d’en décrire certaines.

 

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Dans des billets ultérieurs, je reviendrai sur plusieurs autres problématiques de gouvernance qui font l’objet de préoccupations par les conseils d’administration :

    1. La clarification des rôles et responsabilités des principaux acteurs de la gouvernance : (1) conseil d’administration (2) présidence du conseil d’administration (3) direction générale (4) comités du conseil (5) secrétaire du conseil d’administration.
    2. La composition et les rôles des comités du conseil soutenant la gouvernance : (1) comité de gouvernance et d’éthique (2) comité des ressources humaines et (3) comité d’audit.
    3. La révision de la composition du conseil d’administration : nombre d’administrateurs, profils de compétences, types de représentation, durée et nombre de mandats, indépendance des administrateurs, etc.
    4. La réévaluation du rôle du comité exécutif afin de mieux l’arrimer aux activités des autres comités.
    5. L’importance du rôle du secrétaire du conseil eu égard à son travail, avant, pendant et après les réunions du conseil.
    6. L’évaluation du processus de gestion des réunions du CA qui met l’accent sur l’amélioration de la dynamique d’équipe et la justification d’un huis clos productif et efficace.
    7. La raison d’être d’un processus d’évaluation annuelle de l’efficacité du conseil et la proposition d’instruments d’auto-évaluation des administrateurs.
    8. Les caractéristiques d’une bonne reddition de compte de la part de la direction générale.
    9. L’intégration des nouveaux administrateurs afin de les rendre opérationnels rapidement.
    10. L’adoption d’un code d’éthique des administrateurs exemplaire.

Au cours des prochaines semaines, j’aborderai les autres problématiques vécues lors de mes interventions-conseils.

Bonne lecture. Vos commentaires sont les bienvenus.

Problématiques communes de gouvernance lors d’interventions-conseils auprès de diverses organisations – Partie I – Relations entre président du CA et DG


Lors de mes consultations en gouvernance des sociétés, je constate que j’interviens souvent sur des problématiques communes à un grand nombre d’organisations et qui sont cruciales pour l’exercice d’une gouvernance exemplaire.

Aujourd’hui, j’aborde l’une des plus grandes difficultés qui confrontent les conseils d’administration : la gestion des relations de pouvoir entre le président du CA (et certains administrateurs) et la direction générale.

 

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Dans des billets ultérieurs, je reviendrai sur plusieurs autres problématiques de gouvernance qui font l’objet de préoccupations par les conseils d’administration :

 

La clarification des rôles et responsabilités des principaux acteurs de la gouvernance : (1) conseil d’administration (2) présidence du conseil d’administration (3) direction générale (4) comités du conseil (5) secrétaire du conseil d’administration.

La composition et les rôles des comités du conseil soutenant la gouvernance : (1) comité de gouvernance et d’éthique (2) comité des ressources humaines et (3) comité d’audit.

La révision de la composition du conseil d’administration : nombre d’administrateurs, profils de compétences, types de représentation, durée et nombre de mandats, indépendance des administrateurs, etc.

La réévaluation du rôle du comité exécutif afin de mieux l’arrimer aux activités des autres comités.

L’importance du rôle du secrétaire du conseil eu égard à son travail, avant, pendant et après les réunions du conseil.

L’évaluation du processus de gestion des réunions du CA qui met l’accent sur l’amélioration de la dynamique d’équipe et la justification d’un huis clos productif et efficace.

La raison d’être d’un processus d’évaluation annuelle de l’efficacité du conseil et la proposition d’instruments d’auto-évaluation des administrateurs.

Les caractéristiques d’une bonne reddition de compte de la part de la direction générale.

L’intégration des nouveaux administrateurs afin de les rendre opérationnels rapidement.

L’adoption d’un code d’éthique des administrateurs exemplaire.

 

Le maintien de relations harmonieuses et continues entre le président du conseil et le directeur général est, selon mon expérience, absolument essentiel à l’exercice d’une saine gouvernance.

Selon de nombreux auteurs sur l’efficacité des conseils d’administration, il est important que le président ait la légitimité et la crédibilité requises pour gérer une saine tension entre les administrateurs et la direction générale de l’organisation.

Il n’y a pas de place pour la complaisance au conseil. Les administrateurs doivent bien comprendre que leur rôle est de veiller aux « intérêts supérieurs » de la société, et non aux intérêts propres à certains groupes de membres. Les administrateurs ont également la responsabilité de tenir compte des parties prenantes lors de leurs délibérations.

Le directeur général (DG) de la société est embauché par le CA pour gérer et exécuter la mission de l’organisation, en réalisant une stratégie liée à son modèle d’affaires. Lui aussi doit travailler en fonction des intérêts de la société, mais c’est la responsabilité fiduciaire du conseil d’administration de s’en assurer en mettant en place les mécanismes de surveillance appropriés.

La théorie dite de « l’agence », sur laquelle reposent les règles de gouvernance, stipule que le conseil d’administration représente l’autorité souveraine de l’organisation (puisqu’il possède la légitimité que lui confèrent les membres en assemblée générale).

Le CA confie à un DG qui, avec son équipe de gestionnaires, a la responsabilité de réaliser les objectifs stratégiques retenus. Les deux parties — le CA et la direction générale — doivent bien comprendre leurs rôles respectifs, et trouver les bons moyens pour gérer la tension inhérente à l’exercice de la gouvernance et de la gestion.

Les administrateurs doivent s’efforcer d’apporter une valeur ajoutée à la gestion en conseillant la direction sur les meilleures orientations à adopter, ainsi qu’en instaurant un climat d’ouverture, de soutien et de transparence propice à la réalisation de performances élevées.

Il est important de noter que l’organisation s’attend à la loyauté des administrateurs ainsi qu’à leur indépendance d’esprit face à la direction. Les administrateurs sont imputables envers la société. C’est la raison pour laquelle le conseil d’administration doit absolument mettre en place un processus d’évaluation de son fonctionnement et divulguer sa méthodologie.

De plus, il est important de noter qu’à l’instar des administrateurs, le président élu doit loyauté envers l’organisation et le conseil d’administration, et non envers les membres ou les actionnaires.

Les experts en gouvernance suggèrent que les rôles et les fonctions de président de l’organisation soient distincts de ceux du DG. Ils affirment que la séparation des fonctions entre la présidence et la direction générale est généralement bénéfique à l’exercice de la responsabilité de fiduciaire des administrateurs, c’est-à-dire que des pouvoirs différents permettent d’éviter les conflits d’intérêts, tout en assurant la légitimité du processus de gouvernance.

L’un des documents fondamentaux pour un président de CA est la publication  » La présidence du conseil d’administration d’une société d’État  » a été rendue possible grâce à l’appui du ministère du Conseil exécutif du Québec et des partenaires fondateurs du Collège des administrateurs de sociétés (CAS).

Dans ce document, très complet, on retrouve toute l’information essentielle concernant les rôles et les responsabilités des présidents de conseil, notamment à l’égard du directeur général. En voici la table des matières :

 

    1. Quel est le rôle du président envers le CA ?
    2. Quel est le rôle du président à l’égard des membres du CA ?
    3. Quel est le rôle du président d’un CA d’une société d’État à l’égard de son président-directeur général ?
    4. Quel est le rôle du président à l’égard du ministre responsable, de son ministère et des parlementaires ?
    5. Quelle est la responsabilité du président quant à la gouvernance du CA ?
    6. Le président a-t-il une responsabilité particulière quant à l’éthique de l’organisation ?
    7. Quelle est la responsabilité du président quant au recrutement, à l’accueil et au perfectionnement des membres du CA ?
    8. Comment le président peut-il planifier le travail du CA ?
    9. Quelle est la responsabilité du président quant à l’information fournie aux membres du CA ?
    10. Quelle est la responsabilité du président quant aux réunions du CA ?
    11. Quelle est la responsabilité du président à l’égard des comités du CA ?
    12. Quelle est la responsabilité du président relativement à la solidarité des membres et aux possibles dissensions au sein du CA ?
    13. Quelle est la responsabilité du président quant à la performance de l’organisation ?
    14. Quelle est la responsabilité du président du CA à l’égard de la représentation externe de l’organisation ?
    15. Le président a-t-il une responsabilité particulière à l’égard des risques et des crises ?
    16. Quelle est la responsabilité du président dans l’évaluation du conseil d’administration et du PDG ?
    17. Quelle responsabilité le président a-t-il dans la reddition de comptes tant externe qu’interne de son organisation ?
    18. Quelle est la responsabilité du président du CA quant à la relève éventuelle du PDG et à sa propre succession ?
    19. Quelles sont les caractéristiques personnelles et administratives d’un président de CA ?

 

Ce document présente toutes les définitions de fonctions de la présidence ainsi que tous les pouvoirs qui lui sont conférés. Il serait, à mon avis, essentiel que celui-ci serve de base à la rédaction du règlement général. Il pourrait en faire partie intégrante puisque ce texte a été conçu pour les présidents de conseil d’administration en général.

Voici, à titre d’exemple, un extrait de la section 3 portant sur le rôle du président d’un CA à l’égard de son directeur général.

En ce qui a trait à la relation entre le président du CA et le DG, le principe fondamental est simple : le président dirige le CA qui, lui-même, a autorité sur le DG.

« Le président s’assure que le conseil joue pleinement son rôle, notamment à l’égard de l’approbation des orientations stratégiques, de la gestion de la performance et des risques ainsi que de la surveillance effective de la direction.

Par sa position, le président est amené à faire en sorte que la responsabilité de supervision du CA ne s’exerce pas au détriment de celles plus opérationnelles de la direction générale. En effet, le DG est le prolongement du CA dans l’organisation et, à ce titre, c’est lui qui a autorité sur la haute direction et l’effectif de l’organisation ; il n’appartient pas aux membres du CA d’intervenir dans la gestion interne, sauf lorsque la loi le prévoit. Le président du CA doit lui-même respecter, et faire respecter par chacun des membres du conseil, cette limitation de leur champ de responsabilité.

Étant plus fréquemment que les autres membres du CA en contact avec le DG, le président est à même d’appuyer l’action de ce dernier. Pour ce faire, il doit s’assurer que les orientations et les décisions du CA lui laissent la marge de manœuvre et l’autorité qu’il lui faut. Il doit aussi, avec la collaboration du comité des ressources humaines, procéder à l’évaluation de la performance du DG selon le processus et les balises déterminés et en fonction des attentes formulées par le CA.

Des rencontres régulières entre le président du CA et le DG sont indispensables au maintien d’une relation empreinte de confiance. Cette relation privilégiée est d’autant plus importante que, généralement et dans tous les organismes et sociétés assujettis à la Loi sur la gouvernance des sociétés d’État, le DG est d’office membre du conseil d’administration. Tous deux ont avantage à avoir la même compréhension de leur rôle respectif, à partager l’information dont ils disposent avec la plus grande transparence, à faire preuve d’une grande franchise dans leurs échanges et à se soutenir mutuellement dans l’accomplissement de leurs tâches respectives.

Cependant, vu la différence des rôles qu’ils ont à jouer, leur relation ne doit laisser place à aucune complaisance. Ainsi conduite, cette relation devient le gage d’une action globale efficace ».

Au cours des prochaines semaines, j’aborderai les autres problématiques vécues lors de mes interventions-conseils.

Bonne lecture. Vos commentaires sont les bienvenus.

Prix Fidéide | Saine gouvernance


Je me fais le porte-parole du Collège des administrateurs de sociétés (CAS) pour vous sensibiliser au lancement d’un Prix Fidéide visant à reconnaître et encourager les meilleures pratiques en gouvernance : le Fidéide Saine gouvernance.

Le CAS s’associe à nouveau à la Chambre de commerce et d’industrie de Québec (CCIQ) pour la sélection des candidats à ce prix Fidéide.

J’ai donc décidé, à la suite d’une demande de Chantale Coulombe, présidente du Collège des administrateurs de sociétés, d’aider à susciter des candidatures pour ce prestigieux prix en gouvernance. Le prix sera présenté en collaboration avec le cabinet d’avocats Jolicoeur Lacasse.

Voici donc le communiqué que la direction du Collège souhaite partager avec les abonnés de mon blogue.

 

 

Fidéide Saine gouvernance

 

Les critères

Au nombre des critères pour se mériter ce prix, l’entreprise doit avoir en place un comité consultatif ou un conseil d’administration et elle doit s’être distinguée en ayant adopté une ou des pratiques de gouvernance reconnue(s) au cours des trois dernières années que ce soit en lien notamment avec :

(i) la gestion de risque

(ii) les mesures de la performance financière et non financière

(iii) l’implantation de sous-comités

(iv) la parité

(v) les dossiers de ressources humaines

(vi) la relève au sein du CA et\ou au sein de la direction de l’organisation

(vii) le développement durable

(viii) les technologies ou

(iv) la responsabilité sociale.

 

Retour sur le Fidéide Saine Gouvernance 2019

Connus et reconnus dans la grande région de la Capitale-Nationale et de Chaudière-Appalaches, les Fidéides visent à récompenser des entreprises qui se sont démarquées pour des performances exceptionnelles. L’an dernier, pour la toute première fois, la Chambre ajoutait la catégorie Saine gouvernance et c’est la Coopérative des consommateurs de Lorette – Convivio IGA qui a eu l’honneur de décrocher ce premier Fidéide. Deux autres finalistes prestigieux avaient retenu l’attention du jury en 2019, soit : l’Administration portuaire de Québec et le Réseau de transport de la capitale (RTC).

 

Une occasion de reconnaître et d’encourager la saine gouvernance

À titre d’administrateur de sociétés, vous connaissez sans aucun doute des organisations qui mériteraient une telle distinction. Aussi, je vous invite fortement à les inciter à poser leur candidature au plus tard le 5 novembre.

En mettant les projecteurs sur les meilleures pratiques adoptées par ces entreprises, c’est toute la gouvernance des sociétés qui en profitera.

 

Informations et dépôt des candidatures

 

Pour plus de détails, visitez la page Fidéide Saine gouvernance 2020 sur le site du Collège ou encore, rendez-vous sur la page désignée sur le site de la Chambre.

 

Problématiques de gouvernance communes lors d’interventions-conseils auprès de diverses organisations – Partie I – Relations entre président du CA et DG


Lors de mes consultations en gouvernance des sociétés, je constate que j’interviens souvent sur des problématiques communes à un grand nombre d’organisations et qui sont cruciales pour l’exercice d’une gouvernance exemplaire.

Aujourd’hui, j’aborde l’une des plus grandes difficultés qui confrontent les conseils d’administration : la gestion des relations de pouvoir entre le président du CA (et certains administrateurs) et la direction générale.

 

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Dans des billets ultérieurs, je reviendrai sur plusieurs autres problématiques de gouvernance qui font l’objet de préoccupations par les conseils d’administration :

 

La clarification des rôles et responsabilités des principaux acteurs de la gouvernance : (1) conseil d’administration (2) présidence du conseil d’administration (3) direction générale (4) comités du conseil (5) secrétaire du conseil d’administration.

La composition et les rôles des comités du conseil soutenant la gouvernance : (1) comité de gouvernance et d’éthique (2) comité des ressources humaines et (3) comité d’audit.

La révision de la composition du conseil d’administration : nombre d’administrateurs, profils de compétences, types de représentation, durée et nombre de mandats, indépendance des administrateurs, etc.

La réévaluation du rôle du comité exécutif afin de mieux l’arrimer aux activités des autres comités.

L’importance du rôle du secrétaire du conseil eu égard à son travail, avant, pendant et après les réunions du conseil.

L’évaluation du processus de gestion des réunions du CA qui met l’accent sur l’amélioration de la dynamique d’équipe et la justification d’un huis clos productif et efficace.

La raison d’être d’un processus d’évaluation annuelle de l’efficacité du conseil et la proposition d’instruments d’auto-évaluation des administrateurs.

Les caractéristiques d’une bonne reddition de compte de la part de la direction générale.

L’intégration des nouveaux administrateurs afin de les rendre opérationnels rapidement.

L’adoption d’un code d’éthique des administrateurs exemplaire.

 

Le maintien de relations harmonieuses et continues entre le président du conseil et le directeur général est, selon mon expérience, absolument essentiel à l’exercice d’une saine gouvernance.

Selon de nombreux auteurs sur l’efficacité des conseils d’administration, il est important que le président ait la légitimité et la crédibilité requises pour gérer une saine tension entre les administrateurs et la direction générale de l’organisation.

Il n’y a pas de place pour la complaisance au conseil. Les administrateurs doivent bien comprendre que leur rôle est de veiller aux « intérêts supérieurs » de la société, et non aux intérêts propres à certains groupes de membres. Les administrateurs ont également la responsabilité de tenir compte des parties prenantes lors de leurs délibérations.

Le directeur général (DG) de la société est embauché par le CA pour gérer et exécuter la mission de l’organisation, en réalisant une stratégie liée à son modèle d’affaires. Lui aussi doit travailler en fonction des intérêts de la société, mais c’est la responsabilité fiduciaire du conseil d’administration de s’en assurer en mettant en place les mécanismes de surveillance appropriés.

La théorie dite de « l’agence », sur laquelle reposent les règles de gouvernance, stipule que le conseil d’administration représente l’autorité souveraine de l’organisation (puisqu’il possède la légitimité que lui confèrent les membres en assemblée générale).

Le CA confie à un DG qui, avec son équipe de gestionnaires, a la responsabilité de réaliser les objectifs stratégiques retenus. Les deux parties — le CA et la direction générale — doivent bien comprendre leurs rôles respectifs, et trouver les bons moyens pour gérer la tension inhérente à l’exercice de la gouvernance et de la gestion.

Les administrateurs doivent s’efforcer d’apporter une valeur ajoutée à la gestion en conseillant la direction sur les meilleures orientations à adopter, ainsi qu’en instaurant un climat d’ouverture, de soutien et de transparence propice à la réalisation de performances élevées.

Il est important de noter que l’organisation s’attend à la loyauté des administrateurs ainsi qu’à leur indépendance d’esprit face à la direction. Les administrateurs sont imputables envers la société. C’est la raison pour laquelle le conseil d’administration doit absolument mettre en place un processus d’évaluation de son fonctionnement et divulguer sa méthodologie.

De plus, il est important de noter qu’à l’instar des administrateurs, le président élu doit loyauté envers l’organisation et le conseil d’administration, et non envers les membres ou les actionnaires.

Les experts en gouvernance suggèrent que les rôles et les fonctions de président de l’organisation soient distincts de ceux du DG. Ils affirment que la séparation des fonctions entre la présidence et la direction générale est généralement bénéfique à l’exercice de la responsabilité de fiduciaire des administrateurs, c’est-à-dire que des pouvoirs différents permettent d’éviter les conflits d’intérêts, tout en assurant la légitimité du processus de gouvernance.

L’un des documents fondamentaux pour un président de CA est la publication  » La présidence du conseil d’administration d’une société d’État  » a été rendue possible grâce à l’appui du ministère du Conseil exécutif du Québec et des partenaires fondateurs du Collège des administrateurs de sociétés (CAS).

Dans ce document, très complet, on retrouve toute l’information essentielle concernant les rôles et les responsabilités des présidents de conseil, notamment à l’égard du directeur général. En voici la table des matières :

 

    1. Quel est le rôle du président envers le CA ?
    2. Quel est le rôle du président à l’égard des membres du CA ?
    3. Quel est le rôle du président d’un CA d’une société d’État à l’égard de son président-directeur général ?
    4. Quel est le rôle du président à l’égard du ministre responsable, de son ministère et des parlementaires ?
    5. Quelle est la responsabilité du président quant à la gouvernance du CA ?
    6. Le président a-t-il une responsabilité particulière quant à l’éthique de l’organisation ?
    7. Quelle est la responsabilité du président quant au recrutement, à l’accueil et au perfectionnement des membres du CA ?
    8. Comment le président peut-il planifier le travail du CA ?
    9. Quelle est la responsabilité du président quant à l’information fournie aux membres du CA ?
    10. Quelle est la responsabilité du président quant aux réunions du CA ?
    11. Quelle est la responsabilité du président à l’égard des comités du CA ?
    12. Quelle est la responsabilité du président relativement à la solidarité des membres et aux possibles dissensions au sein du CA ?
    13. Quelle est la responsabilité du président quant à la performance de l’organisation ?
    14. Quelle est la responsabilité du président du CA à l’égard de la représentation externe de l’organisation ?
    15. Le président a-t-il une responsabilité particulière à l’égard des risques et des crises ?
    16. Quelle est la responsabilité du président dans l’évaluation du conseil d’administration et du PDG ?
    17. Quelle responsabilité le président a-t-il dans la reddition de comptes tant externe qu’interne de son organisation ?
    18. Quelle est la responsabilité du président du CA quant à la relève éventuelle du PDG et à sa propre succession ?
    19. Quelles sont les caractéristiques personnelles et administratives d’un président de CA ?

 

Ce document présente toutes les définitions de fonctions de la présidence ainsi que tous les pouvoirs qui lui sont conférés. Il serait, à mon avis, essentiel que celui-ci serve de base à la rédaction du règlement général. Il pourrait en faire partie intégrante puisque ce texte a été conçu pour les présidents de conseil d’administration en général.

Voici, à titre d’exemple, un extrait de la section 3 portant sur le rôle du président d’un CA à l’égard de son directeur général.

En ce qui a trait à la relation entre le président du CA et le DG, le principe fondamental est simple : le président dirige le CA qui, lui-même, a autorité sur le DG.

« Le président s’assure que le conseil joue pleinement son rôle, notamment à l’égard de l’approbation des orientations stratégiques, de la gestion de la performance et des risques ainsi que de la surveillance effective de la direction.

Par sa position, le président est amené à faire en sorte que la responsabilité de supervision du CA ne s’exerce pas au détriment de celles plus opérationnelles de la direction générale. En effet, le DG est le prolongement du CA dans l’organisation et, à ce titre, c’est lui qui a autorité sur la haute direction et l’effectif de l’organisation ; il n’appartient pas aux membres du CA d’intervenir dans la gestion interne, sauf lorsque la loi le prévoit. Le président du CA doit lui-même respecter, et faire respecter par chacun des membres du conseil, cette limitation de leur champ de responsabilité.

Étant plus fréquemment que les autres membres du CA en contact avec le DG, le président est à même d’appuyer l’action de ce dernier. Pour ce faire, il doit s’assurer que les orientations et les décisions du CA lui laissent la marge de manœuvre et l’autorité qu’il lui faut. Il doit aussi, avec la collaboration du comité des ressources humaines, procéder à l’évaluation de la performance du DG selon le processus et les balises déterminés et en fonction des attentes formulées par le CA.

Des rencontres régulières entre le président du CA et le DG sont indispensables au maintien d’une relation empreinte de confiance. Cette relation privilégiée est d’autant plus importante que, généralement et dans tous les organismes et sociétés assujettis à la Loi sur la gouvernance des sociétés d’État, le DG est d’office membre du conseil d’administration. Tous deux ont avantage à avoir la même compréhension de leur rôle respectif, à partager l’information dont ils disposent avec la plus grande transparence, à faire preuve d’une grande franchise dans leurs échanges et à se soutenir mutuellement dans l’accomplissement de leurs tâches respectives.

Cependant, vu la différence des rôles qu’ils ont à jouer, leur relation ne doit laisser place à aucune complaisance. Ainsi conduite, cette relation devient le gage d’une action globale efficace ».

Au cours des prochaines semaines, j’aborderai les autres problématiques vécues lors de mes interventions-conseils.

Bonne lecture. Vos commentaires sont les bienvenus.

Recommandations pour l’amélioration de la gouvernance des organismes publics au Québec


Je suis tout à fait d’accord avec la teneur de l’article de l’IGOPP, publié par Yvan Allaire* intitulé « Six mesures pour améliorer la gouvernance des organismes publics au Québec», lequel dresse un état des lieux qui soulève des défis considérables pour l’amélioration de la gouvernance dans le secteur public et propose des mesures qui pourraient s’avérer utiles. Celui-ci fut a été soumis au journal Le Devoir, pour publication.

L’article soulève plusieurs arguments pour des conseils d’administration responsables, compétents, légitimes et crédibles aux yeux des ministres responsables.

Même si la Loi sur la gouvernance des sociétés d’État a mis en place certaines dispositions qui balisent adéquatement les responsabilités des C.A., celles-ci sont poreuses et n’accordent pas l’autonomie nécessaire au conseil d’administration, et à son président, pour effectuer une véritable veille sur la gestion de ces organismes.

Selon l’auteur, les ministres contournent allègrement les C.A., et ne les consultent pas. La réalité politique amène les ministres responsables à ne prendre principalement avis que du PDG ou du président du conseil : deux postes qui sont sous le contrôle et l’influence du ministère du conseil exécutif ainsi que des ministres responsables des sociétés d’État (qui ont trop souvent des mandats écourtés !).

Rappelons, en toile de fond à l’article, certaines dispositions de la loi :

– Au moins les deux tiers des membres du conseil d’administration, dont le président, doivent, de l’avis du gouvernement, se qualifier comme administrateurs indépendants.

– Le mandat des membres du conseil d’administration peut être renouvelé deux fois

– Le conseil d’administration doit constituer les comités suivants, lesquels ne doivent être composés que de membres indépendants :

1 ° un comité de gouvernance et d’éthique ;

2 ° un comité d’audit ;

3 ° un comité des ressources humaines.

– Les fonctions de président du conseil d’administration et de président-directeur général de la société ne peuvent être cumulées.

– Le ministre peut donner des directives sur l’orientation et les objectifs généraux qu’une société doit poursuivre.

– Les conseils d’administration doivent, pour l’ensemble des sociétés, être constitués à parts égales de femmes et d’hommes.

Yvan a accepté d’agir en tant qu’auteur invité dans mon blogue en gouvernance. Voici donc son article.

 

Six mesures pour améliorer la gouvernance des organismes publics au Québec

par Yvan Allaire*

 

La récente controverse à propos de la Société immobilière du Québec a fait constater derechef que, malgré des progrès certains, les espoirs investis dans une meilleure gouvernance des organismes publics se sont dissipés graduellement. Ce n’est pas tellement les crises récurrentes survenant dans des organismes ou sociétés d’État qui font problème. Ces phénomènes sont inévitables même avec une gouvernance exemplaire comme cela fut démontré à maintes reprises dans les sociétés cotées en Bourse. Non, ce qui est remarquable, c’est l’acceptation des limites inhérentes à la gouvernance dans le secteur public selon le modèle actuel.

 

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En fait, propriété de l’État, les organismes publics ne jouissent pas de l’autonomie qui permettrait à leur conseil d’administration d’assumer les responsabilités essentielles qui incombent à un conseil d’administration normal : la nomination du PDG par le conseil (sauf pour la Caisse de dépôt et placement, et même pour celle-ci, la nomination du PDG par le conseil est assujettie au veto du gouvernement), l’établissement de la rémunération des dirigeants par le conseil, l’élection des membres du conseil par les « actionnaires » sur proposition du conseil, le conseil comme interlocuteur auprès des actionnaires.

Ainsi, le C.A. d’un organisme public, dépouillé des responsabilités qui donnent à un conseil sa légitimité auprès de la direction, entouré d’un appareil gouvernemental en communication constante avec le PDG, ne peut que difficilement affirmer son autorité sur la direction et décider vraiment des orientations stratégiques de l’organisme.

Pourtant, l’engouement pour la « bonne » gouvernance, inspirée par les pratiques de gouvernance mises en place dans les sociétés ouvertes cotées en Bourse, s’était vite propagé dans le secteur public. Dans un cas comme dans l’autre, la notion d’indépendance des membres du conseil a pris un caractère mythique, un véritable sine qua non de la « bonne » gouvernance. Or, à l’épreuve, on a vite constaté que l’indépendance qui compte est celle de l’esprit, ce qui ne se mesure pas, et que l’indépendance qui se mesure est sans grand intérêt et peut, en fait, s’accompagner d’une dangereuse ignorance des particularités de l’organisme à gouverner.

Ce constat des limites des conseils d’administration que font les ministres et les ministères devrait les inciter à modifier ce modèle de gouvernance, à procéder à une sélection plus serrée des membres de conseil, à prévoir une formation plus poussée des membres de C.A. sur les aspects substantifs de l’organisme dont ils doivent assumer la gouvernance.

Or, l’État manifeste plutôt une indifférence courtoise, parfois une certaine hostilité, envers les conseils et leurs membres que l’on estime ignorants des vrais enjeux et superflus pour les décisions importantes.

Évidemment, le caractère politique de ces organismes exacerbe ces tendances. Dès qu’un organisme quelconque de l’État met le gouvernement dans l’embarras pour quelque faute ou erreur, les partis d’opposition sautent sur l’occasion, et les médias aidant, le gouvernement est pressé d’agir pour que le « scandale » s’estompe, que la « crise » soit réglée au plus vite. Alors, les ministres concernés deviennent préoccupés surtout de leur contrôle sur ce qui se fait dans tous les organismes sous leur responsabilité, même si cela est au détriment d’une saine gouvernance.

Ce brutal constat fait que le gouvernement, les ministères et ministres responsables contournent les conseils d’administration, les consultent rarement, semblent considérer cette agitation de gouvernance comme une obligation juridique, un mécanisme pro-forma utile qu’en cas de blâme à partager.

Prenant en compte ces réalités qui leur semblent incontournables, les membres des conseils d’organismes publics, bénévoles pour la plupart, se concentrent alors sur les enjeux pour lesquels ils exercent encore une certaine influence, se réjouissent d’avoir cette occasion d’apprentissage et apprécient la notoriété que leur apporte dans leur milieu ce rôle d’administrateur.

Cet état des lieux, s’il est justement décrit, soulève des défis considérables pour l’amélioration de la gouvernance dans le secteur public. Les mesures suivantes pourraient s’avérer utiles :

  1. Relever considérablement la formation donnée aux membres de conseil en ce qui concerne les particularités de fonctionnement de l’organisme, ses enjeux, ses défis et critères de succès. Cette formation doit aller bien au-delà des cours en gouvernance qui sont devenus quasi-obligatoires. Sans une formation sur la substance de l’organisme, un nouveau membre de conseil devient une sorte de touriste pendant un temps assez long avant de comprendre suffisamment le caractère de l’organisation et son fonctionnement.
  2. Accorder aux conseils d’administration un rôle élargi pour la nomination du PDG de l’organisme ; par exemple, le conseil pourrait, après recherche de candidatures et évaluation de celles-ci, recommander au gouvernement deux candidats pour le choix éventuel du gouvernement. Le conseil serait également autorisé à démettre un PDG de ses fonctions, après consultation du gouvernement.
  3. De même, le gouvernement devrait élargir le bassin de candidats et candidates pour les conseils d’administration, recevoir l’avis du conseil sur le profil recherché.
  4. Une rémunération adéquate devrait être versée aux membres de conseil ; le bénévolat en ce domaine prive souvent les organismes de l’État du talent essentiel au succès de la gouvernance.
  5. Rendre publique la grille de compétences pour les membres du conseil dont doivent se doter la plupart des organismes publics ; fournir une information détaillée sur l’expérience des membres du conseil et rapprocher l’expérience/expertise de chacun de la grille de compétences établie. Cette information devrait apparaître sur le site Web de l’organisme.
  6. Au risque de trahir une incorrigible naïveté, je crois que l’on pourrait en arriver à ce que les problèmes qui surgissent inévitablement dans l’un ou l’autre organisme public soient pris en charge par le conseil d’administration et la direction de l’organisme. En d’autres mots, en réponse aux questions des partis d’opposition et des médias, le ministre responsable indique que le président du conseil de l’organisme en cause et son PDG tiendront incessamment une conférence de presse pour expliquer la situation et présenter les mesures prises pour la corriger. Si leur intervention semble insuffisante, alors le ministre prend en main le dossier et en répond devant l’opinion publique.

_______________________________________________

*Yvan Allaire, Ph. D. (MIT), MSRC Président exécutif du conseil, IGOPP Professeur émérite de stratégie, UQÀM

Les politiques des Cégeps et la gouvernance créatrice de valeur


Nous publions ici un billet de Danielle Malboeuf* qui nous renseigne sur une gouvernance créatrice de valeur eu égard à la gestion des CÉGEP.

Comme à l’habitude, Danielle nous propose son article à titre d’auteure invitée.

Je vous souhaite bonne lecture. Vos commentaires sont appréciés.

 

Cégeps : politiques et gouvernance

par

Danielle Malboeuf*  

 

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Un enjeu à ne pas négliger

 

Chaque année, des personnes motivées et intéressées investissent leur temps et leur énergie dans les conseils d’administration (CA) des collèges. Elles surveillent particulièrement la gestion financière du collège et assurent une utilisation efficace et efficiente des sommes d’argent qui y sont dédiées. Toutefois, comme j’ai pu le constater lors de mes échanges avec des administrateurs, ces personnes souhaitent jouer un rôle qui va au-delà de celui de « fiduciaire ». Elles veulent avoir une contribution significative à la mission première du Cégep : donner une formation pertinente et de qualité où l’étudiant et sa réussite éducative sont au cœur des préoccupations. Elles désirent ainsi soutenir les cégeps dans leur volonté d’améliorer leur efficacité et leur efficience, de se développer et d’assurer la qualité et la pertinence de leurs services. Le nouveau mode de gouvernance qui est actuellement encouragé dans les institutions tant publiques que privées répond à ces attentes. Il s’agit d’une « gouvernance créatrice de valeurs » (1). Ce mode de gouvernance permet à chacun de contribuer sur la base de ses expériences et compétences au développement de nos collèges.

Pour permettre au CA de jouer pleinement son rôle de « créateur de valeurs », les collèges doivent compter sur des administrateurs compétents qui veillent au respect de ses obligations et à l’atteinte de haut niveau de performance. D’ailleurs, dans la suite de la parution d’un rapport de la vérificatrice générale en 2016 portant sur la gestion administrative des cégeps (2), j’ai rédigé un article dans lequel, je rappelais l’importance d’avoir, au sein des conseils d’administration (CA) des collèges, des administrateurs compétents qui ont, entre autres, une bonne connaissance des politiques, directives et exigences réglementaires en vigueur afin de répondre adéquatement aux attentes formulées dans ce rapport. La vérificatrice générale y recommandait entre autres, au regard des modes de sollicitation, le respect de la réglementation et des politiques internes (3). Il m’apparaît donc essentiel que les administrateurs soient en mesure d’évaluer régulièrement leur pertinence et leur mise en application.

Ainsi, parmi les responsabilités confiées au conseil, on retrouve celles-ci (4) :

  1. s’assurer que l’institution est administrée selon des normes reconnues et en conformité avec les lois.
  2. définir les politiques et les règlements de l’institution, les réviser périodiquement et s’assurer qu’ils sont appliqués.

 

Les collèges ont cinquante ans. Tout au cours de ces années, on a élaboré et mis en œuvre de nombreuses politiques et règlements qui ont été adoptés par les CA. Ces documents sont apparus au fil des ans pour répondre à des exigences légales et ministérielles, mais également à des préoccupations institutionnelles. Pour assurer l’application de ces politiques et règlements, les gestionnaires ont produit des outils de gestion : programmes, directives et procédures. On retrouve donc dans les collèges, des Cahiers de gestion qui regroupent tous ces documents et qui amènent des défis de mise en œuvre, de suivi et de révision.

Des collèges reconnaissent ces défis. En effet, la Commission d’évaluation de l’enseignement collégial (CEEC) fait le constat suivant dans son bilan des travaux portant sur l’évaluation de l’efficacité des systèmes d’assurance qualité. « Certains collèges ont entrepris…, la mise en place d’outils de gestion concertée et intégrée de la qualité ». « Certains collèges estiment toutefois que du travail reste à faire pour améliorer la synergie entre les mécanismes » (5).

Considérant les préoccupations actuelles et les attentes formulées par la Vérificatrice générale, j’invite tous les collèges à se doter de mécanismes au regard des politiques et règlements qui s’inscrivent dans les bonnes pratiques de gouvernance :

  1. Valider la pertinence de toute cette documentation ;

D’abord, les administrateurs doivent connaître le contenu des politiques et règlements, car ils ont, rappelons-le, la responsabilité de s’assurer qu’ils sont appliqués. Ils doivent également valider que tous ces documents sont encore pertinents. Constate-t-on des redondances ? Si c’est le cas, il faut apporter des correctifs.

2. Assurer la cohérence de toute cette documentation ;

À la lecture de documents institutionnels, on constate que les termes politiques, règlements, programmes, directives et procédures n’ont pas la même signification d’un collège à l’autre et à l’intérieur d’un même collège. On note la présence de politiques et de programmes qui sont rattachés au même objet. Alors qu’une politique est un ensemble d’orientation et de principes, un programme est un « ensemble des intentions d’action et des projets que l’institution doit mettre en œuvre pour respecter les orientations gouvernementales ou institutionnelles. »

À titre d’exemple, pour se conformer à une exigence ministérielle, les collèges ont élaboré, il y a plusieurs années, une Politique de gestion des ressources humaines pour le personnel membre d’une association accréditée au sens du Code du travail (on exclut ici les hors-cadre et cadres). Cette politique devait inclure des dispositions concernant l’embauche, l’insertion professionnelle, l’évaluation et le perfectionnement de ces employés. Dans certains collèges, ces dispositions se sont traduites par des programmes et d’autres par des politiques. Dans un même collège, on peut retrouver pour l’évaluation du personnel, un programme pour certaines catégories de personnel et une politique pour d’autres employés. Rappelons encore ici que le CA porte un regard sur les politiques et non les programmes. Cela pose un problème de cohérence, mais également d’équité.

De plus, on peut retrouver dans une politique des modalités de fonctionnement. Rappelons qu’une politique est un « ensemble d’orientations et de principes qui encadrent les actions que doit mettre en œuvre l’institution en vue d’atteindre les principes généraux préalablement fixés par le Ministère ou le CA. » Donc, dans une politique, on ne devrait pas retrouver des actions ou des modalités de fonctionnement qui s’apparentent à des directives ou des procédures. Le CA n’a pas à d’adopter des modalités de fonctionnement, car c’est une responsabilité de la direction générale.

3. Valider l’applicabilité des politiques et règlements en vigueur

Tel que suggéré par l’IGOPP (Institut sur la gouvernance d’organisations privées et publiques), le comité d’audit devrait avoir, entre autres, le mandat de :

Prendre connaissance au moins une fois l’an des mesures de conformité aux lois, règlements et politiques (6).

Un exemple de l’importance pour le CA de s’assurer de l’application des Lois et politiques est celle liée à la gestion contractuelle. La Loi sur les contrats dans les organismes publics demande à chaque collège de nommer un responsable de l’observation des règles contractuelles (RORC). Cette personne doit transmettre au CA et au Secrétariat du Conseil du trésor un rapport qui fait état de ses activités, de ses observations et de ses recommandations. Le but visé est de valider que la gestion contractuelle du collège se conforme à la loi, aux directives et aux règlements (du gouvernement et du collège). Il faut s’assurer que cela soit fait.

4. Procéder à la révision de ces politiques et règlements de façon systématique ;

La majorité des politiques et des règlements prévoient des moments de révision. A-t-on un calendrier de suivi à cet effet ?

J’encourage donc les conseils d’administration des collèges et les gestionnaires à inscrire la validation et l’évolution des politiques et règlements, à leurs priorités institutionnelles. On permet ainsi aux administrateurs de jouer pleinement leur rôle et de participer au développement de nos institutions.


(1) Le modèle de gouvernance « Créatrice de valeurs »®, préconisé par l’Institut sur la gouvernance d’organisations privées et publiques est celui développé par le professeur Yvan Allaire, président exécutif du conseil de l’IGOPP.

(2) Rapport du Vérificateur général du Québec à l’Assemblée nationale pour l’année 2016-2017, Gestion administrative des cégeps, Automne 2016

(3) idem, p.4

(4) Extraits du séminaire sur la gouvernance ; vers une gouvernance « Créatrice de valeurs », IGOPP (Institut sur la gouvernance d’organisations privées et publiques)

(5) Bilan de l’an 3-2016-2017, principaux constats découlant des audits de l’an 3, Évaluation de l’efficacité des systèmes d’assurance qualité des collèges québécois, p.20

(6) Extrait du séminaire sur la gouvernance ; vers une gouvernance « Créatrice de valeurs », IGOPP (Institut sur la gouvernance d’organisations privées et publiques), charte du comité de vérification et de finances.

_____________________________________

*Danielle Malboeuf est consultante et formatrice en gouvernance ; elle possède une grande expérience dans la gestion des CÉGEPS et dans la gouvernance des institutions d’enseignement collégial et universitaire. Elle est CGA-CPA, MBA, ASC, Gestionnaire et administratrice retraitée du réseau collégial et consultante.


 

Articles sur la gouvernance des CÉGEPS publiés sur mon blogue par l’auteure :

 

(1) LE RÔLE DU PRÉSIDENT DU CONSEIL D’ADMINISTRATION (PCA) | LE CAS DES CÉGEPS

(2) Les grands enjeux de la gouvernance des institutions d’enseignement collégial

(3) L’exercice de la démocratie dans la gouvernance des institutions d’enseignement collégial

(4) Caractéristiques des bons administrateurs pour le réseau collégial | Danielle Malboeuf

(5) La gouvernance des CÉGEPS | Une responsabilité partagée

(6) La gouvernance des Cégeps | Le rapport du Vérificateur général du Québec

Quand les opinions d’un président de compagnie deviennent-elles un sujet de préoccupation pour le CA ? | Un cas pratique


Voici un cas publié, sur le site de Julie Garland McLellan, qui met l’accent sur une problématique particulière pouvant ébranler la réputation d’une entreprise.

Quand une déclaration d’un président sur les médias sociaux (notamment Facebook) constitue-t-elle une entorse à la saine gestion d’une entreprise ? Comment un président peut-il faire connaître son point de vue sur une politique gouvernementale sans affecter la réputation de l’entreprise ?

Qui est responsable de proposer une stratégie pour réparer les pots cassés. Dans ce cas, à mon avis, le président du conseil est appelé à intervenir pour éviter les débordements sur la place publique et résorber une crise potentielle de réputation, le président sortant Finneas a également un rôle important à jouer.

Le cas est bref, mais présente la situation de manière assez explicite ; puis, trois experts se prononcent sur le dilemme que vit le président du conseil.

Bonne lecture ! Vos commentaires sont toujours les bienvenus.

 

Risques associés aux communications publiques des CEO sur les réseaux sociaux | un cas pratique

 

 

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Finneas chairs a medium-sized listed company board. He has been with the company through a very successful CEO transition and is enjoying the challenge of helping the new CEO to hone his leadership of the company.

The CEO has proved a good choice and the staff are settled and productive. Recently the government announced a new policy that will most likely increase the cost of doing business and decrease export competitiveness.

The CEO is rightly concerned. He has already made some personal statements opposing the policy – calling it ‘Stupid and short-sighted industrial vandalism’ – on his Facebook page. Fortunately, the CEO keeps his Facebook account mainly for friends and family so Finneas felt the comments hadn’t attracted much attention.

At his most recent meeting with the CEO, Finneas heard that a journalist had seen the comments and called the CEO asking if he would be prepared to participate in an interview. The CEO is excited at the opportunity to stimulate public debate about the issue. Finneas is more concerned that the CEO will cause people to think poorly of himself, as a harsh critic, and of the company. There are a couple of days before the scheduled interview.

How should Finneas proceed?

Voir les réponses de trois experts de la gouvernance | http://www.mclellan.com.au/archive/dilemma_201811.html

L’activisme actionnarial sans frontières et sans limites


L’activisme actionnarial est de plus en plus en vogue dans les grandes entreprises publiques, partout à l’échelle de la planète.

Selon François Dauphin, ce phénomène mondial est dommageable à plusieurs titres. Son article soulève plusieurs exemples d’organisations qui ont été la cible d’attaques de la part de fonds de couverture (hedge funds).

Les effets négatifs de ce mouvement sont encore trop méconnus des Québécois et plusieurs grandes entreprises ne sont pas suffisamment vigilantes à cet égard. L’auteur mentionne les cas d’entreprises de chez nous qui ont été ciblées.

Les recherches qu’il a menées avec Yvan Allaire de l’IGOPP ont démontré « que les rendements obtenus par les activistes n’étaient pas supérieurs à ceux d’un groupe d’entreprises comparables, sauf lorsque les entreprises ciblées étaient vendues. Lorsque des améliorations opérationnelles étaient constatées, celles-ci provenaient essentiellement de la vente d’actifs, d’une réduction des investissements en capital ou en recherche et développement, de rachat d’actions ou d’une réduction du nombre d’employés. Bref, les avantages sur le plan du rendement financier s’expliquaient par des manœuvres à courte vue ».

François a accepté d’agir en tant qu’auteur invité dans mon blogue en gouvernance. Voici donc son article ; vos commentaires sont les bienvenus.

Bonne lecture !

 

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Qu’est-ce que l’activisme actionnarial ? Définition d’une pratique aux multiples visages

 

L’activisme actionnarial sans frontières et sans limites

par François Dauphin*

Chargé de cours ESG-UQAM

 

 

Dans le cadre d’une conférence donnée à New York le 9 octobre dernier, Bill Ackman a dévoilé, dans son style habituel, que le fonds de couverture qu’il dirige, Pershing Square, a fait l’acquisition de 15,2 millions d’actions de Starbucks (une valeur de près de 900 millions de dollars). Après l’annonce, l’action a grimpé de 5 %, avant de clôturer la séance en hausse de 1,5 %, et le prix est demeuré relativement stable depuis, malgré la correction subie par les marchés durant la même période.

Les coups d’éclat se multiplient chaque année. Aux États-Unis, l’emblématique Campbell Soup est actuellement aux prises avec l’activiste Dan Loeb, de Third Point, qui menace de renverser le conseil d’administration au complet afin de prendre le contrôle de la compagnie. Le conseil en place se défend, accusant l’activiste de souhaiter faire vendre la compagnie en totalité ou en pièces détachées. L’ultime jury, composé des actionnaires de la compagnie, tranchera le 29 novembre prochain au moment de l’élection des 12 membres du conseil lors de l’assemblée annuelle.

Le phénomène de l’activisme actionnarial demeure relativement méconnu au Québec. Pourtant, des sociétés canadiennes ont fait l’objet d’attaques, parfois répétées, de ces actionnaires aux objectifs résolument à court terme. Seulement au cours de la dernière année, des sociétés comme HBC, Power Corp, Open Text et Aimia ont été ciblées. Elles s’ajoutent aux Canadien Pacifique, Tim Hortons et autres sociétés qui ont été profondément transformées par le passage d’un investisseur activiste au sein de leur actionnariat.

Le phénomène ne s’essouffle pas, bien au contraire. Selon les données compilées par la firme américaine Lazard, 62 milliards de dollars ont été déployés par 108 activistes dans le cadre de 193 campagnes activistes en 2017 (dans des entreprises ciblées ayant des capitalisations boursières de 500 millions de dollars ou plus [1]). Après 6 mois en 2018, 145 campagnes ciblant 136 entreprises ont déjà été enregistrées, un nouveau record.

Et ces campagnes portent fruit… Au cours de l’année 2017, les activistes ont ainsi gagné 100 sièges aux conseils d’administration d’entreprises ciblées, et un total de 551 administrateurs auront été déboulonnés au cours des cinq dernières années en conséquence d’attaques activistes. Voilà une statistique qui devrait faire réfléchir tout administrateur qui se croit en position immuable, incluant nos administrateurs québécois qui pourraient se croire à l’abri de telles agitations.

L’activisme actionnarial n’est plus limité à l’Amérique du Nord. Après diverses incursions au Japon au cours des dernières années, on voit maintenant de plus en plus de sociétés européennes ciblées par ces campagnes, incluant des entreprises que l’on croyait à l’épreuve de telles manœuvres. En effet, Nestlé (vives critiques sur la stratégie, avec une demande de recentrer les activités) et Crédit Suisse (demande de scission de la banque en trois entités), par exemple, ont été au cœur de campagnes virulentes. 33 campagnes activistes européennes ont déjà été entamées au cours du premier semestre de 2018.

Les rendements justifient-ils cette recrudescence de cas ?

Dans une étude menée par l’IGOPP [2], il avait été démontré que les rendements obtenus par les activistes n’étaient pas supérieurs à ceux d’un groupe d’entreprises comparables, sauf lorsque les entreprises ciblées étaient vendues. Lorsque des améliorations opérationnelles étaient constatées, celles-ci provenaient essentiellement de la vente d’actifs, d’une réduction des investissements en capital ou en recherche et développement, de rachat d’actions ou d’une réduction du nombre d’employés. Bref, les avantages sur le plan du rendement financier s’expliquaient par des manœuvres à courte vue. Ces constats ont été maintes fois observés dans des études subséquentes, mais une divergence idéologique demeure profondément ancrée dans certains milieux académiques (et financiers) soutenant sans réserve les bienfaits de l’activisme actionnarial.

Les rendements réels des fonds activistes font également réfléchir sur le bien-fondé de cette excitation qui perturbe grandement les activités des entreprises ciblées. Pershing Square, le fonds dirigé par Ackman, est une société inscrite à la bourse et publie donc des résultats annuellement. Les rendements nets du fonds : -20,5 %, -13,5 % et -4,0 % en 2015, 2016 et 2017 respectivement. Ces rendements sont comparés à ceux du S&P 500 qui ont été de 1,4 %, 11,9 % et 21,8 % pour les trois mêmes années. Peu impressionnant.

Les 16 hauts dirigeants du fonds Pershing Square se sont néanmoins partagé la modique somme de 81,6 millions de dollars en rémunération en 2017, soit une moyenne de 5,1 millions par individu. Il est vrai qu’il s’agissait là d’une importante réduction comparativement aux dernières années, dont 2015, alors que les 18 membres de la haute direction s’étaient partagé 515,4 millions de dollars (une moyenne de 28,6 millions par individu).

Si les bienfaits pour les entreprises ciblées demeurent à prouver, le bénéfice pour les activistes eux-mêmes n’est assurément plus à démontrer. Pourtant, de nombreux administrateurs de régimes de retraite se laissent tenter à investir dans ces fonds de couverture activistes sous le mirage de rendements alléchants, alors que, ironiquement, les conséquences des campagnes activistes affectent généralement en premier lieu les travailleurs pour lesquels ils administrent cet argent, un fait souvent décrié par Leo E. Strine Jr., juge en chef de la Cour Suprême du Delaware. Ces travailleurs, paradoxalement, fourbissent donc eux-mêmes l’arme de leur bourreau en épargnant dans des régimes collectifs. Les administrateurs de tels régimes qui appuient les activistes devraient réviser leur stratégie de placement à la lumière d’un nécessaire examen de conscience.

[1] Selon Activist Insight, l’année 2017 a été marquée par 805 campagnes activistes en faisant abstraction du critère de la taille des entreprises ciblées.

[2] Allaire Y, et F. Dauphin, « The game of activist hedge funds: Cui bono ? », International Journal of Disclosure and Governance, Vol. 13, no 4, novembre 2016, pp.279-308.

 


*François Dauphin, MBA, CPA, CMA

François est actuellement vice-président directeur pour Ellix Gestion Condo, une firme spécialisée dans la gestion de syndicats de copropriété de grande envergure au centre-ville de Montréal. Auparavant, François était Directeur de la recherche de l’Institut sur la gouvernance d’organisations privées et publiques (IGOPP) où il était notamment responsable des activités de recherche et de publication sur des sujets reliés la gouvernance corporative et à la réglementation financière. Avant de se joindre à l’IGOPP, François a travaillé pour l’Ordre des comptables professionnels agréés du Québec (CPA) dans le cadre du programme de formation continue en management et en comptabilité de management; il demeure impliqué auprès de l’Ordre à titre de membre du Groupe de travail en gouvernance et planification stratégique. François cumule une expérience professionnelle de plus d’une vingtaine d’années en entreprise, dont plusieurs à des fonctions de haute direction. Il a toujours maintenu un lien avec l’enseignement en parallèle à ses activités professionnelles; il est chargé de cours à l’UQAM où il enseigne la stratégie des affaires depuis 2008. Membre de l’Ordre des comptables professionnels agréés du Québec, François détient un MBA de l’Université du Québec à Montréal.

Gouvernance des sociétés d’État | une étude montre des problèmes dans la moitié d’entre elles


Yvan Allaire, président exécutif du conseil de l’Institut sur la gouvernance (IGOPP) vient de publier, en collaboration avec François Dauphin, un nouveau document de recherche intitulé « Nos sociétés d’État sont-elles bien gouvernées ? » lequel a fait l’objet d’une analyse succincte par le journaliste Gérald Fillion de la Société Radio-Canada.

Selon l’IGOPP, « les contribuables s’attendent à ce que ces sociétés fassent bon usage des fonds publics qui leur sont confiés, que leur gestion soit efficace, efficiente et transparente, que leur mandat soit clair et pertinent. Leur conseil d’administration, s’appuyant sur des règles et principes de saine gouvernance, devrait jouer un rôle essentiel à cet égard ».

Je crois que ce rapport de recherche saura intéresser les spécialistes de la gouvernance qui œuvrent dans les sociétés d’État et dans les autres organisations parapubliques. Personnellement, je crois que les auteurs ont élaboré une méthodologie de recherche tout à fait pertinente pour évaluer la bonne gouvernance, non seulement des sociétés d’État, mais également de tous les types d’organisation.

 

 

Vous trouverez ci-dessous une analyse de Gérald Filion, suivie de la référence au document de recherche de l’IGOPP.

 

Sur 46 sociétés d’État au Québec seulement 23 obtiennent la note de passage en matière de gouvernance, selon une étude préparée par les chercheurs Yvan Allaire et François Dauphin.

Si les grandes sociétés se démarquent, notamment la Caisse de dépôt, la SAQ et Loto-Québec, d’autres affichent de faibles résultats qui pourraient amener le gouvernement à devoir repenser leur modèle de gouvernance. Parmi les derniers de classe, on compte l’École nationale de police, le Musée national des beaux-arts de Québec et l’Institut de tourisme et d’hôtellerie du Québec.

Ce rapport, publié jeudi par l’Institut sur la gouvernance d’entreprises publiques et privées, s’intéresse à 47 instruments de mesure de la gouvernance des sociétés pour établir un pointage sur 100. La note de passage est établie à 60. Ont été exclues de l’étude 13 sociétés jugées inactives dans les faits ou trop petites. Les 46 sociétés d’État retenues encaissent annuellement des revenus de 63 milliards de dollars et comptent 65 000 employés.

L’Institut sur la gouvernance évalue les sociétés sur les compétences des administrateurs, la transparence, la reddition de compte, la structure du conseil et le déroulement des séances du conseil. Et les résultats sont très inégaux.

L’École nationale de police échoue sur tous les plans, tout particulièrement sur les questions de compétence et de nomination. À l’autre bout du spectre, la Société d’habitation du Québec se démarque à tous les niveaux, avec une note parfaite dans la composition et la structure de son conseil, qui touche surtout à la question de l’indépendance.

L’Institut recommande au gouvernement de revoir certaines lois jugées « désuètes » pour encadrer les sociétés, de rendre publics les profils d’expertise et d’expérience des administrateurs et une foule d’informations pertinentes à leur propos.

Il propose aussi que le gouvernement cesse de rendre le dépôt du rapport annuel des sociétés d’État obligatoire à l’Assemblée nationale avant de le rendre public. Les rapports doivent être disponibles dans des délais plus rapides selon l’Institut sur la gouvernance. Actuellement, il faut attendre 6 mois en moyenne après la fin de l’exercice pour avoir accès au rapport annuel.

Les conseils d’administration des sociétés d’État, écrivent les chercheurs, doivent adopter des principes qui dépassent les exigences de la loi, surtout au chapitre de la « divulgation des profils de compétence, divulgation non obligatoire, mais non prohibée. »

Les conseils doivent s’assurer également que l’information, sur les sites internet des sociétés d’État, est facilement accessible, notamment les résultats de la société, ses stratégies ainsi que les indicateurs de performance. De plus, « une divulgation exhaustive des éléments de rémunération des hauts dirigeants est incontournable. »

Le gouvernement se mêle de tout

L’Institut illustre, chiffres à l’appui, combien le gouvernement s’assure de garder le contrôle sur les nominations des administrateurs.

« Ainsi, écrivent Yvan Allaire et François Dauphin, dans seulement cinq cas avons-nous trouvé une participation claire de la part du conseil dans le processus de sélection des candidats et candidates au poste d’administrateur. Bien sûr, le manque de transparence fausse peut-être en partie les données pour cet élément. Néanmoins, la participation du conseil dans le processus de sélection est extrêmement importante pour assurer non seulement la présence de compétences et d’expériences complémentaires au groupe, mais aussi pour faciliter l’obtention (ou le maintien) d’une dynamique de groupe fonctionnelle. »

Sur les 46 sociétés d’État, seulement trois établissent publiquement sur leur site un lien entre la biographie des administrateurs et les compétences recherchées au conseil.

L’Institut sur la gouvernance est d’avis également qu’une personne ne devrait pas siéger à plus de cinq conseils d’administration en même temps. Or, « au moins quinze (32,6 %) des sociétés comptaient au minimum un membre du conseil siégeant sur plus de cinq conseils d’administration, incluant quelques présidents de conseil. »

Aussi, « 19 sociétés (41,3 %) ne fournissent pas l’information sur l’assiduité des membres aux réunions du conseil. »

Les auteurs constatent également qu’il y a « une différence importante entre les organisations assujetties à la Loi québécoise sur la gouvernance des sociétés d’État promulguée en 2006 et celles qui ne le sont pas. En effet, les sociétés assujetties doivent divulguer davantage d’information, ne serait-ce que pour s’y conformer. Aussi, elles ont en moyenne une note de 70,7, comparativement à 45,2 pour les sociétés qui ne se conforment qu’aux exigences de leurs lois respectives. »

Manque de transparence

C’est pas moins de dix sociétés sur les 46 qui n’ont pas d’indicateur de performance ou de cible pour les évaluer, ou qui ne publient pas leur plan stratégique. Ce manque de transparence touche notamment la Commission de la capitale nationale, Héma-Québec et la Société de la Place des Arts de Montréal.

Yvan Allaire et François Daupin affirment également que « la transparence quant à la rémunération des hauts dirigeants des sociétés d’État peut et devrait être grandement améliorée, ne serait-ce que pour se rapprocher des exigences imposées aux sociétés pourtant dites “privées”.»

Enfin, les auteurs invitent les sociétés d’État à rendre publics la teneur des formations offertes aux administrateurs et les processus d’évaluation des membres du conseil. Cela dit, près du quart des sociétés d’État ne font pas d’évaluation et ne dévoilent pas cette information.

 

Je vous invite à lire l’ensemble du document sur le site de l’IGOPP, notamment pour connaître les 47 critères de mesure de la gouvernance.

Bonne lecture ! Vos commentaires sont les bienvenus.

 

Nos sociétés d’État sont-elles bien gouvernées? |  L’IGOPP leur attribue des notes de gouvernance

 

Six mesures pour améliorer la gouvernance des organismes publics au Québec | Yvan Allaire


Je suis tout à fait d’accord avec la teneur de l’article de l’IGOPP, publié par Yvan Allaire* intitulé « Six mesures pour améliorer la gouvernance des organismes publics au Québec», lequel dresse un état des lieux qui soulève des défis considérables pour l’amélioration de la gouvernance dans le secteur public et propose des mesures qui pourraient s’avérer utiles. Celui-ci fut a été soumis au journal Le Devoir, pour publication.

L’article soulève plusieurs arguments pour des conseils d’administration responsables, compétents, légitimes et crédibles aux yeux des ministres responsables.

Même si la Loi sur la gouvernance des sociétés d’État a mis en place certaines dispositions qui balisent adéquatement les responsabilités des C.A., celles-ci sont poreuses et n’accordent pas l’autonomie nécessaire au conseil d’administration, et à son président, pour effectuer une véritable veille sur la gestion de ces organismes.

Selon l’auteur, les ministres contournent allègrement les C.A., et ne les consultent pas. La réalité politique amène les ministres responsables à ne prendre principalement avis que du PDG ou du président du conseil : deux postes qui sont sous le contrôle et l’influence du ministère du conseil exécutif ainsi que des ministres responsables des sociétés d’État (qui ont trop souvent des mandats écourtés !).

Rappelons, en toile de fond à l’article, certaines dispositions de la loi :

– Au moins les deux tiers des membres du conseil d’administration, dont le président, doivent, de l’avis du gouvernement, se qualifier comme administrateurs indépendants.

– Le mandat des membres du conseil d’administration peut être renouvelé deux fois

– Le conseil d’administration doit constituer les comités suivants, lesquels ne doivent être composés que de membres indépendants :

1 ° un comité de gouvernance et d’éthique ;

2 ° un comité d’audit ;

3 ° un comité des ressources humaines.

– Les fonctions de président du conseil d’administration et de président-directeur général de la société ne peuvent être cumulées.

– Le ministre peut donner des directives sur l’orientation et les objectifs généraux qu’une société doit poursuivre.

– Les conseils d’administration doivent, pour l’ensemble des sociétés, être constitués à parts égales de femmes et d’hommes.

Yvan a accepté d’agir en tant qu’auteur invité dans mon blogue en gouvernance. Voici donc son article.

 

Six mesures pour améliorer la gouvernance des organismes publics au Québec

par Yvan Allaire*

 

La récente controverse à propos de la Société immobilière du Québec a fait constater derechef que, malgré des progrès certains, les espoirs investis dans une meilleure gouvernance des organismes publics se sont dissipés graduellement. Ce n’est pas tellement les crises récurrentes survenant dans des organismes ou sociétés d’État qui font problème. Ces phénomènes sont inévitables même avec une gouvernance exemplaire comme cela fut démontré à maintes reprises dans les sociétés cotées en Bourse. Non, ce qui est remarquable, c’est l’acceptation des limites inhérentes à la gouvernance dans le secteur public selon le modèle actuel.

 

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En fait, propriété de l’État, les organismes publics ne jouissent pas de l’autonomie qui permettrait à leur conseil d’administration d’assumer les responsabilités essentielles qui incombent à un conseil d’administration normal : la nomination du PDG par le conseil (sauf pour la Caisse de dépôt et placement, et même pour celle-ci, la nomination du PDG par le conseil est assujettie au veto du gouvernement), l’établissement de la rémunération des dirigeants par le conseil, l’élection des membres du conseil par les « actionnaires » sur proposition du conseil, le conseil comme interlocuteur auprès des actionnaires.

Ainsi, le C.A. d’un organisme public, dépouillé des responsabilités qui donnent à un conseil sa légitimité auprès de la direction, entouré d’un appareil gouvernemental en communication constante avec le PDG, ne peut que difficilement affirmer son autorité sur la direction et décider vraiment des orientations stratégiques de l’organisme.

Pourtant, l’engouement pour la « bonne » gouvernance, inspirée par les pratiques de gouvernance mises en place dans les sociétés ouvertes cotées en Bourse, s’était vite propagé dans le secteur public. Dans un cas comme dans l’autre, la notion d’indépendance des membres du conseil a pris un caractère mythique, un véritable sine qua non de la « bonne » gouvernance. Or, à l’épreuve, on a vite constaté que l’indépendance qui compte est celle de l’esprit, ce qui ne se mesure pas, et que l’indépendance qui se mesure est sans grand intérêt et peut, en fait, s’accompagner d’une dangereuse ignorance des particularités de l’organisme à gouverner.

Ce constat des limites des conseils d’administration que font les ministres et les ministères devrait les inciter à modifier ce modèle de gouvernance, à procéder à une sélection plus serrée des membres de conseil, à prévoir une formation plus poussée des membres de C.A. sur les aspects substantifs de l’organisme dont ils doivent assumer la gouvernance.

Or, l’État manifeste plutôt une indifférence courtoise, parfois une certaine hostilité, envers les conseils et leurs membres que l’on estime ignorants des vrais enjeux et superflus pour les décisions importantes.

Évidemment, le caractère politique de ces organismes exacerbe ces tendances. Dès qu’un organisme quelconque de l’État met le gouvernement dans l’embarras pour quelque faute ou erreur, les partis d’opposition sautent sur l’occasion, et les médias aidant, le gouvernement est pressé d’agir pour que le « scandale » s’estompe, que la « crise » soit réglée au plus vite. Alors, les ministres concernés deviennent préoccupés surtout de leur contrôle sur ce qui se fait dans tous les organismes sous leur responsabilité, même si cela est au détriment d’une saine gouvernance.

Ce brutal constat fait que le gouvernement, les ministères et ministres responsables contournent les conseils d’administration, les consultent rarement, semblent considérer cette agitation de gouvernance comme une obligation juridique, un mécanisme pro-forma utile qu’en cas de blâme à partager.

Prenant en compte ces réalités qui leur semblent incontournables, les membres des conseils d’organismes publics, bénévoles pour la plupart, se concentrent alors sur les enjeux pour lesquels ils exercent encore une certaine influence, se réjouissent d’avoir cette occasion d’apprentissage et apprécient la notoriété que leur apporte dans leur milieu ce rôle d’administrateur.

Cet état des lieux, s’il est justement décrit, soulève des défis considérables pour l’amélioration de la gouvernance dans le secteur public. Les mesures suivantes pourraient s’avérer utiles :

  1. Relever considérablement la formation donnée aux membres de conseil en ce qui concerne les particularités de fonctionnement de l’organisme, ses enjeux, ses défis et critères de succès. Cette formation doit aller bien au-delà des cours en gouvernance qui sont devenus quasi-obligatoires. Sans une formation sur la substance de l’organisme, un nouveau membre de conseil devient une sorte de touriste pendant un temps assez long avant de comprendre suffisamment le caractère de l’organisation et son fonctionnement.
  2. Accorder aux conseils d’administration un rôle élargi pour la nomination du PDG de l’organisme ; par exemple, le conseil pourrait, après recherche de candidatures et évaluation de celles-ci, recommander au gouvernement deux candidats pour le choix éventuel du gouvernement. Le conseil serait également autorisé à démettre un PDG de ses fonctions, après consultation du gouvernement.
  3. De même, le gouvernement devrait élargir le bassin de candidats et candidates pour les conseils d’administration, recevoir l’avis du conseil sur le profil recherché.
  4. Une rémunération adéquate devrait être versée aux membres de conseil ; le bénévolat en ce domaine prive souvent les organismes de l’État du talent essentiel au succès de la gouvernance.
  5. Rendre publique la grille de compétences pour les membres du conseil dont doivent se doter la plupart des organismes publics ; fournir une information détaillée sur l’expérience des membres du conseil et rapprocher l’expérience/expertise de chacun de la grille de compétences établie. Cette information devrait apparaître sur le site Web de l’organisme.
  6. Au risque de trahir une incorrigible naïveté, je crois que l’on pourrait en arriver à ce que les problèmes qui surgissent inévitablement dans l’un ou l’autre organisme public soient pris en charge par le conseil d’administration et la direction de l’organisme. En d’autres mots, en réponse aux questions des partis d’opposition et des médias, le ministre responsable indique que le président du conseil de l’organisme en cause et son PDG tiendront incessamment une conférence de presse pour expliquer la situation et présenter les mesures prises pour la corriger. Si leur intervention semble insuffisante, alors le ministre prend en main le dossier et en répond devant l’opinion publique.

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*Yvan Allaire, Ph. D. (MIT), MSRC Président exécutif du conseil, IGOPP Professeur émérite de stratégie, UQÀM

Le choix entre le couple expérience-réputation et le couple fougue-expertise | Ça dépend !


Aujourd’hui, je vous présente un cas fascinant qui illustre les difficultés de choisir un nouvel administrateur d’une jeune entreprise technologique.

Ce cas de gouvernance, publié en novembre 2017 sur le site de Julie Garland McLellan*, décrit la situation d’une entreprise qui est sur le point de s’inscrire en bourse ; choisit-elle, comme nouvel administrateur, une jeune personne fougueuse avec une solide expertise technique, ou choisit-elle une personne d’expérience possédant une grande réputation de bonne gouvernance ?

Le courtier qui conseille l’entreprise sur les conditions de son entrée en bourse lui suggère impérativement le choix d’une personne de grande réputation dans le domaine des affaires.

Le cas soumis est réel et il incite trois experts à présenter des points de vue assez différents sur les avantages et les inconvénients liés à chacun des choix.

Afin de vous former une idée mieux étayée du dilemme qui met en contraste les experts en gouvernance dans ce cas, je vous invite à lire leurs opinions en allant sur le site de Julie.

Et vous, qu’en pensez-vous ? Faites-vous une idée claire avant de consulter les réponses des experts.

Bonne lecture ! Vos commentaires sont toujours les bienvenus.

Le choix entre le couple expérience-réputation et le couple fougue-expertise | Ça dépend !

 

 

 

This month our case study considers the dilemma of choosing between experience and potential when building a board for an IPO. I hope you will enjoy thinking through the key governance issues and developing your own judgement from this dilemma.

Umberto founded his company ten years ago and built a successful technology company with a product that is tested in the market and capable of further development. Potential exists to take the product global; Umberto needs to move fast to retain the advantage of IP and know-how that can’t be easily replicated. An IPO is planned within twelve months and Umberto is confident his business will make a smooth transition from private to public company status.

Umberto has an advisory board with a range of skilled directors, each of whom adds considerable expertise in a relevant topic. He has benefitted greatly from their insights, and plans to convert this group of people into a governing board as he goes through the listing process. He is keen to add a new person to his board and has spoken with an ambitious bright young executive who has recently returned after five years in Asia selling a technology similar to Umberto’s product.

The broker advising on the IPO told Umberto that his board are a -bunch of unknowns” and unlikely to inspire the confidence of private equity investors and small funds that are the target market for his equity raising. The broker suggests appointing a ‘household name’ director from a large listed company. He admits that this person would not add much to the strategic competence of the board but claims they would help to bring in investors.

Umberto is in a quandary; he feels it would be disloyal to back out after his discussions with the young potential director, can’t justify bringing in two new directors, and doesn’t want to lose any of his existing team. He understands the merit of the broker’s suggestion. Should he choose experience and reputation or energy and ability?


*Julie Garland McLellan is a practising non-executive director and board consultant based in Sydney, Australia. www.mclellan.com.au/newsletter.html

Divulgation protégée d’un lanceur d’alerte dans une société d’État | Un cas épineux pour un président de conseil


Voici un cas de gouvernance, publié en octobre 2017 sur le site de Julie Garland McLellan*, qui présente une situation dans laquelle Tiffany, la présidente du conseil d’une grande société d’État, se demande quel plan d’action elle doit adopter avant la rencontre de son ministre responsable.

Le cas soumis est très délicat, car il présente une situation où un employé divulgue l’abus de pouvoir d’un haut dirigeant qui se rapporte au CEO. Les membres du conseil sont avisés des allégations, mais les administrateurs auraient voulu en savoir davantage. Cependant, ils comprennent que l’identité de l’informateur est protégée par leur propre politique !

Le CEO est très mécontent de la situation et il exige que ses employés lui fournissent toutes les informations relatives à cette divulgation.

Quelle approche Tiffany doit-elle privilégier lors de sa rencontre avec le ministre ? Doit-elle proposer le congédiement du CEO qui, dans l’ensemble, s’acquitte très bien de ses responsabilités de direction ? Quelles sont ses options ?

Le cas présente la situation succinctement, mais clairement ; puis, trois experts en gouvernance se prononcent sur le dilemme qui se présente aux personnes qui vivent des situations similaires.

Je vous invite donc à lire ces opinions en allant sur le site de Julie.

Bonne lecture ! Vos commentaires sont toujours les bienvenus.

 

Divulgation par un lanceur d’alerte dans une société d’État

 

Our case study this month looks at how a board can establish control without losing a valuable executive. I hope you will enjoy thinking through the key governance issues and developing your own judgement from this dilemma.

Tiffany chairs a large government-sector company. It is subject to intense public scrutiny as it handles multi-million-dollar investments and sensitive customer information.

A few months ago, a whistle-blower made a series of protected disclosures alleging improper use of position and information by one of the CEO’s direct reports. The Senior Compliance Officer (SCO) briefed the board, and CEO, on the allegations and their investigation. The board were unhappy with the level of detail available but accepted this as an inevitable consequence of their policy which protects the identity of whistle-blowers.

Unbeknownst to Tiffany, or her board, the CEO angrily followed up with the SCO after the board meeting and said that he was embarrassed to have been unable to provide complete answers to the board’s questions. The investigation eventually exonerated the person concerned and the SCO reported to the CEO that the case was ‘closed’. The CEO responded to the news with an emailed request that he now be told who had made the allegations. The SCO refused to divulge the identity but confirmed he had reported the outcome to the whistle-blower.

The following morning the CEO asked the SCO’s secretary to forward him a copy of all documents relating to the completed inquiry and specifically requested the closure report sent to the confidential informant. The SCO found out and referred the matter to the anti-corruption authority before reporting the matter to Tiffany.

Tiffany wants to brief the Minister before the matter becomes public. She would like a plan of action before she meets the Minister. She doesn’t want to fire the CEO as he is doing well in other respects; she knows action is essential.

What are her options?


*Julie Garland McLellan is a practising non-executive director and board consultant based in Sydney, Australia. www.mclellan.com.au/newsletter.html

Gouvernance des sociétés d’État | une étude montre des problèmes dans la moitié d’entre elles


Yvan Allaire, président exécutif du conseil de l’Institut sur la gouvernance (IGOPP) vient de publier, en collaboration avec François Dauphin, un nouveau document de recherche intitulé « Nos sociétés d’État sont-elles bien gouvernées ? » lequel a fait l’objet d’une analyse succincte par le journaliste Gérald Fillion de la Société Radio-Canada.

Selon l’IGOPP, « les contribuables s’attendent à ce que ces sociétés fassent bon usage des fonds publics qui leur sont confiés, que leur gestion soit efficace, efficiente et transparente, que leur mandat soit clair et pertinent. Leur conseil d’administration, s’appuyant sur des règles et principes de saine gouvernance, devrait jouer un rôle essentiel à cet égard ».

Je crois que ce rapport de recherche saura intéresser les spécialistes de la gouvernance qui œuvrent dans les sociétés d’État et dans les autres organisations parapubliques. Personnellement, je crois que les auteurs ont élaboré une méthodologie de recherche tout à fait pertinente pour évaluer la bonne gouvernance, non seulement des sociétés d’État, mais également de tous les types d’organisation.

 

 

Vous trouverez ci-dessous une analyse de Gérald Filion, suivie de la référence au document de recherche de l’IGOPP.

 

Sur 46 sociétés d’État au Québec seulement 23 obtiennent la note de passage en matière de gouvernance, selon une étude préparée par les chercheurs Yvan Allaire et François Dauphin.

Si les grandes sociétés se démarquent, notamment la Caisse de dépôt, la SAQ et Loto-Québec, d’autres affichent de faibles résultats qui pourraient amener le gouvernement à devoir repenser leur modèle de gouvernance. Parmi les derniers de classe, on compte l’École nationale de police, le Musée national des beaux-arts de Québec et l’Institut de tourisme et d’hôtellerie du Québec.

Ce rapport, publié jeudi par l’Institut sur la gouvernance d’entreprises publiques et privées, s’intéresse à 47 instruments de mesure de la gouvernance des sociétés pour établir un pointage sur 100. La note de passage est établie à 60. Ont été exclues de l’étude 13 sociétés jugées inactives dans les faits ou trop petites. Les 46 sociétés d’État retenues encaissent annuellement des revenus de 63 milliards de dollars et comptent 65 000 employés.

L’Institut sur la gouvernance évalue les sociétés sur les compétences des administrateurs, la transparence, la reddition de compte, la structure du conseil et le déroulement des séances du conseil. Et les résultats sont très inégaux.

L’École nationale de police échoue sur tous les plans, tout particulièrement sur les questions de compétence et de nomination. À l’autre bout du spectre, la Société d’habitation du Québec se démarque à tous les niveaux, avec une note parfaite dans la composition et la structure de son conseil, qui touche surtout à la question de l’indépendance.

L’Institut recommande au gouvernement de revoir certaines lois jugées « désuètes » pour encadrer les sociétés, de rendre publics les profils d’expertise et d’expérience des administrateurs et une foule d’informations pertinentes à leur propos.

Il propose aussi que le gouvernement cesse de rendre le dépôt du rapport annuel des sociétés d’État obligatoire à l’Assemblée nationale avant de le rendre public. Les rapports doivent être disponibles dans des délais plus rapides selon l’Institut sur la gouvernance. Actuellement, il faut attendre 6 mois en moyenne après la fin de l’exercice pour avoir accès au rapport annuel.

Les conseils d’administration des sociétés d’État, écrivent les chercheurs, doivent adopter des principes qui dépassent les exigences de la loi, surtout au chapitre de la « divulgation des profils de compétence, divulgation non obligatoire, mais non prohibée. »

Les conseils doivent s’assurer également que l’information, sur les sites internet des sociétés d’État, est facilement accessible, notamment les résultats de la société, ses stratégies ainsi que les indicateurs de performance. De plus, « une divulgation exhaustive des éléments de rémunération des hauts dirigeants est incontournable. »

Le gouvernement se mêle de tout

L’Institut illustre, chiffres à l’appui, combien le gouvernement s’assure de garder le contrôle sur les nominations des administrateurs.

« Ainsi, écrivent Yvan Allaire et François Dauphin, dans seulement cinq cas avons-nous trouvé une participation claire de la part du conseil dans le processus de sélection des candidats et candidates au poste d’administrateur. Bien sûr, le manque de transparence fausse peut-être en partie les données pour cet élément. Néanmoins, la participation du conseil dans le processus de sélection est extrêmement importante pour assurer non seulement la présence de compétences et d’expériences complémentaires au groupe, mais aussi pour faciliter l’obtention (ou le maintien) d’une dynamique de groupe fonctionnelle. »

Sur les 46 sociétés d’État, seulement trois établissent publiquement sur leur site un lien entre la biographie des administrateurs et les compétences recherchées au conseil.

L’Institut sur la gouvernance est d’avis également qu’une personne ne devrait pas siéger à plus de cinq conseils d’administration en même temps. Or, « au moins quinze (32,6 %) des sociétés comptaient au minimum un membre du conseil siégeant sur plus de cinq conseils d’administration, incluant quelques présidents de conseil. »

Aussi, « 19 sociétés (41,3 %) ne fournissent pas l’information sur l’assiduité des membres aux réunions du conseil. »

Les auteurs constatent également qu’il y a « une différence importante entre les organisations assujetties à la Loi québécoise sur la gouvernance des sociétés d’État promulguée en 2006 et celles qui ne le sont pas. En effet, les sociétés assujetties doivent divulguer davantage d’information, ne serait-ce que pour s’y conformer. Aussi, elles ont en moyenne une note de 70,7, comparativement à 45,2 pour les sociétés qui ne se conforment qu’aux exigences de leurs lois respectives. »

Manque de transparence

C’est pas moins de dix sociétés sur les 46 qui n’ont pas d’indicateur de performance ou de cible pour les évaluer, ou qui ne publient pas leur plan stratégique. Ce manque de transparence touche notamment la Commission de la capitale nationale, Héma-Québec et la Société de la Place des Arts de Montréal.

Yvan Allaire et François Daupin affirment également que « la transparence quant à la rémunération des hauts dirigeants des sociétés d’État peut et devrait être grandement améliorée, ne serait-ce que pour se rapprocher des exigences imposées aux sociétés pourtant dites “privées”.»

Enfin, les auteurs invitent les sociétés d’État à rendre publics la teneur des formations offertes aux administrateurs et les processus d’évaluation des membres du conseil. Cela dit, près du quart des sociétés d’État ne font pas d’évaluation et ne dévoilent pas cette information.

 

Je vous invite à lire l’ensemble du document sur le site de l’IGOPP, notamment pour connaître les 47 critères de mesure de la gouvernance.

Bonne lecture ! Vos commentaires sont les bienvenus.

 

Nos sociétés d’État sont-elles bien gouvernées? |  L’IGOPP leur attribue des notes de gouvernance

 

Colloque sur la gouvernance et la performance | Une perspective internationale


C’est avec plaisir que je partage l’information et l’invitation à un important colloque intitulé « Gouvernance et performance : une perspective internationale » qui aura lieu à l’Université McGill les 11 et 12 mai 2017.

C’est mon collègue, le professeur Félix ZOGNING NGUIMEYA, Ph.D., Adm.A., qui est le responsable de l’organisation de ce colloque en gouvernance à l’échelle internationale.

À la lecture du programme, vous constaterez que les organisateurs n’ont ménagé aucun effort pour apporter un éclairage très large de ce phénomène.

Ce colloque traite des récents développements et des sujets émergents en matière de gouvernance. La gouvernance, comme thématique transversale, est abordée dans tous ses aspects : gouvernance d’entreprise, gouvernance économique, gouvernance publique, en lien avec la création de valeur ou la performance des organisations, des politiques ou des programmes concernés. Dans chacun des contextes, les travaux souligneront l’effet des mécanismes de gouvernance sur la performance des organisations, institutions ou collectivités.

La perspective internationale du colloque a pour but d’examiner les modèles et structures de gouvernance présents dans différents pays et dans les différentes organisations, selon que ces modèles dépendent fortement du système juridique, du modèle économique et social, ainsi que le poids relatif des différentes parties prenantes. Les contributions sont donc attendues des chercheurs et professionnels de plusieurs champs disciplinaires, notamment les sciences économiques, les sciences juridiques, les sciences politiques, la comptabilité, la finance, l’administration et la stratégie.

Je vous invite à consulter le site web du colloque : https://gouvernance.splashthat.com/

Vous trouverez le programme détaillé du colloque à l’adresse suivante : http://www.acfas.ca/evenements/congres/programme/85/400/449/c

Le plus gros fonds souverain au monde veut plafonner la paie des patrons | Journal de Montréal


Selon un communiqué de l’Agence France Presse, publié le 7 avril 2017 dans le Journal de Montréal, « le fonds souverain de la Norvège, le plus gros au monde, a peaufiné vendredi son image d’investisseur responsable en réclamant un plafonnement de la rémunération des patrons et la transparence fiscale des entreprises ».

Bonne lecture !

Le fonds souverain de la Norvège, le plus gros au monde, a peaufiné vendredi son image d’investisseur responsable en réclamant un plafonnement de la rémunération des patrons et la transparence fiscale des entreprises

 

Dans chaque entreprise, le « conseil d’administration devrait (…) dévoiler un plafond pour la rémunération totale » du directeur général « pour l’année à venir », estime la banque centrale norvégienne, chargée de gérer le fonds, dans un nouveau « document de position ».

À une époque où les très gros salaires décollent, cette prise de position est d’autant plus importante que le fonds est présent au capital de quelque 9 000 entreprises à travers le monde, représentant 1,3 % de la capitalisation globale.

Par son poids et par sa gestion généralement jugée exemplaire en matière de transparence et d’éthique, le mastodonte scandinave donne souvent le « pas » pour d’autres investisseurs.

Résultats de recherche d'images pour « fonds souverain norvégien »

« C’est une très bonne nouvelle », s’est réjouie Manon Aubry, porte-parole d’Oxfam France. « Il s’agit d’un levier qui peut avoir un impact important sur le comportement des entreprises », a-t-elle expliqué à l’AFP, soulignant que le fonds norvégien n’était pas le seul à avoir pris ce genre de décision.

La contestation a un effet, parfois. Le directeur général du géant pétrolier britannique BP, Bob Dudley, a ainsi vu sa rémunération diminuer de 40 % en 2016, un an après un vote des actionnaires contre une hausse de son salaire, uniquement consultatif, mais offrant un désaveu cinglant.

Sous la pression de la classe politique et des syndicats, six hauts dirigeants de Bombardier ont accepté dimanche au Canada de réduire de moitié l’augmentation de 50 % initialement promise. Volkswagen a aussi décidé le mois dernier de plafonner les salaires pour les membres de son conseil d’administration, une question souvent débattue en Allemagne.

«Say on pay»

Le principe du « say on pay » vient par ailleurs d’entrer pour la première fois dans le droit français. Le vote des actionnaires en assemblée générale sur la rémunération des dirigeants est désormais contraignant grâce à la loi « Sapin 2 », dont le décret d’application a été publié en mars.

En 2016, la rémunération des dirigeants de trois entreprises, dont Carlos Ghosn chez Renault et Patrick Kron chez Alstom, avait été rejetée par les actionnaires. Mais ces avis, alors purement consultatifs, n’avaient pas été pris en compte par les conseils d’administration.

Longtemps peu regardant en la matière, le fonds norvégien s’implique de plus en plus dans la gouvernance des entreprises dont il est actionnaire. Il a par exemple voté l’an dernier contre la politique de rémunération des dirigeants d’Alphabet (Google), Goldman Sachs, JPMorgan ou encore Sanofi, selon le Financial Times.

« Nous ne sommes plus en position, en tant qu’investisseur, de dire que c’est une question sur laquelle on n’a pas d’avis », a déclaré au FT le patron du fonds, Yngve Slyngstad, en notant que le « say on pay » se répandait dans toujours plus de pays.

Jugeant que cela contribuerait à aligner les intérêts du patron sur ceux des actionnaires, le nouveau document prône aussi pour qu’« une part significative de la rémunération totale annuelle (soit) fournie en actions bloquées pour au moins cinq ans, et de préférence dix ans, indépendamment d’une démission ou d’un départ en retraite » et sans condition de performances.

Non à l’optimisation fiscale 

Dans un autre document publié vendredi, la Banque de Norvège a aussi exigé la transparence fiscale de la part des entreprises.

« Les impôts devraient être payés là où la valeur économique est générée », souligne-t-elle notamment, visiblement hostile à l’optimisation fiscale, technique légale qui consiste à déplacer les bénéfices là où l’imposition est moindre.

Sur le Vieux Continent, des géants comme Apple, Starbucks ou Fiat ont eu ces dernières années maille à partir avec la Commission européenne pour avoir tiré parti d’avantages fiscaux indus.

Le fonds norvégien conforte ainsi son image d’investisseur responsable.

Conformément à un vote du Parlement en 2015, le fonds — alimenté, paradoxalement, par les revenus pétroliers de l’État — se refuse à investir dans les entreprises, compagnies minières ou énergéticiens, où le charbon, néfaste pour le climat, représente plus de 30 % de l’activité.

Il n’est pas non plus autorisé à investir dans les entreprises coupables de violations graves des droits de l’Homme, dans celles qui fabriquent des armes nucléaires ou « particulièrement inhumaines » ou encore dans les producteurs de tabac.

La gouvernance des Cégeps | Le rapport du Vérificateur général du Québec


Nous publions ici un billet de Danielle Malboeuf* qui fait état des recommandations du vérificateur général eu égard à la gouvernance des CÉGEP.

Comme à l’habitude Danielle nous propose son article à titre d’auteure invitée.

Je vous souhaite bonne lecture. Vos commentaires sont appréciés.

 

La gouvernance des Cégeps et le rapport du Vérificateur général du Québec

par

Danielle Malboeuf*  

 

À l’automne 2016, le Vérificateur général du Québec produisait un rapport d’audit concernant la gestion administrative de cinq cégeps. Ses travaux ont porté plus précisément sur la gestion des contrats, la gestion des bâtiments, les services autofinancés ainsi que sur la rémunération du personnel d’encadrement et les frais engagés par celui-ci.

Parmi les recommandations formulées à l’endroit des cégeps audités, on en retrouve une qui concerne plus précisément la gouvernance : « S’assurer que les instances de gouvernance reçoivent une information suffisante et en temps opportun afin qu’elles puissent exercer leur rôle quant aux décisions stratégiques et à la surveillance de l’efficacité des contrôles…»[1]

À la lecture de ce rapport et des constats de ces travaux d’audit, on ne peut qu’être qu’en accord avec cette recommandation qui invite les administrateurs à exercer leur rôle. Mais justement, quel rôle ont-ils ? Du point de vue légal, la Loi sur les collèges d’enseignement général et professionnel est peu éclairante à ce sujet.  Contrairement à la Loi sur la gouvernance des sociétés d’État qui précise clairement les fonctions qui sont confiées au conseil d’administration (CA), dont l’obligation d’évaluer l’intégrité des contrôles internes. On y exige également la création de trois sous-comités dont le comité de vérification ou d’audit à qui on confie entre autres, la responsabilité de mettre en place des mécanismes de contrôle interne. De plus, ce sous-comité doit compter sur la présence d’au moins une personne ayant une compétence en matière comptable ou financière.

À mon avis, la gouvernance d’un cégep devrait s’apparenter à celle des sociétés d’État. À ce sujet, dans son rapport publié en mai 2011 soumettant un bilan de l’implantation de la Loi sur la gouvernance des sociétés d’État, l’auteur de ce rapport, l’Institut sur la gouvernance des organismes publics et privés (IGOPP) allait dans le même sens. Il formulait comme première recommandation : « Imposer les nouvelles règles de gouvernance aux nombreux organismes du gouvernement qui ne sont pas inclus dans la loi actuelle sur la gouvernance. »[2]

Malgré le fait que les cégeps n’ont pas l’obligation légale de créer un comité d’audit, plusieurs l’ont fait dans un souci de transparence et afin d’être soutenu par les administrateurs dans leur effort pour assurer une utilisation optimale des ressources financières de l’organisation. Toutefois, le mandat qui leur est confié se limite dans la majorité des cas à une analyse des prévisions budgétaires et des états financiers. Ce n’est pas suffisant !

Considérant la recommandation du vérificateur général, il serait tout à fait approprié d’élargir ce mandat. En plus d’examiner les états financiers et d’en recommander leur approbation au CA, le comité d’audit devrait entre autres, veiller à ce que des mécanismes de contrôle interne soient mis en place et de s’assurer qu’ils soient adéquats et efficaces ainsi que de s’assurer que soit mis en place un processus de gestion des risques.[3] Sachant que les cégeps ne comptent pas de vérificateur interne, il est d’autant plus important de mettre en place un tel comité et de lui confier des fonctions de contrôle financier et de gestion des risques.

Une fois le comité d’audit mis en place, il devrait se pencher prioritairement sur la surveillance du processus de gestion contractuelle. Rappelons que les étapes du processus de gestion contractuelle sont : l’établissement des besoins et l’estimation des coûts, la préparation de l’appel d’offres et la sollicitation des fournisseurs, la sélection du fournisseur et l’attribution du contrat, le suivi du contrat et l’évaluation des biens et des services reçus[4].

À ce sujet, le Vérificateur général, dans son rapport, nous fait part de ses préoccupations. Il a identifié des lacunes dans les modes de sollicitation et constaté des dépassements de coûts et des prolongations dans les délais d’exécution, et ce, sans pénalité. Il précise que «Des activités prévues dans le processus de gestion contractuelle des cégeps audités ne sont pas effectuées de façon rigoureuse.»[5] En jouant son rôle, le comité d’audit du CA pourrait s’assurer que le processus mis en place et le partage des responsabilités retenu sont adéquats et efficaces. Il ne devrait d’ailleurs pas hésiter à faire appel à des ressources externes pour évaluer la performance du Cégep à l’égard de sa gestion contractuelle, le cas échéant.

En terminant, rappelons l’importance de retrouver sur le comité d’audit des administrateurs compétents qui ont une connaissance approfondie de la structure, des politiques, directives et exigences réglementaires. Ils doivent avoir la capacité d’assurer l’efficacité des mécanismes de contrôle interne et de la gestion des risques (un sujet que je développerai dans un article ultérieur).

En présence de telles compétences, il sera plus facile d’assurer la crédibilité du CA et de ses décisions. Il s’agit d’un atout précieux pour toutes institutions collégiales.

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[1] Rapport du Vérificateur général du Québec à l’Assemblée nationale pour l’année 2016-2017, p.35.

[2] Gouvernance des sociétés d’État, bilan et suggestions, IGOPP, p.48.

[3] Loi sur la gouvernance des sociétés d’État, art 24, 3.

[4] Rapport du Vérificateur général du Québec à l’Assemblée nationale pour l’année 2016-2017, annexe 4.

[5] Rapport du Vérificateur général du Québec à l’Assemblée nationale pour l’année 2016-2017, p.9.

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*Danielle Malboeuf est consultante et formatrice en gouvernance ; elle possède une grande expérience dans la gestion des CÉGEPS et dans la gouvernance des institutions d’enseignement collégial et universitaire. Elle est CGA-CPA, MBA, ASC, Gestionnaire et administratrice retraitée du réseau collégial et consultante.


Articles sur la gouvernance des CÉGEPS publiés sur mon blogue par l’auteure :

(1) LE RÔLE DU PRÉSIDENT DU CONSEIL D’ADMINISTRATION (PCA) | LE CAS DES CÉGEPS

(2) Les grands enjeux de la gouvernance des institutions d’enseignement collégial

(3) L’exercice de la démocratie dans la gouvernance des institutions d’enseignement collégial

(4) Caractéristiques des bons administrateurs pour le réseau collégial | Danielle Malboeuf

(5) La gouvernance des CÉGEPS | Une responsabilité partagée

Le rôle du conseil d’administration dans les procédures de conformité


Voici un cas de gouvernance, publié en décembre sur le site de Julie Garland McLellan* qui illustre comment la direction d’une société publique peut se retrouver en situation d’irrégularité malgré une culture du conseil d’administration axée sur la conformité.

L’investigation du vérificateur général (VG) a révélé plusieurs failles dans les procédures internes de la société. De ce fait, Kyle le président du comité d’audit, risque et conformité, est interpellé par le président du conseil afin d’aider la direction à trouver des solutions durables pour remédier à la situation.

Même si Kyle est conscient qu’il ne possède pas l’autorité requise pour régler les problèmes constatés par le VG, il comprend qu’il est impératif que son message passe.

Le cas présente la situation de manière assez succincte, mais explicite ; puis, trois experts en gouvernance se prononcent sur le dilemme qui se présente aux personnes qui vivent des situations similaires.

Bonne lecture ! Vos commentaires sont toujours les bienvenus.

Le rôle du conseil d’administration dans les procédures de conformité

 

Business audit concept . Flat design vector illustration

Kyle is chairman on the Audit, Risk and Compliance committee of a government authority board which is subject to a Public Access to Information Act. The auditor general has just completed an audit of several authorities bound by that Act and Kyle’s authority was found to have several breeches of the Act, in particular;

–  some contracts valued at $150,000 or more were not recorded in the contracts register

–  some contracts were not entered into the register within 45 working days of the contracts becoming effective

–  there were instances where inaccurate information was recorded in the register when compared with the contracts, and

–  additional information required for certain classes of contracts was not disclosed in some registers.

The Board Chairman is rightly concerned that this has happened in what all directors believed to be a well governed authority with a strong culture of compliance. The Board Chairman has asked Kyle to oversee management’s response to the Auditor General and the development of systems to ensure that these breeches do not reoccur. Kyle is mindful that he remains a non-executive and has no authority within the chain of management command. He is keen to help and knows that the CEO is struggling with the complexity of her role and will need assistance with any increase in workload.

How can Kyle help without getting embroiled in management affairs?

Raz’s Answer

The issue I spot here, is one which I’ve encountered myself – as a seasoned professional, you have the internal urge to roll your sleeves and get right into it, and solve the problem. From the details disclosed in this dilemma, there’s evidence that the authority’s internal culture is compliant, therefore it’s hard to believe there’s foul play which caused these discrepancies in the reports. I would have guessed that there are some legacy processes, or even old technology, which needs to be looked at and discover where the gap is.

The CEO is under immense pressure to fix this issue, being exposed to public scrutiny, but with the government’s limited resources at her disposal, the pressure is even higher. Making decisions under such pressure, especially when a board member, the chair of the Audit, Risk and Compliance Committee is looking over her shoulder, will likely to force her to make mistakes.

Kyle’s dilemma is simple to explain, but more delicate to handle: « How do I fix this, without sticking my nose into the operations? »

As a NED, what Kyle needs to be is a guide to the CEO, providing a calm and supportive environment for the CEO to operate in. Kyle needs to consult with the CEO, and get her on side, to ensure she’ll devote whichever resources she does have, to deal with this issue. This won’t be a Band-Aid solution, but a solution which will require collaboration of several parts of the organisations, orchestrated by the CEO herself.

Raz Chorev is Partner at Orange Sky and Managing Director at CXC Global. He is based in Sydney, Australia.

Julie’s Answer

The Auditor General has asked management to respond and board oversight of management should be done by and through the CEO.

Kyle cannot help without putting his fingers (or intellect) into the organisation. To do that without causing upset he will need to inform the CEO of the Chairman’s request, offer to help and make sure that he reports to her before he reports elsewhere. Handled sensitively the CEO, who appears to be struggling, should welcome any assistance with the task. Handled insensitively this could be a major issue because the statutory definitions of directors’ roles in public sector companies are less fluid than those in the private sector.

Kyle should also take this as a wake-up call – he assumes a culture of compliance and good governance but that is obviously not correct. The audit committee should regularly review the regulatory and legislative compliance framework and verify that all is as it should be; that has clearly not happened and Kyle should work with the company secretary or chief compliance/legal officer to review the entire framework and make sure nothing else is missing from the regular schedule of reviews. The committee must ask for what it needs to oversight effectively not just read what they are given.

The prevailing attitude should be one of thankfulness that the issue has been found and can be corrected. If Kyle detects a cultural rejection of the need to comply and cooperate with the AG in establishing good governance then Kyle must report to the whole board so remedial action can be planned.

Once management have responded to the AG with their proposed actions to remedy the matter. The audit committee should review to check that the actions have been implemented and that they effectively lead to compliance with the requirements. Likely remedies include amending the position descriptions of staff doing tendering or those setting up vendors in the payments system to include entry of details to the register, training in compliance, design of an internal audit system for routine review of registers and comparison to workloads to ensure that nothing has ‘dropped between the cracks’, and regular reporting of register completion and audit to the board audit committee.

Sean’s Answer

The Audit Risk and Compliance Committee (« Committee ») is to assist the Board in fulfilling its corporate governance and oversight responsibilities in relation to the bodies’ financial reporting, internal control structure, risk management systems, compliance and the external audit function.

The external auditors are responsible for auditing the bodies’ financial reports and for reviewing the unaudited interim financial reports. The Financial Management and Accountability Act 1997 calls for auditing financial statements and performance reviews by the Auditor General.

As Committee Chairman Kyle must be independent and must have leadership experience and a strong finance, accounting or business background. So too must the CEO and CFO have appropriate and sufficient qualifications, knowledge, competence, experience and integrity and other personal attributes to undertake their roles.

It should be the responsibility of the Committee to maintain free and open communication between the Committee, external auditors and management. The Committee’s function is principally oversight and review.

The appointment and ongoing assessment, mentoring and discipline of the CEO rests with the board but the delegation of this authority in relation to compliance often rests with the Committee and Board Chairs.

Kyle may invite members of management (CFO and maybe the CEO) or others to attend meetings  and the Committee should have  authority, within the scope of its responsibilities, to seek information it requires, and assistance  from any employee or external party. Inviting the CFO and or CEO to the Committee allows visibility and a holistic and independent forum where deficiencies may be isolated and functions (but not responsibility) delegated to others.

There is a disconnect or deficiency in one or more functions; Kyle should ensure that the Committee holistically review its own charter, discuss with management and the external auditors the adequacy and effectiveness of the internal controls and reporting functions (including the Bodies’s policies and procedures to assess, monitor and manage these controls), as well as a review of the internal quality control procedures (because these are also suspected to be deficient).

It will rapidly become apparent to management, the Committee, Kyle, the board and the Chairman where the deficiencies lie or did lie, and how they have been corrected. Underlying behavioural problems and or abilities to function will also become apparent and with these appropriately addressed similar deficiencies in other areas of the body may be contemporaneously corrected and all reported to the Auditor General.

Sean Rothsey is Chairman and Founder of the Merkin Group. He is based in Cooroy, Queensland, Australia.


*Julie Garland McLellan is a practising non-executive director and board consultant based in Sydney, Australia. www.mclellan.com.au/newsletter.html

Six mesures pour améliorer la gouvernance des organismes publics au Québec | Yvan Allaire


Je suis tout à fait d’accord avec la teneur de l’article de l’IGOPP, publié par Yvan Allaire* intitulé « Six mesures pour améliorer la gouvernance des organismes publics au Québec», lequel dresse un état des lieux qui soulève des défis considérables pour l’amélioration de la gouvernance dans le secteur public et propose des mesures qui pourraient s’avérer utiles. Celui-ci fut a été soumis au journal Le Devoir, pour publication.

L’article soulève plusieurs arguments pour des conseils d’administration responsables, compétents, légitimes et crédibles aux yeux des ministres responsables.

Même si la Loi sur la gouvernance des sociétés d’État a mis en place certaines dispositions qui balisent adéquatement les responsabilités des C.A., celles-ci sont poreuses et n’accordent pas l’autonomie nécessaire au conseil d’administration, et à son président, pour effectuer une véritable veille sur la gestion de ces organismes.

Selon l’auteur, les ministres contournent allègrement les C.A., et ne les consultent pas. La réalité politique amène les ministres responsables à ne prendre principalement avis que du PDG ou du président du conseil : deux postes qui sont sous le contrôle et l’influence du ministère du conseil exécutif ainsi que des ministres responsables des sociétés d’État (qui ont trop souvent des mandats écourtés !).

Rappelons, en toile de fond à l’article, certaines dispositions de la loi :

– Au moins les deux tiers des membres du conseil d’administration, dont le président, doivent, de l’avis du gouvernement, se qualifier comme administrateurs indépendants.

– Le mandat des membres du conseil d’administration peut être renouvelé deux fois

– Le conseil d’administration doit constituer les comités suivants, lesquels ne doivent être composés que de membres indépendants :

1 ° un comité de gouvernance et d’éthique ;

2 ° un comité d’audit ;

3 ° un comité des ressources humaines.

– Les fonctions de président du conseil d’administration et de président-directeur général de la société ne peuvent être cumulées.

– Le ministre peut donner des directives sur l’orientation et les objectifs généraux qu’une société doit poursuivre.

– Les conseils d’administration doivent, pour l’ensemble des sociétés, être constitués à parts égales de femmes et d’hommes.

Yvan a accepté d’agir en tant qu’auteur invité dans mon blogue en gouvernance. Voici donc son article.

 

Six mesures pour améliorer la gouvernance des organismes publics au Québec

par Yvan Allaire*

 

La récente controverse à propos de la Société immobilière du Québec a fait constater derechef que, malgré des progrès certains, les espoirs investis dans une meilleure gouvernance des organismes publics se sont dissipés graduellement. Ce n’est pas tellement les crises récurrentes survenant dans des organismes ou sociétés d’État qui font problème. Ces phénomènes sont inévitables même avec une gouvernance exemplaire comme cela fut démontré à maintes reprises dans les sociétés cotées en Bourse. Non, ce qui est remarquable, c’est l’acceptation des limites inhérentes à la gouvernance dans le secteur public selon le modèle actuel.

 

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En fait, propriété de l’État, les organismes publics ne jouissent pas de l’autonomie qui permettrait à leur conseil d’administration d’assumer les responsabilités essentielles qui incombent à un conseil d’administration normal : la nomination du PDG par le conseil (sauf pour la Caisse de dépôt et placement, et même pour celle-ci, la nomination du PDG par le conseil est assujettie au veto du gouvernement), l’établissement de la rémunération des dirigeants par le conseil, l’élection des membres du conseil par les « actionnaires » sur proposition du conseil, le conseil comme interlocuteur auprès des actionnaires.

Ainsi, le C.A. d’un organisme public, dépouillé des responsabilités qui donnent à un conseil sa légitimité auprès de la direction, entouré d’un appareil gouvernemental en communication constante avec le PDG, ne peut que difficilement affirmer son autorité sur la direction et décider vraiment des orientations stratégiques de l’organisme.

Pourtant, l’engouement pour la « bonne » gouvernance, inspirée par les pratiques de gouvernance mises en place dans les sociétés ouvertes cotées en Bourse, s’était vite propagé dans le secteur public. Dans un cas comme dans l’autre, la notion d’indépendance des membres du conseil a pris un caractère mythique, un véritable sine qua non de la « bonne » gouvernance. Or, à l’épreuve, on a vite constaté que l’indépendance qui compte est celle de l’esprit, ce qui ne se mesure pas, et que l’indépendance qui se mesure est sans grand intérêt et peut, en fait, s’accompagner d’une dangereuse ignorance des particularités de l’organisme à gouverner.

Ce constat des limites des conseils d’administration que font les ministres et les ministères devrait les inciter à modifier ce modèle de gouvernance, à procéder à une sélection plus serrée des membres de conseil, à prévoir une formation plus poussée des membres de C.A. sur les aspects substantifs de l’organisme dont ils doivent assumer la gouvernance.

Or, l’État manifeste plutôt une indifférence courtoise, parfois une certaine hostilité, envers les conseils et leurs membres que l’on estime ignorants des vrais enjeux et superflus pour les décisions importantes.

Évidemment, le caractère politique de ces organismes exacerbe ces tendances. Dès qu’un organisme quelconque de l’État met le gouvernement dans l’embarras pour quelque faute ou erreur, les partis d’opposition sautent sur l’occasion, et les médias aidant, le gouvernement est pressé d’agir pour que le « scandale » s’estompe, que la « crise » soit réglée au plus vite. Alors, les ministres concernés deviennent préoccupés surtout de leur contrôle sur ce qui se fait dans tous les organismes sous leur responsabilité, même si cela est au détriment d’une saine gouvernance.

Ce brutal constat fait que le gouvernement, les ministères et ministres responsables contournent les conseils d’administration, les consultent rarement, semblent considérer cette agitation de gouvernance comme une obligation juridique, un mécanisme pro-forma utile qu’en cas de blâme à partager.

Prenant en compte ces réalités qui leur semblent incontournables, les membres des conseils d’organismes publics, bénévoles pour la plupart, se concentrent alors sur les enjeux pour lesquels ils exercent encore une certaine influence, se réjouissent d’avoir cette occasion d’apprentissage et apprécient la notoriété que leur apporte dans leur milieu ce rôle d’administrateur.

Cet état des lieux, s’il est justement décrit, soulève des défis considérables pour l’amélioration de la gouvernance dans le secteur public. Les mesures suivantes pourraient s’avérer utiles :

  1. Relever considérablement la formation donnée aux membres de conseil en ce qui concerne les particularités de fonctionnement de l’organisme, ses enjeux, ses défis et critères de succès. Cette formation doit aller bien au-delà des cours en gouvernance qui sont devenus quasi-obligatoires. Sans une formation sur la substance de l’organisme, un nouveau membre de conseil devient une sorte de touriste pendant un temps assez long avant de comprendre suffisamment le caractère de l’organisation et son fonctionnement.
  2. Accorder aux conseils d’administration un rôle élargi pour la nomination du PDG de l’organisme ; par exemple, le conseil pourrait, après recherche de candidatures et évaluation de celles-ci, recommander au gouvernement deux candidats pour le choix éventuel du gouvernement. Le conseil serait également autorisé à démettre un PDG de ses fonctions, après consultation du gouvernement.
  3. De même, le gouvernement devrait élargir le bassin de candidats et candidates pour les conseils d’administration, recevoir l’avis du conseil sur le profil recherché.
  4. Une rémunération adéquate devrait être versée aux membres de conseil ; le bénévolat en ce domaine prive souvent les organismes de l’État du talent essentiel au succès de la gouvernance.
  5. Rendre publique la grille de compétences pour les membres du conseil dont doivent se doter la plupart des organismes publics ; fournir une information détaillée sur l’expérience des membres du conseil et rapprocher l’expérience/expertise de chacun de la grille de compétences établie. Cette information devrait apparaître sur le site Web de l’organisme.
  6. Au risque de trahir une incorrigible naïveté, je crois que l’on pourrait en arriver à ce que les problèmes qui surgissent inévitablement dans l’un ou l’autre organisme public soient pris en charge par le conseil d’administration et la direction de l’organisme. En d’autres mots, en réponse aux questions des partis d’opposition et des médias, le ministre responsable indique que le président du conseil de l’organisme en cause et son PDG tiendront incessamment une conférence de presse pour expliquer la situation et présenter les mesures prises pour la corriger. Si leur intervention semble insuffisante, alors le ministre prend en main le dossier et en répond devant l’opinion publique.

_______________________________________________

*Yvan Allaire, Ph. D. (MIT), MSRC Président exécutif du conseil, IGOPP Professeur émérite de stratégie, UQÀM

Un guide essentiel pour comprendre et enseigner la gouvernance | En rappel


Plusieurs administrateurs et formateurs me demandent de leur proposer un document de vulgarisation sur le sujet de la gouvernance. J’ai déjà diffusé sur mon blogue un guide à l’intention des journalistes spécialisés dans le domaine de la gouvernance des sociétés à travers le monde. Il a été publié par le Global Corporate Governance Forum et International Finance Corporation (un organisme de la World Bank) en étroite coopération avec International Center for Journalists.

Je n’ai encore rien vu de plus complet et de plus pertinent sur la meilleure manière d’appréhender les multiples problématiques reliées à la gouvernance des entreprises mondiales. La direction de Global Corporate Governance Forum m’a fait parvenir le document en français le 14 février.

Qui dirige l’entreprise : Guide pratique de médiatisation du gouvernement d’entreprise — document en français

 

Ce guide est un outil pédagogique indispensable pour acquérir une solide compréhension des diverses facettes de la gouvernance des sociétés. Les auteurs ont multiplié les exemples de problèmes d’éthiques et de conflits d’intérêts liés à la conduite des entreprises mondiales.

On apprend aux journalistes économiques — et à toutes les personnes préoccupées par la saine gouvernance — à raffiner les investigations et à diffuser les résultats des analyses effectuées. Je vous recommande fortement de lire le document, mais aussi de le conserver en lieu sûr car il est fort probable que vous aurez l’occasion de vous en servir.

Vous trouverez ci-dessous quelques extraits de l’introduction à l’ouvrage. Bonne lecture !

Who’s Running the Company ? A Guide to Reporting on Corporate Governance

À propos du Guide

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« This Guide is designed for reporters and editors who already have some experience covering business and finance. The goal is to help journalists develop stories that examine how a company is governed, and spot events that may have serious consequences for the company’s survival, shareholders and stakeholders. Topics include the media’s role as a watchdog, how the board of directors functions, what constitutes good practice, what financial reports reveal, what role shareholders play and how to track down and use information shedding light on a company’s inner workings. Journalists will learn how to recognize “red flags,” or warning  signs, that indicate whether a company may be violating laws and rules. Tips on reporting and writing guide reporters in developing clear, balanced, fair and convincing stories.

 

Three recurring features in the Guide help reporters apply “lessons learned” to their own “beats,” or coverage areas:

– Reporter’s Notebook: Advise from successful business journalists

– Story Toolbox:  How and where to find the story ideas

– What Do You Know? Applying the Guide’s lessons

Each chapter helps journalists acquire the knowledge and skills needed to recognize potential stories in the companies they cover, dig out the essential facts, interpret their findings and write clear, compelling stories:

  1. What corporate governance is, and how it can lead to stories. (Chapter 1, What’s good governance, and why should journalists care?)
  2. How understanding the role that the board and its committees play can lead to stories that competitors miss. (Chapter 2, The all-important board of directors)
  3. Shareholders are not only the ultimate stakeholders in public companies, but they often are an excellent source for story ideas. (Chapter 3, All about shareholders)
  4. Understanding how companies are structured helps journalists figure out how the board and management interact and why family-owned and state-owned enterprises (SOEs), may not always operate in the best interests of shareholders and the public. (Chapter 4, Inside family-owned and state-owned enterprises)
  5. Regulatory disclosures can be a rich source of exclusive stories for journalists who know where to look and how to interpret what they see. (Chapter 5, Toeing the line: regulations and disclosure)
  6. Reading financial statements and annual reports — especially the fine print — often leads to journalistic scoops. (Chapter 6, Finding the story behind the numbers)
  7. Developing sources is a key element for reporters covering companies. So is dealing with resistance and pressure from company executives and public relations directors. (Chapter 7, Writing and reporting tips)

Each chapter ends with a section on Sources, which lists background resources pertinent to that chapter’s topics. At the end of the Guide, a Selected Resources section provides useful websites and recommended reading on corporate governance. The Glossary defines terminology used in covering companies and corporate governance ».

Here’s what Ottawa’s new rules for state-owned buyers may look like (business.financialpost.com)

The Vote is Cast: The Effect of Corporate Governance on Shareholder Value (greenbackd.com)

Effective Drivers of Good Corporate Governance (shilpithapar.com)

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